Comment réduire l’empreinte énergétique de nos bâtiments?

Miriane Demers-Lemay
Collaboration spéciale
Pour réduire la consommation énergétique de l’ensemble du territoire, il vaut mieux rénover les habitations plutôt que construire neuf, la démolition générant des tas de déchets terminant au dépotoir.
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir Pour réduire la consommation énergétique de l’ensemble du territoire, il vaut mieux rénover les habitations plutôt que construire neuf, la démolition générant des tas de déchets terminant au dépotoir.

Ce texte fait partie du cahier spécial Environnement

Calfeutrer ses fenêtres, rénover au lieu de démolir, réduire la température ambiante de quelques degrés l’hiver, miser sur de la technologie innovante : nombreux sont les petits gestes qui ont un grand impact sur l’empreinte énergétique de nos bâtiments.

Sur l’avenue du Parc à Montréal, l’ancienne boutique avait pratiquement été laissée à l’abandon. En 2006, le directeur général d’Écohabitation, Emmanuel Cosgrove, et sa famille ont recyclé ses matériaux et rénové le bâtiment pour le transformer en triplex. Des exemples de rénovations vertes comme celui-ci, il y en a un peu partout dans la province, affirme le consultant en habitation écologique. Mais avant de se lancer dans des travaux majeurs, de petits gestes peuvent avoir un grand impact sur l’empreinte énergétique de nos habitations, assure ce dernier.

Dans la province, il est estimé que près du tiers de l’énergie consommée est associée à nos bâtiments. De cette portion, Hydro-Québec calcule que la consommation d’énergie d’un ménage se distribue de la façon suivante : 54 % vont au chauffage et à la climatisation, 20 % au chauffage de l’eau, 18 % aux électroménagers et appareils électroniques, et 5 à 10 % à l’éclairage.

« Ce qui nous coûte le plus cher, c’est de chauffer l’eau et l’air, résume Emmanuel Cosgrove. On a beau éteindre les lumières, dans le fond, [pour une véritable économie d’énergie], il faut utiliser moins d’eau chaude et conserver la chaleur à l’intérieur en calfeutrant les petites craques qu’on a partout autour de nos fenêtres dans nos maisons et en bouchant bien nos cheminées. Si on prend la peine de faire ça, les économies, l’efficacité énergétique et la période de retour sur l’investissement sont immédiates. »

« On sait qu’avec des travaux d’isolation, on peut réduire sa consommation énergétique de moitié sur l’enveloppe du bâtiment, renchérit Stéphanie Lopez, conseillère en immobilier durable chez Vivre en Ville. Le principal enjeu des villes aujourd’hui, c’est de rénover le parc immobilier. On travaille sur l’isolation thermique, l’étanchéité, le vitrage performant, etc. »

Rénover et réduire sa consommation

 

Et si on repartait de zéro pour construire un bâtiment plus durable ? Si tentante qu’elle soit, l’idée se révèle mauvaise. La démolition génère en effet de grands tas de rebuts terminant au dépotoir, tandis que la construction d’un nouvel édifice implique des coûts cachés en énergie, fait valoir Stéphanie Lopez. « Et il y a toute l’énergie cachée du bâtiment, liée à la construction, l’extraction des minerais, la fabrication de matériaux, qui sont émetteurs de gaz à effet de serre (GES) », détaille-t-elle.

Le principal enjeu des villes aujourd’hui, c’est de rénover le parc immobilier

 

Pour réduire l’empreinte environnementale de nos bâtiments, Stéphanie Lopez préconise aussi de réduire à la source. « L’énergie en Europe est beaucoup plus chère, alors les gens font beaucoup plus attention, observe la consultante d’origine française. Je suis un peu démunie au Québec, parce que les consommateurs ne savent pas ce qu’ils consomment réellement. Par exemple, peu de gens savent qu’en plein hiver, Hydro-Québec a recours à des énergies fossiles parce qu’elle ne produit pas suffisamment d’énergie hydroélectrique. »

Au lieu de chauffer la maison à 23-24 °C l’hiver, elle suggère ainsi de mettre une petite laine et de réduire la température ambiante de quelques degrés. Une bonne thermorégulation, avec des fenêtres situées sur des façades opposées qui optimisent une ventilation naturelle pendant l’été, permettra également de limiter l’utilisation de la climatisation.

Pour Denis Leclerc, président d’Écotech, la technologie peut également nous aider à réduire notre consommation. « Il y a toutes sortes de technologies qui permettent de détecter qu’il y a quelqu’un dans les bureaux et d’activer l’éclairage et la climatisation. Ces détecteurs d’occupation vont avoir un impact sur la consommation d’énergie », souligne-t-il, ajoutant qu’ils permettent d’ajuster l’utilisation de l’énergie selon des facteurs tels que la présence humaine, l’heure de la journée ou le degré d’ensoleillement.

Ça nous oblige à modifier nos façons d’envisager la conception, dit celui qui plaide par ailleurs pour l’adoption de mécanismes pour réutiliser l’énergie dans nos bâtiments.

« Avec l’eau grise par exemple, quand tu prends une douche, toute l’eau chaude va dans un drain, fait-il constater. On voit cependant de plus en plus de dispositifs permettant de capter la chaleur de cette eau et de l’utiliser pour chauffer l’eau froide des chauffe-eau. »

Le pouvoir de la mitoyenneté

Pour rendre nos maisons plus vertes, un autre concept est aussi à privilégier : la mitoyenneté. « Les pertes thermiques passent de l’intérieur vers l’extérieur par le biais de l’enveloppe du bâtiment. Ce sont donc les façades exposées aux intempéries qui occasionnent des déperditions de chaleur, explique Léa Méthé, directrice principale d’Écobâtiment. Dans une maison unifamiliale [bâtie] comme un cube, on a cinq faces exposées, alors que dans un jumelé, on n’en a plus que quatre par unité. »

En raison de leurs murs mitoyens, les duplex, triplex et autres « plex » permettent non seulement de réduire les pertes de chaleur, mais réduisent aussi la consommation d’énergie associée aux transports. « Ce qui est intéressant, ce sont les densités moyennes, mais ça exige plus de créativité en conception architecturale pour gérer les accès aux cours, aux espaces verts, donner la chance à chacun d’avoir un balcon ou d’avoir un accès privatif vers l’extérieur, explique Léa Méthé. Cela appartient à l’industrie, mais aussi aux OBNL et aux promoteurs d’habitations sociales de produire de nouvelles formes d’habitation capables de démontrer que vivre dans des milieux denses, ça peut aussi être agréable. C’est le modèle qui permet la ville compacte et la limitation des transports. Et c’est là que le gros gain se fait en matière d’énergie et de GES. »

 

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.



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