Québec promet plus de transparence à propos des puits pétroliers et gaziers qui seront fermés aux frais de l’État

Plusieurs des puits d’exploration qui doivent être fermés définitivement sont des puits de gaz de schiste situés en milieu agricole.
Valerian Mazataud Le Devoir Plusieurs des puits d’exploration qui doivent être fermés définitivement sont des puits de gaz de schiste situés en milieu agricole.

Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, promet que son gouvernement rendra publiques les informations sur les 62 puits pétroliers et gaziers — dont des puits de gaz de schiste — qui devront être fermés d’ici peu aux frais de l’État par les entreprises qui en sont responsables.

Le Devoir révélait mercredi matin que le gouvernement Legault a refusé de détailler la situation de ces puits, qui seront fermés définitivement à la suite de l’adoption d’une loi mettant un terme à l’exploration pétrolière et gazière au Québec.

À la suite d’une demande d’accès à l’information, il avait finalement été possible d’obtenir un document, mais ce dernier était lourdement caviardé et ne comptait que quelques informations peu précises. On y trouvait seulement le numéro de 14 puits, dont 5 puits de gaz de schiste et 8 puits de recherche de pétrole, et le nom de l’entreprise « responsable » de chacun d’eux. Une des entreprises mentionnées avait cessé d’exister, une autre avait quitté le Québec et une troisième avait intenté une action en justice contre le gouvernement l’an dernier en raison de l’arrêt de son projet pétrolier à Gaspé.

Ce texte est publié via notre Pôle environnement.

Interpellé mercredi par Le Devoir, le ministre Jonatan Julien s’est voulu rassurant. « Les 62 puits sont identifiés, on sait qui les possède et ils ont des plans de fermeture », a-t-il fait valoir. Parmi ceux-ci, on compte des puits de gaz de schiste forés et fracturés, mais aussi d’autres puits d’exploration, dont des puits qui ont produit des barils de pétrole brut ces dernières années en Gaspésie.

Une facture estimée de 33 millions

Ce sont bel et bien ces entreprises qui devront mener les travaux de fermeture et de restauration des sites de forage après avoir fait approuver leur plan par le gouvernement du Québec, a-t-il ajouté. « Le gouvernement n’est pas responsable de la fermeture, mais on va les accompagner pour s’assurer que ce sera bien fait », a souligné le ministre.

Jonatan Julien a du même coup promis que « les évaluations des coûts seront rendues publiques au fur et à mesure qu’elles seront disponibles », tout comme l’avancement des travaux. Selon lui, la facture pour les contribuables ne devrait pas dépasser 33 millions de dollars, puisque Québec déboursera 75 % du total, qu’on estime à 43 millions.

À cela s’ajoutent toutefois des compensations financières qui seront versées aux entreprises qui renoncent à leurs permis d’exploration : elles sont évaluées par le gouvernement Legault à 100 millions de dollars.

Une fausse transparence, dénoncent QS et le PQ

 

Pour le Parti québécois et Québec solidaire, le fait de ne pas dévoiler le nom des entreprises responsables, l’évaluation des coûts pour chaque puits et les travaux à effectuer témoigne du manque de transparence du gouvernement dans ce dossier.

« La transparence était au cœur du projet de loi, et pourtant, le document qui vous a été envoyé est caviardé. Je ne comprends pas », a laissé tomber la députée solidaire Manon Massé en entrevue au Devoir. « Cependant, non seulement les informations doivent être rendues publiques, mais il faut s’assurer de ne verser aucune compensation tant que les inspections ne sont pas complétées, après la restauration du site. »

Même son de cloche du côté du député péquiste Sylvain Gaudreault. « La transparence promise n’est pas au rendez-vous. Pour les citoyens qui vivent près des puits, ça peut être inquiétant, mais aussi pour les municipalités qui veulent en finir avec ces puits sur leur territoire », fait-il valoir.

Dans le cadre de l’étude du projet de loi qui a mis un terme à l’exploration pétrolière et gazière, plus tôt cette année, les représentants du monde municipal ont d’ailleurs exigé du gouvernement qu’il agisse rapidement afin que les puits soient fermés. Québec promet que ce sera chose faite dans un horizon de 12 à 48 mois.

Quelque 775 puits déjà abandonnés

Sylvain Gaudreault souligne par ailleurs qu’il était essentiel de fermer la porte à l’industrie et d’imposer la restauration des 62 puits aux entreprises responsables avant que celles-ci n’existent plus ou qu’elles se défilent.

On compte déjà 775 puits abandonnés au Québec, dont 534 qui ont été localisés et 95 qui nécessitent des « travaux » pour permettre de stopper des fuites de gaz ou de pétrole. Alors que certains puits fuient depuis plusieurs années, les travaux de décontamination et de fermeture tardent cependant à se concrétiser.

Combien coûteront les travaux pour les 95 puits abandonnés problématiques ? Il est impossible, à l’heure actuelle, d’obtenir une évaluation précise des coûts. Pour le moment, les 30 puits pour lesquels Québec a inscrit une estimation des coûts conduisent à une facture totale de 54 millions de dollars, dans laquelle les travaux concertant 16 puits sont évalués à plus d’un million de dollars chacun. Il s’agit toutefois de moins du tiers des puits officiellement à la charge de l’État.

Avec François Carabin



À voir en vidéo