La Ville de Québec refuse d’alléger la norme sur le nickel dans l’air

La ville de Québec le soir.
Getty Images iStockphoto La ville de Québec le soir.

La mairie de Québec a tranché : elle s’oppose à l’allégement de la norme sur le nickel dans l’air proposé par le gouvernement du Québec. L’air saturé de polluants de la basse-ville et l’incapacité d’y mesurer avec précision les taux de pollution ont motivé sa position.

« La soupe dans les quartiers centraux est déjà lourde, a expliqué Bruno Marchand vendredi, au lendemain d’une assemblée plénière d’une journée entière consacrée au nickel. Rehausser la norme [viendrait] ajouter aux contaminants dans l’air, qui sont déjà assez denses. »

Le maire a d’emblée écarté la possibilité que la Ville devienne responsable de la norme, comme c’est le cas à Montréal. M. Marchand entend plutôt « collaborer avec le ministère de l’Environnement » pour assainir l’air de Québec, particulièrement de la basse-ville.

Le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) avait annoncé, au printemps, son intention de quintupler la norme quotidienne du taux de nickel permis dans l’air, soit de la faire passer de 14 ng/m3 à 70 ng/m3. Dans la basse-ville, qui est soumise aux émissions du Port de Québec, de l’incinérateur à déchets et d’autres industries, le projet a soulevé une levée de boucliers.

Les inégalités sociales ont aussi pesé dans la prise de position de l’administration. Les résidents de la basse-ville voient en effet leur espérance de vie raccourcie de six ans par rapport à ceux des quartiers juchés dans les hauteurs, tant sociales que géographiques, de Québec, selon Marie-Josée Asselin, responsable des dossiers environnementaux au comité exécutif. « Le principe de précaution doit s’appliquer dans ce contexte-là », a-t-elle souligné.

Le gouvernement interpellé

 

C’est la première fois que l’Hôtel de Ville adopte une position aussi revendicatrice par rapport à la qualité de l’air dans Limoilou. L’ancienne administration avait essuyé de nombreux reproches de la part des citoyens en refusant de prendre position contre les activités polluantes du Port de Québec, notamment.

Sans remettre en question le sérieux des études soumises par le MELCC pour justifier l’allégement de la norme, Bruno Marchand a admis que les outils servant à mesurer les taux de polluants selon leur source manquaient.

Pour Marie-Josée Asselin, l’assemblée plénière a mis au jour les lacunes dans la façon de contrôler la qualité de l’air dans les quartiers centraux. L’exercice, selon elle, a éclairé « notre incapacité à avoir des données plus précises, plus fines, qui nous permettraient de bien améliorer les choses ».

Le maire Marchand demande d’ailleurs des mesures plus fréquentes et précises. « On veut avoir plus de stations de mesure pour évaluer l’ensemble des contaminants. Des stations où on pourra faire des analyses plus fréquentes et sur un territoire beaucoup plus grand. […] Il faut mesurer, identifier [les contaminants], et ensuite punir les contrevenants. Il faut faire respecter la limite, peu importe le chiffre. Avec des punitions qui sont sévères et qui obligent les entreprises à agir différemment. »

L’opposition officielle a exigé des résultats rapides à ce chapitre. « Ça presse que le ministère de l’Environnement fasse son travail et descende en basse-ville pour voir ce qui se passe », a affirmé Claude Villeneuve, le chef de l’opposition de l’Hôtel de Ville.

Les personnes réunies autour de la Table citoyenne Littoral Est ont salué la « voix unanime » du conseil municipal dans le dossier du nickel. L’organisme appelle maintenant le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, « à travailler avec la Ville de Québec au bénéfice de la santé humaine et de la qualité de l’environnement, et non l’inverse ».

Le ministre Charette a dit « prendre acte » de la décision de M. Marchand, vendredi. Son attachée de presse, Rosalie Tremblay-Cloutier, souligne que « la Ville de Québec ne conteste pas la validité scientifique » de la démarche du ministère qui a mené à la proposition de cette nouvelle norme, qui « est fondée sur les plus hauts standards scientifiques, contrairement à la précédente ». Les consultations sur la norme se termineront le 20 février. D’ici là, « les discussions avec la Ville vont se poursuivre », indique-t-on.

Avec Isabelle Porter



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