Longueuil ira de l’avant avec l’abattage des cerfs
La mairesse de Longueuil, Catherine Fournier, entend toujours aller de l’avant avec le projet d’abattage de cerfs au parc Michel-Chartrand malgré sa rencontre, mardi matin, avec des défenseurs des animaux, parmi lesquels l’avocate Me Anne-France Goldwater. La Ville de Longueuil vient d’ailleurs d’obtenir le certificat de bons soins du comité d’éthique de l’Université de Montréal, une des conditions requises pour procéder à l’opération.
« Je pense qu’il y avait une volonté qu’on mette sur pause le processus, mais ce n’est pas possible. On est vraiment à un point de non-retour en ce qui a trait à l’équilibre écologique du parc Michel-Chartrand », a expliqué la mairesse Fournier au Devoir.
Accompagnée du vice-président du comité exécutif, Jonathan Tabarah, et de représentants de la Table de concertation sur l’équilibre écologique du parc Michel-Chartrand, Catherine Fournier a rencontré virtuellement plusieurs opposants à l’abattage des cerfs, dont Me Goldwater, Eric Dussault, directeur général de l’organisme Sauvetage Animal Rescue, ainsi que deux citoyennes de Longueuil.
« Même si on a des positions qui ne sont pas les mêmes, je crois que c’est intéressant de pouvoir se les exposer respectivement, a indiqué Mme Fournier. J’ai toujours été ouverte à rencontrer quiconque était préoccupé par cette question. »
La mairesse a dit exclure la possibilité de créer un « zoo » à l’intérieur du parc pour protéger les cerfs, tel que l’a suggéré à l’automne Eric Dussault. « On ne peut pas commencer à créer des zoos un peu partout à travers le Québec parce qu’il y a une surpopulation de cerfs. C’est malheureux. C’est une situation qu’on a laissée se dégrader notamment dans le parc Michel-Chartrand. C’est pour ça que ça prend une solution plus radicale à ce point-ci, mais c’est dans le but justement de pouvoir l’éviter dans le futur. »
Elle a cependant indiqué à ses interlocuteurs être disposée à discuter avec eux de solutions pour contrôler la population de cerfs à l’avenir, évoquant notamment la stérilisation des animaux.
Cela dit, la Ville compte mener une opération de capture et d’euthanasie d’au moins une soixantaine de cerfs d’ici la fin du mois de février. Auparavant, elle devra mener une opération de dénombrement des cervidés. « Le dernier dénombrement en avait répertorié 70, mais on pense qu’il pourrait y en avoir une centaine ». Rappelons que le rapport de la Table de concertation avait indiqué que compte tenu de la capacité du parc Michel-Chartrand, il faudrait limiter la population de cerfs à entre 10 et 15 individus.
La Ville vient tout juste d’obtenir le certificat de bons soins du comité d’éthique de l’Université de Montréal, une étape nécessaire pour obtenir le permis d’abattage auprès du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs. La Ville est d’ailleurs en discussions avec une entreprise qui pourrait procéder à l’opération. « Il n’y a pas beaucoup d’entreprises qui font ça au Québec et il va y avoir des enjeux de confidentialité parce qu’avec les menaces qui ont cours, c’est certain que ça rend les entreprises très frileuses », a expliqué la mairesse.
Relocaliser les cerfs
Jointe par Le Devoir, Me Anne-France Goldwater s’étonne que la mairesse Fournier affirme publiquement l’intention de son administration d’aller de l’avant avec l’euthanasie de la majorité des cerfs au parc Michel-Chartrand. L’avocate soutient que lors de la rencontre, la mairesse disait que la décision de la Ville n’était pas arrêtée. « À la fin de la rencontre, qui a duré 55 minutes [on a convenu] qu’on était pour continuer les discussions », a précisé Me Goldwater.
Le groupe de Me Goldwater a proposé plusieurs scénarios, dont la relocalisation des cerfs aux frais de Sauvetage Animal Rescue. Il a également suggéré — si l’option de relocalisation était rejetée — l’aménagement d’un enclos dans le parc pour rassembler les cerfs qui seraient stérilisés, nourris et soignés pendant 10 ans. « On va faire la gestion animalière sur le site pendant 10 ans sans frais [pour la Ville], a assuré l’avocate. Nous proposons un vrai plan de gestion avec lequel on va traiter tout le cheptel contre les parasites. »
Me Goldwater soutient que le plan de la Ville d’euthanasier les cerfs coûtera aux contribuables longueuillois 4333 $ par animal. Selon elle, il n’y a pas d’urgence pour la Ville d’agir en plein cœur de l’hiver. « Quand on parle de danger, peut-on se restreindre à la situation des hôpitaux ? Ça, c’est un danger. »
L’avocate n’écarte pas la possibilité de s’adresser aux tribunaux pour empêcher l’abattage des cervidés, même si elle préférerait parvenir à une entente avec la Ville. « On est en train de massacrer les animaux de la planète, toutes espèces confondues, mais certains réussissent à cohabiter avec nous et on veut les assassiner aussi ? » demande-t-elle.
Viande récupérée
Catherine Fournier n’a pas voulu commenter la possibilité de procédures judiciaires. « On est très solides sur le plan légal. On ne pense pas qu’il y a matière à contestation », a-t-elle dit.
Selon les plans de la Ville, la viande des cerfs euthanasiés sera remise à des banques alimentaires. Une entente a d’ailleurs été conclue avec l’École d’hôtellerie de la Montérégie qui va se charger de préparer la viande qui sera confiée à Moisson Rive-Sud qui en fera la distribution à des organismes de Longueuil.