Naturel ou artificiel, quel sapin est le plus vert?
Lorsque le roi des forêts est appelé à devenir le roi du salon, une épineuse question préoccupe les consciencieux. Lequel des arbres de Noël est le plus écologique entre le naturel et l’artificiel ? Quelques pistes pour ne pas se faire passer un sapin.
La meilleure option est la plus simple : couper soi-même son arbre dans une forêt près de chez soi. Mais les boisés libre-service ne courent pas les rues. Dès qu’un arbre est acheté, il faut alors analyser tout le cycle de vie du produit pour trouver une réponse, explique la spécialiste en consommation responsable Myriam Ertz.
« Les gens se disent que le [sapin] naturel, c’est forcément mieux. Ou alors que l’artificiel, c’est mieux parce que ça dure plus longtemps. C’est pour ça qu’il est important de faire une analyse du cycle de vie. Ça va déterminer, quantifier de manière précise laquelle des deux options est la meilleure », dit Mme Ertz.
Toutes les sources de pollution sont ainsi prises en compte, de l’extraction des matières premières jusqu’à l’abandon au dépotoir. « Il faut savoir qu’il y a au moins quinze types d’impacts. Ça va de l’acidification des terres à la toxicité pour l’humain en passant par l’émission de gaz à effet de serre », précise la professeure à l’UQAC.
À ce compte, le sapin naturel remporte la palme du choix le plus écologique, selon l’analyse du cabinet-conseil en développement durable Ellipsos. Pour arriver à ce résultat, les chercheurs ont comparé la pollution générée par un arbre naturel utilisé une seule fois avec celle générée par un sapin artificiel utilisé six ans de suite. « La durée moyenne durant laquelle est conservé un sapin artificiel en Amérique du Nord est de six ans », stipule l’étude publiée en 2009.
Le cabinet-conseil québécois souligne que ceux qui préfèrent les arbres artificiels peuvent avoir bonne conscience en prolongeant la durée de vie de leur sapin. « Le seuil au-delà duquel l’arbre artificiel devient une meilleure option pour son impact sur les changements climatiques est de 20 ans », évaluait le cabinet Ellipsos.
D’autres études abondent dans le même sens. Une analyse datée de 2018 et publiée pour le compte de l’Association américaine de l’arbre de Noël avance que la durée de vie utile du sapin artificiel est cruciale d’un point de vue écologique. « L’arbre artificiel acheté et utilisé durant au moins 4,7 ans engendre moins d’impacts environnementaux que 4,7 vrais arbres de Noël achetés durant 4,7 ans », conclut-on.
Un examen de la question réalisé par la firme PE Americas arrive à la même conclusion : le sapin artificiel est plus écologique que son pendant naturel après 5 ans de vie utile.
Des billots bios
Plusieurs astuces permettent d’atténuer l’empreinte écologique de son arbre, peu importe sa nature.
Pour les amateurs de sapins synthétiques, évitez surtout les arbres faits de PVC, « le plus méchant des plastiques », conseille la Fondation David Suzuki.
Ceux qui préfèrent le naturel doivent veiller à bien s’en départir une fois janvier venu. La majorité des municipalités québécoises organisent un ramassage de sapins naturels après la période des Fêtes. Les arbres peuvent être transformés, notamment en paillis, servir à la fabrication d’huile naturelle ou être envoyés au compostage.
Pour les sapins artificiels, la meilleure avenue pour s’en débarrasser consiste à donner au suivant. « D’après les recherches, on a trouvé que pas plus de 9 % des plastiques sont recyclés à l’échelle du Canada, souligne Mme Ertz. Quasiment la majorité des plastiques sont incinérés ou se retrouvent dans les décharges publiques. Ça crée de la pollution. »
Puisque le transport en voiture des sapins naturels constitue leur « principale source d’impacts » sur l’environnement, selon la firme Ellipsos, l’autocueillette offerte dans certaines sapinières permet de réduire la pollution liée à sa distribution.
On peut également dénicher des producteurs de sapins biologiques, mais leur nombre se compte sur les doigts d’une main au Québec. « Avant, le bio était plus pour tout ce qui est comestible. Mais là, l’ornemental a aussi une certification biologique », observe la productrice de sapins et vice-présidente pour l’Association des producteurs d’arbres de Noël du Québec, Émilie Turcotte. Bien qu’elle penche du côté des sapins aux vraies épines, elle souligne que le consommateur doit réfléchir à d’autres aspects que celui de l’impact environnemental dans sa décision. « La culture des sapins, ça fait vivre des villages en entier. On occupe le territoire. »
Le Canada a exporté pour près de 50 millions de dollars d’arbres de Noël naturels en 2017, selon les plus récentes données de Statistique Canada. A contrario, les Canadiens ont dépensé cette même année près de 60 millions de dollars pour se procurer des sapins artificiels. Presque tous ces faux conifères proviennent de Chine.
Myriam Ertz remarque d’ailleurs que les impacts environnementaux du sapin de Noël ne pèsent pas bien lourd dans la frénésie de consommation des Fêtes. « C’est sûr qu’il y a le sapin, mais il y a aussi la nourriture. Est-ce que c’est bio ? Est-ce que c’est local ? Il y a le type de cadeaux qu’on offre. Il y a des gens qui sont à l’aise d’offrir des cadeaux de seconde main, par exemple. Il y a beaucoup de choses à considérer si on veut vraiment être responsables dans tout ce que l’on fait. »