Québec officialise par décret le rejet de GNL

Le gouvernement du Québec a publié mercredi le décret qui officialise le rejet de l’usine gazière GNL Québec, un document qui souligne qu’il est impossible de démontrer les bénéfices climatiques du projet, son acceptabilité sociale ou l’absence de menace directe pour la survie des bélugas du Saint-Laurent. Les promoteurs disent maintenant vouloir analyser les « prochaines étapes » pour leur projet, qui est toujours en cours d’évaluation fédérale.
Le décret publié mercredi dans la Gazette officielle, mais daté du 21 juillet, confirme le « refus » du gouvernement Legault de « délivrer une autorisation à GNL Québec inc. pour le projet Énergie Saguenay de construction d’un complexe de liquéfaction de gaz naturel sur le territoire de la ville de Saguenay ».
Pour en arriver à cette conclusion, le gouvernement s’appuie notamment sur les conclusions du rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), qui s’était montré très critique envers le projet de liquéfaction et d’exportation par navires de gaz naturel exploité principalement par fracturation en Alberta.
Le gouvernement Legault prend également acte du « rapport d’analyse environnementale » produit par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC). Ce rapport, rappelle le décret, souligne qu’il n’est pas possible « de conclure à l’acceptabilité environnementale du projet en raison des enjeux pour lesquels une grande part d’incertitudes subsiste […] ».
Ces incertitudes concernent « l’effet que le projet pourrait avoir sur les efforts requis pour atteindre la cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Québec pour 2030 et pour atteindre la carboneutralité en 2050, son effet réel sur le bilan mondial des gaz à effet de serre et sur la transition énergétique, le bilan des avantages et des coûts du projet, l’acceptabilité sociale du projet et l’effet de la navigation sur la population du béluga de l’estuaire du Saint-Laurent, qui est une espèce faunique menacée désignée en vertu de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables ».
Rapport d’experts
Le rapport produit par les experts du MELCC souligne en effet que le projet pourrait nuire à la transition énergétique. Il précise aussi que l’exportation du gaz naturel liquéfié, par navire, aurait pour effet de « pratiquement doubler la navigation dans le fjord du Saguenay ». Or, cela pourrait nuire au béluga du Saint-Laurent. « De l’avis des experts, l’augmentation de la navigation affectera son rétablissement et pourrait même provoquer une diminution de la population », peut-on lire dans le rapport de 97 pages.
Qui plus est, l’équipe d’analyse du MELCC « n’est pas en mesure de se prononcer sur l’acceptabilité sociale » du projet « puisque l’important clivage social observé lors de l’audience publique [du BAPE] reste entier ».
Enfin, le ministère a remis en question, dans son rapport, l’attribution d’un bloc d’hydroélectricité à GNL Québec. « N’étant plus en situation de surplus d’électricité, ce bloc d’énergie propre ne serait plus disponible, advenant l’autorisation du projet, pour des projets répondants à des besoins plus stratégiques » pour l’atteinte des cibles de réductions des émissions de gaz à effet de serre.
« Analyse » à venir chez GNL Québec
Maintenant que le décret du gouvernement du Québec est publié, qu’est-ce que GNL Québec entend faire ? « Nous prenons connaissance ce matin du décret publié. Nous allons transmettre l’information à notre conseil d’administration, qui en tiendra compte dans son analyse des prochaines étapes », a répondu l’entreprise par courriel.
GNL Québec n’a pas précisé si elle souhaite poursuivre le processus fédéral d’évaluation environnementale du projet. Ce processus, mené par l’Agence d’évaluation d’impact du Canada, ne peut être stoppé qu’à la demande du promoteur du projet d’usine et de terminal maritime. Sur le site officiel de l’agence fédérale, l’évaluation est toujours inscrite comme étant « en cours ».
L’entreprise Gazoduq, contrôlée par les mêmes actionnaires américains, n’a pas non plus précisé si elle entend poursuivre le processus d’évaluation environnementale en cours, qui est mené conjointement par le gouvernement du Québec et celui du Canada. Dans le cas du projet de gazoduc de 780 km traversant le pays, la décision définitive appartient uniquement au gouvernement fédéral puisqu’il s’agit d’une installation interprovinciale. Sans le projet d’usine, il serait toutefois inutile de construire cette conduite.
« L’entreprise suivra de près les décisions qui seront prises par GNL Québec pour la suite des choses de son côté. Cela permettra de préciser du même coup l’avenir du projet Gazoduq », a indiqué mercredi Gazoduq, dans une réponse écrite.