Les émissions de gaz à effet de serre du Québec toujours en hausse

Les émissions de gaz à effet de serre du Québec ont encore une fois augmenté, selon le plus récent bilan publié lundi par le gouvernement fédéral, soit celui de 2019. Le secteur des transports constitue le poids lourd de ce bilan, qui nous éloigne un peu plus de nos objectifs de lutte contre la crise climatique. Les émissions canadiennes continuent elles aussi d’augmenter, essentiellement à cause du transport et de l’industrie des énergies fossiles.
Selon ce qu’on peut lire dans le bilan canadien déposé à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, les émissions de gaz à effet de serre (GES) du Québec atteignaient 83,7 millions de tonnes (Mt) en 2019. Elles étaient ainsi en hausse par rapport à 2018 (82,5 Mt), à 2017 (81,2 Mt) et à 2016 (79 Mt).
Ce bilan produit par le gouvernement fédéral, qui devance de quelques mois celui que le gouvernement du Québec devrait publier à l’automne prochain, permet aussi de constater que les émissions de GES de la province ont reculé d’à peine 3,1 % depuis 1990. À titre de comparaison, l’objectif qui avait été fixé pour la fin de 2020 prévoyait un recul de 20 % par rapport à 1990. Le gouvernement Legault a toutefois admis que celui-ci était inatteignable, tout en promettant d’atteindre une cible de réduction de 37,5 % d’ici 2030, par rapport à 1990.
Transport routier polluant
Les données sur les émissions de GES démontrent sans surprise que le secteur des transports est le poids lourd du bilan québécois, avec 36,5 Mt en 2019. De ce nombre, 29 Mt proviennent du « transport routier », un secteur dont les émissions ont augmenté de 60 % depuis 1990.
Le secteur des « camions légers », qui comprend les véhicules utilitaires sports (VUS), a aussi vu ses émissions de GES bondir de 155 % au cours de la même période. Selon les données du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, le nombre de « camions légers » sur les routes de la province a bondi de plus de 260 % depuis 1990.
Au moment de dévoiler les détails de son Plan pour une économie verte, en novembre dernier, Québec avait toutefois fermé la porte à toute taxation qui ciblerait les véhicules les plus polluants, une mesure pourtant réclamée par certains experts. La semaine dernière, le ministre de l’Environnement Benoit Charette a également rejeté l’idée d’imposer des restrictions sur la publicité de ces véhicules.
En ce qui a trait au transport lourd, ce nouveau bilan démontre également une hausse continue depuis 1990, et ce, tant pour les véhicules à essence que ceux fonctionnant au diesel. En plus de certains secteurs ayant connu une hausse des émissions au cours des dernières années, d’autres ont vu leurs émissions connaître une relative stagnation. C’est le cas pour le secteur agricole et celui de la gestion des déchets.
Pour le porte-parole de Greenpeace, Patrick Bonin, l’échec climatique des dernières années risque de se répéter avec le plan climat du gouvernement Legault, « qui ne permet d’atteindre que 42 % de la cible du Québec pour 2030 ». Selon lui, Québec doit « mettre en place de véritables mesures d’écofiscalité et des mesures plus contraignantes pour les grands pollueurs et le secteur des transports, en particulier pour les camions lourds et légers ».
Le gouvernement Legault se dit pour sa part convaincu de parvenir à « inverser » la tendance observée ces dernières années. « Nous avons identifié et chiffré 42 % des efforts pour atteindre notre cible [de réduction de GES pour 2030]. Il sera mis à jour chaque année afin d’identifier d’autres réductions des GES. Nous sommes donc persuadés d’inverser cette tendance à la hausse », répond le cabinet du ministre Benoit Charette. Québec dit d’ailleurs vouloir concentrer ses efforts sur le secteur des transports au cours des prochaines années.
Hausse au Canada
Le bilan publié lundi par Ottawa démontre par ailleurs que les émissions de GES ont augmenté en 2019 au Canada, pour atteindre 730 Mt, soit une hausse d’un million de tonnes par rapport à 2018. Les émissions ont augmenté à chaque année entre 2016 et 2019.
Cette hausse des émissions est principalement imputable au secteur des transports et à l’industrie des énergies fossiles. Depuis 2005, le « transport routier » a vu ses émissions passer de 130 Mt à 153 Mt. Les émissions du secteur de l’« extraction de pétrole et de gaz » sont passées de 63 Mt à 105 Mt au cours de la même période. Ce bond de 42 Mt « s’explique par une hausse de 200 % de l’extraction de bitume et de pétrole brut synthétique des sables bitumineux canadiens depuis 2005 », souligne le résumé des données publié par le gouvernement Trudeau.
Qui plus est, les émissions du pays ont reculé d’à peine 1,2 % depuis 2005, année de référence utilisée par le gouvernement fédéral pour fixer ses cibles de réduction des GES. Selon la cible actuelle, établie sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper, le gouvernement espère réduire d’au moins 30 % les émissions du pays d’ici 2030, par rapport à 2005.
Dans le cadre du projet de loi C-12, qui doit permettre de placer le Canada sur la voie de la « carboneutralité » d’ici 2050, le gouvernement Trudeau a toutefois promis de présenter une cible plus ambitieuse au cours des prochains mois. À compter de 2030 et jusqu’en 2045, les cibles devraient également être révisées tous les cinq ans en tenant compte des « meilleures données scientifiques disponibles et des engagements internationaux du Canada par rapport aux changements climatiques ». Chaque nouvelle cible quinquennale devra être accompagnée d’un plan précis pour l’atteindre.
Selon les « modélisations » actuelles du fédéral, « le Canada peut viser à atteindre des émissions de l’ordre de 32 % à 40 % sous les niveaux de 2005 » d’ici 2030 et le gouvernement du Canada s’est engagé à fournir sa « Contribution déterminée au niveau national » avant la 26e Conférence des Parties (COP26), prévue l’automne prochain à Glasgow, en Écosse. Cela signifie que le gouvernement fédéral devrait déposer une nouvelle cible de réduction des GES au cours des prochains mois.
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