Une baleine à bosse près de Trois-Rivières

Phénomène sans précédent connu dans le Saint-Laurent : une baleine à bosse a remonté le cours du fleuve et se trouverait maintenant dans le secteur de Trois-Rivières. Une situation qui représente un risque pour ce cétacé, qui ne se retrouve normalement pas en amont de Tadoussac. Les experts demandent donc aux citoyens de garder leurs distances.

La baleine à bosse a d’abord été vue dans le secteur de Québec mardi, où elle a été photographiée près du pont Pierre-Laporte. Elle a ensuite été revue mercredi en fin de journée dans le secteur de Portneuf. Elle aurait même effectué alors des sauts hors de l’eau, un comportement fréquemment observé pour cette espèce, qui est aussi connue pour exhiber systématiquement sa nageoire caudale en plongeant.

Jeudi matin, l’animal a de nouveau été aperçu, mais encore plus en amont dans la portion fluviale du Saint-Laurent, soit dans le secteur de Deschaillons-sur-Saint-Laurent et Saint-Pierre-les-Becquets.

« L’animal ne semble pas blessé et il nage à une bonne vitesse, si on se fie aux distances parcourues au cours des dernières heures », explique Marie-Ève Muller, responsable des communications au Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM).

Vers une intervention ?

Pour le moment, le matériel visuel qui a été transmis aux spécialistes des cétacés ne permet pas de déterminer s’il s’agit d’un adulte ou d’un jeune animal. Il n’est pas possible non plus de déterminer si l’animal serait blessé ou amaigri, indique Mme Muller.

Photo: Alexandre Shields Le Devoir Si vous observez la baleine à bosse qui nage présentement dans le fleuve, voici ce que vous risquez d'apercevoir.

Le GREMM, mais aussi Pêches et Océans Canada, tente donc d’obtenir davantage d’information, afin de déterminer notamment si une « intervention » serait nécessaire ou possible. « Si vous êtes près du fleuve, gardez l’œil ouvert. Signalez sans tarder le 1-877-722-5346 si vous voyez l’animal, ou toute autre baleine dans un secteur inhabituel. »

En règle générale, rappelle Marie-Ève Muller, « la meilleure solution est de laisser la nature suivre son cours », en souhaitant que l’animal rebrousse chemin et retourne vers l’estuaire. De toute façon, il serait impossible de déplacer cet animal. La baleine à bosse, une espèce commune dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent, peut mesurer environ 15 mètres à l’âge adulte, pour un poids de 30 à 40 tonnes.

Mme Muller explique aussi qu’il est primordial de ne pas déranger cette baleine à bosse. Pour cela, les plaisanciers doivent garder une distance minimale de 100 mètres, comme le prévoit la réglementation fédérale. Le Règlement sur les mammifères marins du gouvernement fédéral est également très clair : « Il est interdit de perturber un mammifère marin. » Cela signifie qu’un bateau ne doit pas s’approcher de l’animal ni lui barrer la route. Il est également interdit de nager ou d’interagir avec une baleine.

Cas inusités

 

Si la présence d’une baleine à bosse dans la portion fluviale du Saint-Laurent est une première, il existe d’autres cas où des mammifères marins ont été aperçus en dehors de leur habitat. En 2012, un béluga avait été aperçu à plusieurs reprises dans le secteur de Montréal, et notamment dans le Vieux-Port. Un petit rorqual, une autre espèce fréquemment observée dans l’estuaire et le golfe, a déjà été retrouvé échoué à Lévis.

Au fil des ans, plusieurs signalements de phoques ont également été rapportés au Réseau québécois d’urgence pour les mammifères marins concernant des phoques en dehors de leur habitat. Parmi ceux-ci, on compte de jeunes phoques à capuchon, appelés « dos bleus », qui se trouvaient dans la région de Montréal, notamment sur l’île Sainte-Hélène. Une situation pour le moins inhabituelle, puisque cette espèce vit surtout dans les eaux autour de Terre-Neuve, voire dans l’Atlantique Nord. Dans un cas de « dos bleu » signalé à Longueuil, des passants avaient tenté de nourrir l’animal avec des croustilles, des hot-dogs et des frites. Le phoque a finalement dû être euthanasié.

Enfin, un narval a été aperçu à plusieurs reprises dans l’estuaire du Saint-Laurent depuis 2016, nageant au milieu de groupes de bélugas. Cette baleine à dents, surnommée « licorne des mers » et dont la taille peut être similaire à celle du béluga, vit en petits groupes dans les eaux de l’Arctique canadien, ou encore au large du Groenland.

À l’inverse, des mammifères marins du Saint-Laurent peuvent eux aussi se retrouver loin de leur habitat naturel. C’est le cas parfois de bélugas. En juin 2017, un béluga qui avait quitté l’estuaire avait été retrouvé nageant dans une rivière du Nouveau-Brunswick. Dans le cadre d’une opération sans précédent, il avait été ramené au Québec par avion. Mais en 2018, il a été revu, cette fois au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse.

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