La CAQ peut-elle vraiment tenir ses promesses vertes?

François Legault s’est engagé à réduire la consommation de produits pétroliers des Québécois de 40% d’ici 2030.
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir François Legault s’est engagé à réduire la consommation de produits pétroliers des Québécois de 40% d’ici 2030.

Le gouvernement Legault a profité de son congrès, sur le thème « Pour une économie verte », pour prendre plusieurs engagements en matière de protection de l’environnement. L’atteinte de ces objectifs passera toutefois par la mise en oeuvre de mesures ambitieuses, voire d’un changement de culture.

Peut-on se libérer du pétrole ?

Reprenant un objectif déjà inscrit dans la « Politique énergétique 2030 » rédigée par le gouvernement libéral et dévoilée en avril 2016, François Legault s’est engagé à réduire notre consommation de produits pétroliers de 40 % d’ici 2030.

Pour y parvenir, le gouvernement veut accélérer l’électrification des transports, des industries et des bâtiments. Puisque ces trois secteurs comptent pour plus de 80 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de la province, leur électrification favoriserait l’atteinte de l’objectif ambitieux de réduire les GES de 37,5 % d’ici 2030, par rapport à 1990.

À lire aussi

«L’urgence pragmatique», la chronique de Michel David

Dans le domaine des transports, qui compte pour 43 % du bilan de GES, la route sera toutefois longue. À l’heure actuelle, le Québec compte environ 45 000 voitures électriques, sur un parc de plus de cinq millions de véhicules.

Le cabinet du ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles assure que le gouvernement continuera de soutenir financièrement les consommateurs qui font le choix des véhicules électriques, mais aussi « l’installation de bornes de recharge ». Selon les données fournies par Hydro-Québec, on prévoit que 2500 bornes seront en fonction dans la province d’ici la fin de 2020.

Pour Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal, le principal défi pour la réduction de notre dépendance au pétrole se trouve dans le secteur des transports. « Pour le transport des personnes, en favorisant le transport actif, le covoiturage, le transport en commun et, en dernier lieu, les véhicules personnels à faibles émissions, on pourrait réaliser des gains de l’ordre de 40 % sans problème. »

« Le défi est de changer les habitudes », ajoute-t-il. « L’attachement des Québécois envers leur VUS est grandissant. Les électeurs sont aussi allergiques à l’idée d’une tarification de la route. Cela rend extrêmement difficile de mettre les « bâtons » nécessaires à l’auto solo pour la limiter et pour générer les fonds nécessaires pour investir dans les alternatives. »

Le Québec peut-il devenir la « batterie verte » de ses voisins d’Amérique du Nord ?

Le premier ministre a répété que le Québec « peut aider ses voisins » à réduire leurs émissions de GES en utilisant son potentiel hydroélectrique.

Pour exporter davantage, Pierre-Olivier Pineau souligne qu’il faudrait développer des projets de « production » ou alors « de grands projets d’efficacité énergétique ».

Ces derniers permettraient d’ailleurs au Québec de doubler ses exportations « sans aucun nouveau projet de production, sans perdre en qualité de vie et sans perdre d’argent à cause des économies d’énergie ».

M. Pineau et le spécialiste du secteur énergétique Normand Mousseau estiment par ailleurs que le Québec pourrait aussi devenir la « batterie verte » tant souhaitée par M. Legault.

Dans ce contexte, précise M. Pineau, les réservoirs d’Hydro-Québec joueraient en quelque sorte ce rôle de batterie qui permettrait d’équilibrer la production d’énergie accrue à partir d’éoliennes ou de panneaux solaires dans les États du Nord-Est américain.

Selon M. Mousseau, le fait d’offrir ce type d’énergie « complémentaire » pourrait d’ailleurs favoriser le développement des énergies renouvelables chez nos voisins.

Se dirige-t-on vers la fin du plastique à usage unique ?

Les militants caquistes ont donné le mandat à leur parti de proposer la mise en oeuvre d’« un plan de retrait du plastique à usage unique ». La résolution rappelle notamment que « les Québécois utilisent en moyenne 2,5 sacs de plastique par semaine, soit 130 sacs par an ».

Montréal a déjà annoncé un tel plan de retrait. Mais le fait que le gouvernement du Québec envoie le signal qu’il entend agir pourrait accélérer l’adoption de mesures dans plusieurs villes, selon la directrice générale par intérim d’Équiterre, Colleen Thorpe.

Selon elle, il faudrait toutefois inciter les commerces à « favoriser davantage l’utilisation des sacs réutilisables », en s’assurant que les sacs à usage unique coûtent plus cher, mais aussi « que les consommateurs qui font les bons choix soient récompensés ».

Le Québec peut-il rattraper l’imposant retard dans la protection des milieux naturels ?

Le gouvernement s’est engagé à atteindre les objectifs « fixés dans les accords internationaux auxquels le Québec a adhéré », en matière de protection des milieux naturels.

Concrètement, cela signifie qu’il faudra concrétiser une bonification historique de la protection des milieux marins. À l’heure actuelle, à peine 1,9 % de la portion québécoise du Saint-Laurent est désignée comme aire protégée, alors que l’objectif est d’atteindre un taux de 10 % d’ici la fin de 2020.

Dans le cas des écosystèmes terrestres, la cible a été fixée à 17 %, alors qu’environ 10 % du territoire est aujourd’hui protégé. Le ministère de l’Environnement dit travailler sur « plus de 100 projets d’aires protégées », mais sans préciser le nombre « précis » de projets, ni quelle est la superficie totale de ces projets.



À voir en vidéo