Le Canada se réchauffe deux fois plus vite que la planète

Photo: Jonathan Hayward La Presse canadienne Le brise-glace «Louis S. St-Laurent» à l’œuvre dans les eaux de la mer de Baffin

Le climat canadien se réchauffe deux fois plus rapidement que la moyenne mondiale, et tout le pays sera sévèrement bouleversé par les impacts de plus de plus significatifs de ce réchauffement au cours des prochaines décennies. C’est ce que conclut un rapport scientifique sans équivoque produit par Environnement Canada et publié lundi.

Ce volumineux Rapport sur le climat changeant du Canada précise d’entrée de jeu que le pays sera particulièrement touché par la hausse des températures imputable directement à l’activité humaine, et plus particulièrement à notre dépendance aux énergies fossiles.

« Le réchauffement passé et futur au Canada est, en moyenne, environ deux fois plus grand en ampleur que le réchauffement mondial. Le nord du Canada s’est réchauffé et continuera de se réchauffer à un rythme plus de deux fois supérieur au rythme mondial », soulignent ainsi les scientifiques qui ont rédigé cette analyse climatique détaillée.

Selon les données officielles, la température annuelle moyenne au Canada a déjà augmenté de 1,7 °C depuis 1948. La température annuelle moyenne dans l’ensemble du nord du pays a quant à elle augmenté de 2,3 °C depuis cette date. Mais le pire est à venir, précise le rapport. Les prévisions de la température annuelle moyenne à l’échelle du pays pour la fin du siècle (de 2081 à 2100) varient d’une augmentation de 1,8 °C, pour un scénario de faibles émissions, à 6,3 °C pour un scénario d’émissions élevées.

« Seul le scénario de faibles émissions permet de maintenir l’augmentation de la température moyenne mondiale à moins de 2 °C au-dessus des niveaux préindustriels, conformément à l’Accord de Paris. » Or, soulignent les auteurs, « ce scénario nécessite que les émissions mondiales plafonnent presque immédiatement, avec de rapides et importantes réductions par la suite ». Pour le moment, les engagements « volontaires » pris par les États signataires de l’Accord de Paris, y compris ceux du Canada, sont toutefois nettement insuffisants pour atteindre cet objectif.

Impacts majeurs

 

Le rapport d’Environnement et Changement climatique Canada, rédigé en collaboration avec des scientifiques universitaires, constate par ailleurs que les impacts tangibles du réchauffement sont déjà « évidents dans de nombreuses régions » et « il est prévu qu’ils s’intensifieront dans le futur ».

Ces effets se manifestent et se manifesteront sous plusieurs formes, dont une augmentation de la fréquence et de l’intensité des « températures extrêmement chaudes ». Cette nouvelle réalité inévitable « augmentera la sévérité des vagues de chaleur et contribuera à augmenter les risques de sécheresses et de feux de forêt ». Et même si les inondations à l’intérieur des terres résultent de multiples facteurs, « des précipitations plus intenses augmenteront le risque d’inondation en milieu urbain », prévient-on.

D’ailleurs, les précipitations annuelles et hivernales devraient « augmenter pour la majorité du Canada ». Déjà, les précipitations ont augmenté « dans de nombreuses régions du pays et on a assisté à un changement selon lequel les chutes de neige diminuent, alors que les chutes de pluie augmentent ». En même temps, Environnement Canada constate que « la disponibilité saisonnière de l’eau douce est en train de changer vers un risque accru de pénuries d’eau en été ».

Sous le coup du réchauffement planétaire, la fonte des glaces sera de plus en plus prononcée dans toutes les régions du pays d’ici 2100. C’est le cas des glaciers de toute la cordillère de l’Ouest, qui « perdront de 74 % à 96 % de leur volume d’ici la fin du siècle ». Comme cela a déjà été démontré, l’Arctique canadien sera en bonne partie libre de glaces pendant l’été « d’ici le milieu du siècle », tandis que de « grandes superficies » de pergélisol auront dégelé d’ici 2050. Cela devrait accroître les émissions de méthane, un gaz à effet de serre beaucoup plus puissant que le CO2.

L’augmentation continue des températures et la fonte des glaciers terrestres auront aussi pour effet d’augmenter substantiellement le niveau de la mer, avec des élévations pouvant varier entre 50 et 100 centimètres d’ici la fin du siècle dans l’est du Canada, et notamment le long des côtes du Québec. « Les inondations côtières devraient augmenter dans de nombreuses régions », prévient d’ailleurs Environnement Canada.

Non seulement les océans qui bordent le Canada deviendront davantage une menace pour certaines communautés côtières, mais ces mêmes océans continueront de se réchauffer et de s’acidifier. Le rapport, qui y consacre un chapitre, prédit que la « perte d’oxygène » continuera de s’intensifier, « alors que l’acidification des océans augmentera en réaction à des émissions supplémentaires de dioxyde de carbone. Ces changements menacent la santé des écosystèmes marins ».

« Ceci est un rappel alarmant de la nécessité d’agir. Nous pouvons, nous devons et nous le ferons. Le prix de la pollution au Canada, efficace dans tout le pays aujourd’hui, est un moyen d’agir et de protéger notre environnement », a réagi sur Twitter la ministre de l’Environnement, Catherine McKenna, au moment de la publication du rapport, lundi, alors que la taxe fédérale sur le carbone entrait en vigueur dans quatre provinces opposées à cette mesure.

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