Baleines noires: absence inquiétante de nouveaux-nés sur la côte atlantique

Après une année 2017 marquée par des mortalités records chez les baleines noires de l’Atlantique Nord, les scientifiques qui étudient l’espèce constatent un autre phénomène pour le moins inquiétant : aucun baleineau n’a jusqu’ici été observé cette année. Une situation inexpliquée et qui compromet encore davantage la survie de l’espèce.
Les femelles baleines noires donnent habituellement naissance à leur baleineau entre la fin de novembre et le début du mois de mars, essentiellement au large des côtes des États de la Géorgie et de la Floride.
Les chercheurs américains associés à l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA) effectuent donc des survols réguliers dans ces régions, afin de recenser les naissances au sein de cette espèce classée « en voie de disparition ». Puisqu’il subsiste seulement 100 femelles adultes dans cette population d’au plus 450 individus, chaque naissance compte.
Aucun baleineau
Or, les travaux des scientifiques n’ont pas permis de repérer un seul baleineau depuis le début de la saison des naissances, qui tire pourtant à sa fin. « Il s’agit du pire des scénarios », résume Barb Zoodsma, biologiste de la NOAA.
À titre de comparaison, 2017 était déjà perçue comme une très mauvaise année pour les naissances de baleines noires, avec un total de cinq baleineaux.
Au cours des dernières années, les données de la NOAA indiquent en effet que les nouveau-nés ont été plus nombreux, avec un total de 17 en 2015, 22 en 2013, 22 en 2011 ou encore 39 en 2009. Sur la période 2007-2017, la moyenne annuelle est de 18 baleineaux.
L’absence complète de nouveau-nés en 2018 est d’autant plus inquiétante, selon les spécialistes de l’espèce, que les baleines noires de l’Atlantique Nord ont connu des mortalités historiques l’an dernier. Pas moins de 17 baleines ont été retrouvées mortes, dont 12 dans les eaux du golfe du Saint-Laurent.
« Quand vous avez des mortalités élevées et zéro reproduction, c’est catastrophique », selon le directeur du Marine Mammal Center au Woods Hole Oceanographic Institution, Michael Moore.

Empêtrements
Il n’existe pas, pour le moment, d’explication unique pour ce phénomène. Mais certaines hypothèses pointent vers une baisse des ressources alimentaires dans les habitats fréquentés par l’espèce, le long de la côte Est américaine.
Selon les chercheurs du New England Aquarium, il est également possible, dans certains cas, que des femelles qui ont subi un empêtrement dans des engins de pêche ne soient pas en mesure de se reproduire, en raison des impacts importants sur leur condition physique.
Or, ces empêtrements sont très courants chez les baleines noires. Certaines de celles qui ont été retrouvées mortes dans le golfe du Saint-Laurent en 2017 portaient les marques de tels empêtrements. Près de 80 % des baleines noires adultes se retrouvent empêtrées au cours de leur existence.
En janvier, le ministre de Pêches et Océans Canada, Dominic LeBlanc, a d’ailleurs annoncé des mesures de gestion des pêches dans les eaux du Saint-Laurent, afin de réduire les risques pour les baleines noires.
Son collègue des Transports, Marc Garneau, n’a toutefois pas encore annoncé s’il imposera une limite de vitesse pour les navires dans le golfe en 2018, comme cela a été le cas l’an dernier.