Concert de critiques contre le projet de règlement sur les forages pétroliers

Le projet de règlement qui autorisera les forages pétroliers près de secteurs résidentiels, de garderies et d’aires protégées, mais aussi dans les lacs et les rivières, a suscité un concert de critiques jeudi. Le gouvernement Couillard a répondu qu’il sera à l’écoute des « commentaires » sur ce document, qui ne ferme pas la porte aux forages avec fracturation sous les zones habitées, a constaté Le Devoir.
Les partis d’opposition, mais aussi les groupes environnementaux, les syndicats et le monde municipal ont vivement dénoncé les projets de règlements élaborés par le gouvernement libéral, dans la foulée de l’adoption de la première Loi sur les hydrocarbures de l’histoire du Québec.
Le président de la Fédération québécoise des municipalités (FQM), Richard Lehoux, est convaincu que cette réglementation conduira à une « absence totale d’acceptabilité sociale » pour les projets pétroliers et gaziers.
Selon lui, les distances entre les forages et les secteurs résidentiels sont tout simplement « insuffisantes ». Le projet de règlement du gouvernement prévoit une distance minimale de 175 mètres entre les forages et les zones habitées, et de 275 mètres par rapport aux écoles, aux garderies et aux hôpitaux.
La FQM, qui représente plus de 900 municipalités, critique aussi la volonté des libéraux d’autoriser la fracturation. Et selon les précisions fournies au Devoir par le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, la future réglementation n’interdit pas les forages horizontaux sous les secteurs habités, les cours d’eau, les aires protégées et les parcs nationaux. Le projet précise seulement des distances séparatrices pour la tête des puits de forage.
Pour une « transition énergétique »
Dans une sortie publique commune jeudi, des groupes environnementaux et citoyens, mais aussi les grandes centrales syndicales, ont exigé rien de moins que le « retrait » pur et simple des projets de règlements, qui totalisent 269 pages de documents très techniques.
« Déjà que l’État québécois manque de personnel pour assurer le respect des lois et règlements censés protéger l’environnement, voilà que ce gouvernement propose des règles invraisemblables pour livrer notre territoire à l’exploration et à l’exploitation des hydrocarbures », a fait valoir le président général du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, Christian Daigle.
Il n'y a pas d'épidémie de projets
Les groupes ont d’ailleurs rappelé la vive opposition à la nouvelle Loi sur les hydrocarbures, qui oblige notamment les municipalités à cohabiter avec les permis d’exploration déjà concédés au fil des ans, essentiellement entre 2006 et 2010, sous le gouvernement de Jean Charest. Ils ont du même coup plaidé pour un abandon des projets pétroliers et gaziers au Québec, mais aussi pour une « transition énergétique ».
Un message repris par Québec solidaire, mais aussi par le Parti québécois. Selon le député Sylvain Gaudreault, le ministre David Heurtel, qui a dû défendre la position du gouvernement jeudi, semble avoir « honte » des projets de règlements développés par le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles.
Encadrement « très sévère »
M. Heurtel a répondu jeudi que ce cadre réglementaire développé depuis plusieurs mois n’est qu’un « projet de règlement ». « Il ne faut pas sauter aux conclusions ». a-t-il dit. « Je comprends l’inquiétude », a ajouté le ministre, avant d’affirmer que « le gouvernement va tenir compte des commentaires ».
« Il y a une période de consultations qui s’amorce. Je crois qu’il va y avoir beaucoup de réactions et beaucoup de commentaires », a reconnu M. Heurtel. Cette période est d’une durée de 45 jours, après quoi le gouvernement pourra édicter la nouvelle réglementation.
« Nous encadrons de façon très sévère et très rigoureuse » les projets d’hydrocarbure, a également affirmé M. Heurtel, en précisant que les éventuels projets d’exploitation seraient soumis à un examen du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). « Il n’y a aucun projet de fracturation en cours au Québec. Et je crois qu’il y a cinq ou six projets d’hydrocarbure au Québec. Il n’y a pas d’épidémie de projets. »
Concrètement, il existe plusieurs dizaines de permis d’exploration en vigueur au Québec, pour une superficie totale de 53 225 km2. Et si des projets d’exploitation sont lancés, ils pourraient être actifs pendant plus de 50 ans, selon ce que précise le projet de règlement du gouvernement.