L’Université Laval s'éloigne des énergies fossiles

L’Université Laval est la première au Québec à prendre un engagement ferme, dans le cadre d’un mouvement qui prend de l’ampleur dans le monde.
Photo: Université Laval

L’Université Laval est la première au Québec à prendre un engagement ferme, dans le cadre d’un mouvement qui prend de l’ampleur dans le monde.

L’Université Laval s’engage à retirer ses investissements du secteur des énergies fossiles, une première pour une université canadienne. Mais même si le mouvement de désinvestissement prend de plus en plus d’ampleur à l’échelle de la planète, les autres universités québécoises tardent à s’engager sur cette voie, a constaté Le Devoir.

« L’Université Laval s’engage dans une démarche responsable qui devrait la mener, à terme, à déplacer les investissements de ses fonds de dotation dans les énergies fossiles vers d’autres types de placements, par exemple dans les énergies renouvelables »,  a expliqué mercredi le vice-recteur exécutif et responsable du volet développement durable, Éric Bauce.


Selon lui, l’établissement agit ainsi de façon « responsable » par rapport à la crise des changements climatiques, en plus de miser sur « un meilleur rendement à long terme » en optant pour des investissements dans les énergies renouvelables.
 

Pour parvenir à sortir ses investissements du secteur pétrolier et gazier, l’Université Laval mettra sur pied un « comité-conseil sur les investissements responsables ». Celui-ci « aura le mandat de recommander des approches, des pratiques et des gestes à poser en la matière ». Qui plus est, un rapport annuel présentant la progression de son engagement associée à la transition de ses investissements sera rendu public.


M. Bauce estime qu’à l’heure actuelle, « environ 5 % » des investissements de la fiducie de 220 millions de l’Université Laval se retrouvent dans le secteur des énergies fossiles, soit 11 millions.
 

Mouvement

La décision de l’établissement universitaire a été saluée par le groupe « ULaval sans fossiles », qui avait lancé en novembre une campagne pour convaincre l’université. Le groupe siégera d’ailleurs au comité mis en place pour assurer le suivi de cet engagement.

D’autres mouvements étudiants favorables au retrait des investissements dans le secteur des énergies fossiles existent dans plusieurs campus au Québec. C’est notamment le cas de l’Université McGill, de l’Université de Sherbrooke et de l’Université de Montréal.


Malgré leurs démarches et la croissance du mouvement de « désinvestissement » à l’échelle internationale, aucune autre université au Québec ne s’est formellement engagée à retirer ses investissements dans les entreprises du secteur des énergies fossiles. Et aucun plan précis n’est sur la table, a constaté Le Devoir.

En choisissant de ne pas désinvestir, on parie contre l’accord de Paris sur le climat, mais aussi contre la preuve scientifique, qui nous dit clairement qu’il faut sortir de l’ère des énergies fossiles. 


À l’Université de Sherbrooke, une « réflexion » a été enclenchée au sein de la Fondation de l’établissement en vue d’un possible retrait des investissements dans les industries pétrolières et gazières, a expliqué mercredi le vice-recteur au développement durable, Alain Webster.

Du côté de l’Université de Montréal, une « politique en matière d’investissement responsable » a été mise en place en 2016 pour son Fonds de dotation, dont la valeur atteint 317 millions de dollars. Aucun plan formel de sortie des hydrocarbures n’est à l’ordre du jour, selon ce qui se dégage des documents transmis mercredi.

L’Université Concordia a décidé, dans le cadre d’un projet pilote, de réserver 5 % des 100 millions de dollars de son fonds de dotation pour des placements qui excluent expressément les énergies fossiles.

Retard du Québec

L’Université McGill, dont le fonds de dotation dépasse le milliard de dollars, a quant à elle rejeté l’idée d’un désinvestissement. Une situation que dénonce le directeur pour le Québec de la Fondation David Suzuki, Karel Mayrand. Ce dernier a même décidé, avec une trentaine d’autres diplômés de l’université, de rendre son diplôme à McGill l’an dernier.

M. Mayrand s’étonne d’ailleurs de constater que les universités québécoises ne se joignent pas au mouvement de sortie des énergies fossiles. « Il semble y avoir un grand conservatisme chez certains acteurs financiers, estime-t-il. Or, en choisissant de ne pas désinvestir, on parie contre l’accord de Paris sur le climat, mais aussi contre la preuve scientifique, qui nous dit clairement qu’il faut sortir de l’ère des énergies fossiles. »

Des universités prestigieuses ont pourtant choisi de se détourner, au moins en partie, de ce secteur énergétique. C’est le cas des universités Stanford, Yale et Oxford.

Qui plus est, plusieurs universités américaines et européennes se sont ainsi engagées à retirer leurs investissements des entreprises pétrolières, des gazières et de celles qui opèrent dans le secteur du charbon. Dans certains cas, les campagnes de désinvestissement du secteur pétrolier visent directement les sables bitumineux albertains.

Selon une étude de l’organisation DivestInvest publiée en décembre 2016, l’actif des investisseurs institutionnels et individuels qui veulent retirer leurs billes se situe à plus de 5000 milliards de dollars américains, un record. Au total, 688 institutions et 58 000 personnes souhaitent aujourd’hui réduire ou annuler leurs positions dans des entreprises du secteur des combustibles fossiles.

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