Les audiences du BAPE sur le projet Énergie Est débutent dans la tension

Les audiences du BAPE sur le pipeline de TransCanada ont débuté lundi soir dans une certaine tension, alors que des opposants ont interrompu pendant quelques minutes la présentation du projet livrée par des représentants de la pétrolière. Plusieurs citoyens ont d’ailleurs critiqué vivement le processus d’évaluation du projet, qui ne respecterait pas les dispositions de la Loi sur la qualité de l’environnement.
Des citoyens opposés au projet de pipeline ont ainsi scandé « TransCanada ne passera pas », tout en dénonçant le transport de pétrole des sables bitumineux sur le territoire québécois. Deux personnes ont déroulé une banderole sur laquelle on pouvait lire : « Même si le gouvernement donne les permis, ce sont les communautés qui donnent la permission. »
La séance du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) a d’ailleurs été interrompue pendant une vingtaine de minutes, interruption au cours de laquelle des opposants et des partisans du projet ont échangé quelques propos parfois acerbes.
Le directeur général de Nature Québec, Christian Simard, ne s’étonne pas d’une telle situation. Il souligne ainsi qu’il existe « des frustrations bien réelles » par rapport au processus d’évaluation québécois du pipeline Énergie Est. « Il ne faut pas oublier que le processus est contesté en Cour supérieure, justement parce qu’il ne respecte pas la Loi sur la qualité de l’environnement », a-t-il souligné.
« On comprend mal comment le BAPE a pu accepter un mandat tronqué », a ajouté M. Simard. En vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement, tout projet de pipeline de plus de deux kilomètres construit au Québec doit passer par un processus d’étude qui impose au promoteur de déposer un avis de projet, mais aussi une étude d’impact avant le début du BAPE.
Le vice-président d’Énergie Est pour le Québec, Louis Bergeron, a toutefois profité de sa présentation lundi pour répéter que le pipeline serait soumis uniquement à la réglementation fédérale. Une affirmation d’ailleurs inscrite dans la présentation du projet qui sert de base aux audiences du BAPE.
M. Bergeron a par ailleurs réitéré que le projet de pipeline constitue une « opportunité » de remplacer les importations de pétrole dans l’est du Canada. Quel pourcentage du pétrole, parmi les 1,1 million de barils par jour, pourrait être raffiné au Québec, a demandé Christian Simard ? « Il existe un déficit de 100 000 à 150 000 barils par jour au Québec », a simplement indiqué M. Bergeron. Le reste serait et transporté et raffiné à l’extérieur de la province. Selon TransCanada, le pétrole des sables bitumineux pourrait être exporté vers les États-Unis, l’Europe et l’Inde.
Le vice-président d’Énergie Est a également affirmé que le projet émettrait peu de gaz à effet de serre, contrairement au transport par train. Une affirmation réfutée par Jacques Tétreault, qui a profité de la période de questions pour affirmer que le pipeline Énergie Est « favorisera une augmentation des gaz à effet de serre ». Selon une étude de l’Institut Pembina, la production de pétrole qui coulera dans le tuyau devrait générer 32 millions de tonnes de gaz à effet de serre par année. Le BAPE doit d’ailleurs consacrer deux séances à la question des gaz à effet de serre.
M. Bergeron a en outre essuyé plusieurs critiques de la part d’intervenants qui ont dénoncé la teneur de ses réponses, les qualifiant parfois de « demi-vérités ». « TransCanada s’est gardée de mentionner que le projet permettra une expansion massive de la production de pétrole dans l’Ouest et que 80 à 90 % du pétrole transporté sera exporté sur les marchés internationaux. La présentation de TransCanada relevait plus d’un exercice de relations publiques que d’une volonté d’informer la population », a déploré le porte-parole de la campagne climat de Greenpeace, Patrick Bonin.
M. Bonin a également qualifié d’« indécente » l’idée de présenter un « choix » dans les modes de transport, soit entre les trains et les pipelines. « Le véritable choix n’est pas entre les pipelines et les trains, mais bien entre être complices de l’expansion du pétrole le plus sale au monde ou devenir un leader des alternatives vertes qui nous permettraient de nous libérer du pétrole d’ici 35 ans comme la science climatique l’exige. »
Les audiences du BAPE sur le projet de pipeline se poursuivent ce mardi.