Accord historique entre la Chine et les États-Unis pour lutter contre le réchauffement
Barack Obama et son homologue chinois Xi Jinping, à la tête des deux pays les plus pollueurs de la planète, se sont fixé ensemble mercredi à Pékin de nouveaux engagements pour lutter contre le réchauffement climatique.
Qualifiée d’«historique» par le président américain, cette annonce répond à l’urgence de parvenir à un accord mondial à la conférence sur le climat fin 2015 à Paris.
Premier émetteur mondial, la Chine s’est fixé l’objectif d’un pic de ses émissions de gaz à effet de serre, responsables de la hausse des températures, «autour de 2030», avec l’intention d’«essayer d’y arriver plus tôt», selon la Maison Blanche.
De leur côté, les États-Unis se sont engagés à réduire de 26 % à 28 % leurs émissions d’ici à 2025 par rapport à 2005.
C’est la première fois que la Chine prend un engagement sur une date à laquelle ses émissions atteindront un sommet, en ciblant l’année à partir de laquelle celles-ci cesseront d’augmenter et la courbe s’inversera.
Cet accord bilatéral est significatif dans la mesure où, dans les négociations sur le climat, la Chine exige systématiquement de ne pas être logée à la même enseigne que les pays industrialisés, en vertu du principe des «responsabilités communes mais différenciées». En clair, dit Pékin, la responsabilité de la lutte contre le réchauffement incombe principalement aux pays développés.
Constat sans appel
Le constat des scientifiques est sans appel : les efforts actuels sont insuffisants pour limiter la hausse de la température mondiale à +2°C, objectif que s’est fixé la communauté internationale pour éviter un emballement catastrophique des dérèglements climatiques.
La réunion de Paris doit aboutir à un accord suffisamment ambitieux pour limiter ce réchauffement à 2°C.
Les États-Unis et la Chine représentent à eux deux plus de 40 % du total des émissions de CO2 de la planète.
L’objectif américain «est à la fois ambitieux et réalisable», a commenté un haut responsable américain sous le couvert de l’anonymat.
«Le fait que les États-Unis et la Chine, traditionnellement considérés comme les leaders de deux camps opposés [dans les négociations sur le climat], avancent ensemble, va avoir un gros impact», a-t-il ajouté.
Républicains contre
Les républicains du Congrès américain ont déploré les nouveaux engagements américains pour lutter contre le réchauffement climatique, et promis de poser de nombreux obstacles à leur réalisation.
«Cette annonce est un nouveau signal que le président a l’intention de poursuivre sa politique destructrice d’emplois, quel que soit l’impact dévastateur sur le coeur de l’Amérique et sur le pays tout entier», a déclaré le président républicain de la Chambre des représentants, John Boehner, dans un communiqué.
«C’est le dernier exemple de la croisade du président contre des sources d’énergie fiables et abordables, une croisade qui détruit des emplois et pèse sur la classe moyenne», a-t-il poursuivi.
«Les républicains ont adopté des textes pour restreindre les pouvoirs de l’Agence de protection de l’environnement (EPA) et stopper l’entrée en vigueur de ces politiques, et nous continuerons à en faire une priorité dans le nouveau Congrès», a conclu M. Boehner.
Le chef de la majorité républicaine de la Chambre, Kevin McCarthy, a annoncé que la Chambre continuerait à voter des mesures pour tenter d’annuler ou de contrecarrer les réglementations environnementales de l’administration.
A partir de janvier, les républicains contrôleront le Sénat, en plus de la Chambre. Le futur chef de la majorité républicaine du Sénat, Mitch McConnell, représente le Kentucky, dans les Appalaches, où les mines de charbon représentent un secteur important de l’économie.
«Notre économie ne pourra pas supporter la guerre idéologique du président contre le charbon», a-t-il déclaré.
Ki-Moon content
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a qualifié l’accord d’«importante contribution» à la lutte contre le réchauffement, avant l’accord mondial qui doit être trouvé à Paris.
«J’appelle tous les pays, notamment toutes les grandes économies, à suivre la voie de la Chine et des États-Unis», a-t-il ajouté à l’occasion d’un sommet régional des pays de l’Asie du sud-est à Naypyidaw, capitale de la Birmanie, où était attendu Barack Obama dans la soirée.
«L’annonce d’aujourd’hui ne doit être que la base et non le sommet des mesures d’amélioration», a quant à lui tempéré le directeur pour l’Asie orientale de Greenpeace, Li Shuo, dans un communiqué.
«Bonne nouvelle», a commenté pour sa part le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, chargé de préparer la conférence de Paris.
Problème majeur en Chine
Les émissions de CO2 par habitant de la Chine dépassent désormais celles de l’Union européenne.
La deuxième économie de la planète, également premier marché automobile mondial, est poussée à agir contre le CO2 car la pollution atmosphérique s’est imposée comme un problème majeur dans les métropoles chinoises.
La Chine représente la moitié de la consommation mondiale de charbon, dont elle tire plus de 70 % de son énergie, avec une tendance toujours à la hausse car elle continue à bâtir de nombreuses centrales thermiques.
«L’objectif [du pic] va sûrement créer des défis à la Chine pour ajuster son mix énergétique» et heurter des intérêts industriels, a prévenu à Pékin Ma Jun, directeur de l’Institut public des affaires environnementales, une ONG.
Barack Obama a été reçu à Pékin par son homologue chinois après le sommet la veille du forum de coopération économique de l’Asie-Pacifique (Apec).
Après la Birmanie, le président américain ira en Australie pour le sommet du G20.