Les travaux sont reportés, mais toujours prévus

Si la pétrolière TransCanada obtient le feu vert, les travaux risquent d’être menés au cours de la période la plus risquée de l’année pour les bélugas.
Photo: Source: GREMM Si la pétrolière TransCanada obtient le feu vert, les travaux risquent d’être menés au cours de la période la plus risquée de l’année pour les bélugas.
Sous le coup d’une demande d’injonction pour faire bloquer le début de ses travaux dans le secteur de Cacouna, TransCanada a finalement accepté vendredi d’attendre une décision du gouvernement du Québec avant de procéder à des forages en milieu marin. Si la pétrolière obtient le feu vert, les travaux risquent d’être menés au cours de la période la plus risquée de l’année pour les bélugas.
 

Quatre groupes environnementaux ont présenté une demande d’injonction dans le but de bloquer le début des travaux de forages prévus pour les prochains jours. Selon le libellé de la demande, TransCanada devrait obligatoirement obtenir une autorisation de Québec en vertu la Loi sur la qualité de l’environnement avant de procéder. Elle vient d’ailleurs tout juste d’en faire la demande, a-t-on appris vendredi matin.

 

En fait, bien que la pétrolière ait déposé le 9 avril une demande d’autorisation auprès du gouvernement fédéral, une telle démarche n’avait pas encore été menée auprès des autorités provinciales. L’entreprise albertaine a finalement demandé un certificat d’autorisation jeudi, soit la veille de l’audience en cour concernant l’injonction déposée par les groupes environnementaux.

 

Plaidant qu’une demande d’autorisation venait effectivement d’être logée du côté de Québec, l’avocat de TransCanada a souligné que son client acceptait de suspendre le début des travaux pour une période d’au moins 10 jours, en attendant la décision du ministère de l’Environnement du Québec en vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement. Les deux parties ont signé cette entente.

 

Travaux à venir

 

Mais ce n’est que partie remise, puisque la pétrolière entend bel et bien mener ses travaux cette année, a confirmé son porte-parole, Philippe Cannon, à la sortie de l’audience. «Quand nous aurons l’ensemble des autorisations pour aller de l’avant, nous continuerons à aller de l’avant», a-t-il également souligné.

 

Qu’adviendra-t-il si Québec refuse le certificat d’autorisation? «On verra en temps et lieu», a simplement dit M. Cannon. TransCanada estime cependant que la décision finale concernant son projet Oléoduc Énergie Est revient à l’Office national de l’énergie. Lors du dépôt de la description du projet, en mars, Philippe Cannon avait souligné que la pétrolière est « uniquement réglementée par l’Office national de l’énergie». «Le projet Énergie Est, puisqu’il traverse six provinces, est sous autorité fédérale», avait-il dit.

 

La pétrolière entend toutefois se soumettre «volontairement» à une évaluation environnementale qui serait menée pour le projet de terminal maritime à construire à Cacouna. Cette évaluation pourrait être confiée au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE).

 

TransCanada a déjà une autorisation du fédéral de procéder à des forages dans le Saint-Laurent. Celle-ci est valide jusqu’en novembre. Elle couvre donc toute la période de fréquentation du secteur par les bélugas.

 

Pêches et Océans Canada a précisé qu’aucun permis n’était requis pour les travaux de levés géotechniques à venir, comprenant des forages. Mais une porte-parole a affirmé que le ministère «surveillera» le déroulement des opérations qui seront menées au large de Cacouna. Des «conditions» à la réalisation des travaux ont aussi été transmises par écrit à TransCanada, a indiqué la porte-parole de Pêches et Océans. Mais elle a refusé de transmettre une copie de ces conditions au Devoir.

 

Victoire

 

Les groupes qui ont présenté la requête vendredi ont vu dans le report des travaux une victoire. Mais la bataille juridique risque de se poursuivre. «Paradoxalement, TransCanada demande un permis du Québec tout en continuant d’affirmer que Québec n’a pas juridiction sur son projet. Ce dossier reviendra donc inévitablement devant les tribunaux», a fait valoir l’avocat des requérants, Michel Bélanger.

 

Si les travaux devaient être lancés dans quelques semaines, après la décision de Québec, ils seraient menés alors que le secteur de Cacouna est très fréquenté par les bélugas, dont des femelles. Plusieurs seront alors en plein cœur de la période de mise bas, une étape critique du cycle annuel de l’espèce, selon Robert Michaud, spécialiste de l’espèce. Cette zone est considérée comme la pouponnière de ces mammifères dans le Saint-Laurent.

 

Les travaux préparatoires en milieu marin doivent permettre à la pétrolière de préciser sa demande d’approbation de projet à l’Office national de l’énergie. Le projet de pipeline Énergie Est permettra de transporter dès 2018 plus d’un million de barils de pétrole chaque jour vers le Nouveau-Brunswick, en passant par le Québec.

 

C’est dans ce cadre que TransCanada entend construire un port à Cacouna afin de charger des navires de pétrole en vue de l’exporter. Ces pétroliers pourraient transporter jusqu’à un million de barils de pétrole. Avec ce projet inédit dans l’histoire du Québec, la province deviendra un joueur clé dans la mise en marché des sables bitumineux.

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