Québec manquerait à son devoir de protection environnementale

L’opposition péquiste accuse le ministre de l’Environnement David Heurtel de ne pas faire respecter la Loi sur la qualité de l’environnement en refusant d’intervenir dans le dossier du futur port pétrolier de Cacouna, alors que les travaux ont débuté sans aucune autorisation de Québec. Mais les forages prévus pour les prochains jours pourraient être stoppés dès vendredi en raison d’une injonction déposée par des groupes environnementaux contre la pétrolière.

« Les articles 20 et 22 de la Loi sur la qualité de l’environnement sont très clairs et doivent s’appliquer. Malgré les intentions sans équivoque affichées par TransCanada, aucune demande d’autorisation n’a été reçue au ministère de l’Environnement. La compagnie se trouve donc en contravention de la loi », a fait valoir jeudi Sylvain Gaudreault, porte-parole du Parti québécois en matière d’environnement.

L’article 20 de ladite loi stipule en effet qu’il est interdit d’émettre un « contaminant » dans l’environnement. Dans ce cas-ci, la pollution sonore résultant des travaux de forage à venir en milieu marin pourrait être considérée comme une source de contamination. « À cause du bruit et des activités associées aux travaux, ces forages risquent de causer un préjudice irréparable aux mammifères marins comme les bélugas, par exemple, qui sont une richesse faunique et touristique pour tout le Québec », a d’ailleurs plaidé M. Gaudreault.

L’article 22 de la Loi sur la qualité de l’environnement force par ailleurs une entreprise à obtenir un « certificat d’autorisation » du ministère avant d’entreprendre une activité susceptible de se solder par l’émission d’un contaminant. Or, TransCanada n’a pas obtenu, à ce jour, un tel document.

Pour le Parti québécois, il ne fait donc aucun doute que David Heurtel doit intervenir dans le dossier. « Le ministre exigera-t-il de TransCanada qu’elle cesse immédiatement les travaux de forage entrepris jusqu’à l’obtention des autorisations nécessaires, suivant la Loi sur la qualité de l’environnement ? Est-ce que le ministre va faire respecter sa loi ? », a lancé Sylvain Gaudreault lors de la période de questions à l’Assemblée nationale. Selon lui, il est « très grave » que le ministre ne soit toujours pas intervenu pour faire appliquer la législation en vigueur.

M. Heurtel n’a pas voulu commenter les propos de l’opposition ni préciser quoi que ce soit concernant les intentions du gouvernement dans le dossier du port pétrolier, qui doit servir à exporter une partie de la production des sables bitumineux albertains. « Les tribunaux sont saisis de la question, donc je ne commenterai pas davantage », s’est-il borné à répondre aux journalistes. Est-ce que Québec a le pouvoir d’agir ? « Je ne commenterai pas davantage », a répété le ministre libéral.

Demande d’injonction

La cause est effectivement devant les tribunaux, puisque quatre groupes environnementaux ont déposé une injonction pour faire stopper les travaux de forage qui doivent être menés en plein cœur d’un habitat essentiel pour les bélugas du Saint-Laurent. La demande sera entendue vendredi matin au palais de justice de Montréal.

Selon le libellé de la demande d’injonction, TransCanada devrait obligatoirement obtenir une autorisation du gouvernement du Québec en vertu la Loi sur la qualité de l’environnement avant de procéder. Cette même requête soutient que la pétrolière albertaine contreviendrait également aux exigences de la Loi sur les espèces en péril du gouvernement fédéral, puisque les travaux ont toutes les chances de « nuire » au béluga et de le « harceler », ce qui est interdit en vertu de cette législation.

TransCanada a toutefois déjà obtenu une autorisation de procéder à des forages dans le Saint-Laurent. Celle-ci est valide jusqu’en novembre. Elle couvre donc toute la période de fréquentation du secteur par les bélugas. La zone de Cacouna est considérée comme la pouponnière du béluga du Saint-Laurent.

Pêches et Océans Canada a précisé qu’aucun permis n’était requis pour les travaux de levés géotechniques à venir, comprenant des forages. Mais une porte-parole a affirmé que le ministère « surveillera » le déroulement des opérations qui seront menées au large de Cacouna. Des « conditions » à la réalisation des travaux ont aussi été transmises par écrit à TransCanada, a indiqué la porte-parole de Pêches et Océans. Mais elle a refusé de transmettre une copie de ces conditions au Devoir.


Avec Marco Bélair-Cirino

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