Terrebonne critique Enbridge et Québec

L'oléoduc 9B traverse la municipalité de Terrebonne depuis une trentaine d'années. Les citoyens de la ville n'avaient pas été mis au courant par l'entreprise d'un déversement de 4000 litres de produits pétroliers, en 2011.
Photo: - Le Devoir L'oléoduc 9B traverse la municipalité de Terrebonne depuis une trentaine d'années. Les citoyens de la ville n'avaient pas été mis au courant par l'entreprise d'un déversement de 4000 litres de produits pétroliers, en 2011.

L’administration municipale a ainsi appris, un peu par hasard, que la pétrolière a dû faire face en mai 2011 à un déversement sur un terrain où se trouve une station de pompage située de long de l’oléoduc 9B. Ce pipeline de 38 ans traverse une bonne partie de la ville de Terrebonne. Il sert présentement à transporter des produits pétroliers vers l’Ontario. Mais d’ici quelques mois, il servira à acheminer 300 000 litres de pétrole brut de l’Ouest jusqu’à Montréal.

Selon les informations dont dispose la Ville, quelque 3000 litres auraient été simplement récupérés par Enbridge. Un total de 1000 litres auraient été acheminés « vers un site de traitement ».

Or, dénonce Terrebonne dans une lettre envoyée à Enbridge le 2 décembre dernier, l’entreprise n’a jamais fait part de cet incident aux autorités municipales. « Dans notre esprit, un tel débordement aurait dû faire l’objet d’une communication officielle d’Enbridge à l’endroit des services municipaux, a fortiori à une période où la population est à juste titre préoccupée par les risques associés au transport pétrolier », écrit le directeur général de la Ville, Denis Lévesque.

Enbridge fait cependant valoir qu’elle a avisé l’Office national de l’énergie de l’incident, mais aussi le ministère de l’Environnement du Québec. « En tant que bon citoyen corporatif, nous croyons qu’Enbridge, à défaut d’avoir une obligation légale, avait une obligation morale d’aviser la Ville de Terrebonne qu’une fuite de pétrole se déroulait à proximité d’un secteur regroupant notamment le cégep, le centre de formation professionnelle, la Cité du sport, une garderie et de nombreux commerces », réplique l’administration municipale.

Le coordonnateur aux affaires publiques de la Ville de Terrebonne, Joël Goulet, a précisé mardi ne pas avoir reçu d’accusé de réponse à la lettre envoyée il y a plus d’une semaine. « On se serait attendus à une réponse de leur part à nos questions », a-t-il ajouté.

« La réponse formelle n’a pas encore été envoyée, mais nous sommes en contact avec la Ville de Terrebonne », a répondu le porte-parole d’Enbridge, Éric Prud’Homme. Il a aussi précisé que la Ville n’avait pas été informée en 2011 parce qu’« il n’y avait pas de feu ni de danger » à la suite du déversement de produits pétroliers. M. Prud’Homme a également rappelé que l’entreprise s’est engagée, dans le cadre des consultations de l’Office national de l’énergie, à entretenir des « communications accrues » avec les municipalités.

Silence de Québec

 

Le déversement survenu à Terrebonne n’est par ailleurs pas inscrit dans la liste des « incidents » répertoriés dans le document de consultation déposé par Québec avant la commission parlementaire qui s’est tenue récemment pour étudier le projet d’inversion du pipeline 9B.

Il n’est pas non plus mentionné dans le répertoire d’Urgence environnement, l’organe du ministère de l’Environnement chargé de répondre aux « situations d’urgence environnementale ». « Est-ce un oubli de votre part ? La nature de l’incident justifiait-elle l’intervention d’Urgence environnement ? Le déversement vous a-t-il été rapporté, en conformité avec la Loi sur la qualité de l’environnement ? », questionne Terrebonne dans la lettre envoyée vendredi dernier à la direction régionale de Montréal, de Laval, de Lanaudière et des Laurentides du ministère.

Mais surtout, le ministère n’a jamais communiqué avec la municipalité afin de l’informer de la situation, souligne le directeur de la Ville, Denis Lévesque. Il demande donc qu’à l’avenir, Québec s’engage à l’informer de tout incident du genre.

Joël Goulet a souligné que cette dernière demande est d’autant plus importante que de plus en plus de citoyens posent des questions à l’administration municipale. Il faut dire que l’oléoduc 9B d’Enbridge traverse directement des secteurs résidentiels de Terrebonne, et parfois même la cour des maisons, comme le révélait samedi Le Devoir. Selon les informations dont dispose la Ville, entre 25 et 27 sites devraient faire l’objet de travaux au cours des prochains mois, de façon à s’assurer de l’intégrité de l’infrastructure.

Mais Enbridge se veut rassurante. Elle estime que le fait d’inverser le sens d’écoulement dans cet oléoduc et de faire passer la capacité quotidienne de transport de 240 000 à 300 000 barils ne présente pas de menaces environnementales particulières. La ligne 9B transportera du pétrole de schiste et des sables bitumineux.

 


Afficher Tracé de l'oléoduc en territoire québécois sur une carte plus grande

À voir en vidéo