Enbridge dans la cour d’un centre de la petite enfance

À Terrebonne, l’oléoduc d’Enbridge longe le boulevard de la Pinière, au sud de l’autoroute 640. Et il passe directement dans la cour du centre de la petite enfance Gamin Gamine, a constaté Le Devoir.
En fait, le pipeline qui transportera bientôt 300 000 barils de pétrole brut chaque jour jusqu’à Montréal traverse une partie du stationnement de l’établissement. Il se trouve à environ 15 mètres de la porte d’entrée.
L’emplacement du pipeline construit en 1975 est clairement indiqué par une affiche portant le logo d’Enbridge, avec en dessous cette inscription : « Attention, oléoduc sous haute pression ».
Contactée par Le Devoir, la directrice adjointe du CPE, Nancy Ross, avait peu de détails à donner au sujet de la pétrolière albertaine ou de la présence de l’oléoduc. « J’ai vu une affiche “ Enbridge ” près de mon stationnement. Je viens de la remarquer. C’est une affaire de pipeline ou je ne sais trop quoi ? » a-t-elle dit.
Mme Ross a admis qu’elle ignorait tout du projet d’inversion sur le point d’être autorisé par le gouvernement Harper, et appuyé par le gouvernement Marois. « J’ai reçu un dépliant qui parle de ce qu’il faut faire quand on vit à côté d’un pipeline. Mais pour moi, ce n’était pas très concret. Je n’ai pas prêté attention. »
Un peu à l’ouest du CPE, toujours sur le boulevard de la Pinière, l’oléoduc passe dans la cour du centre d’amusement L’Astuce. Cette entreprise propose notamment des forfaits pour des fêtes d’enfants ou de groupes scolaires. Le propriétaire n’a pas rappelé Le Devoir.
À Mirabel, on constate par ailleurs que la ligne 9B traverse un quartier résidentiel en longeant plusieurs résidences situées à moins de 10 mètres de l’infrastructure.
Le pipeline traverse un total de huit cours d’eau au Québec, dont la rivière des Outaouais, la rivière des Mille-Îles et la rivière des Prairies.
La Communauté métropolitaine de Montréal veut être rassurée
Si elle se réjouit des éventuelles retombées économiques liées à l’arrivée de pétrole de l’Ouest par l’oléoduc 9B, la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) — et les 82 municipalités qui la composent — exige toutefois davantage d’engagements de la part d’Enbridge en matière de sécurité. « Enbridge devra préciser les mesures d’urgence retenues afin d’intervenir rapidement dans le cas d’un incident, a fait valoir cette semaine le maire de Montréal et président de la Communauté, Denis Coderre. La compagnie devra également arrimer son plan d’intervention d’urgence avec les plans de sécurité civile des municipalités et des intervenants gouvernementaux concernés. » La CMM exige également d’Enbridge qu’elle se dote des protections adéquates en cas de déversement, y compris une couverture d’assurance d’au moins un milliard de dollars. Enfin, le regroupement estime nécessaire de mener des analyses plus poussées sur l’intégrité du pipeline 9B, mais aussi sur l’impact du projet sur les émissions de gaz à effet de serre.
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Les municipalités traversées par l’oléoduc 9B sont inquiètes
Les municipalités traversées par l’oléoduc 9B pressent Enbridge d’améliorer ses pratiques en matière de transparence.
L’Union des municipalités du Québec (UMQ) veut voir l’élaboration de « mécanismes automatiques » prévoyant la transmission automatique de nouvelles informations entre
Enbridge et les municipalités à l’égard de l’intégrité du pipeline parcourant tout près de 640 km, dont environ 110 km à l’intérieur des frontières québécoises.
« Il faut que chacune des municipalités fasse la démarche, aille faire des recherches sur Internet pour aller trouver, à l’intérieur du site de l’Office, quand est-ce qu’il y a eu une inspection, s’il y a eu des problèmes à cette inspection-là », a déploré la mairesse de Sainte-Julie, Suzanne Roy, lors de son passage en commission parlementaire.
En plus de ne pas avoir l’heure juste sur l’état du segment de la canalisation traversant de bout en bout leur territoire, les élus municipaux « n’ont pas non plus été consultés avant que les plans d’intervention [en cas d’urgence] leur soient transmis », selon la porte-parole de l’UMQ, inquiétée par l’« histoire récente » de la compagnie. « En matière d’accidents, de fuites, de déversements, Enbridge affiche une feuille de route plutôt longue. »
Enbridge, sous autorité fédérale, est tenue de respecter les règlements municipaux, y compris sur la qualité de l’air, la qualité de l’eau et sur les rejets industriels, a pour sa part insisté le maire de Montréal-Est, Robert Coutu.
La Ville de Montréal ne connaît pas le tracé de l’oléoduc
La Ville de Montréal n’a pas de plans de l’emprise de l’oléoduc 9B à portée de main, a appris Le Devoir. « Je n’ai pas réussi à mettre la main dessus ici à la Ville », a indiqué un membre de l’équipe de relationnistes de la Ville de Montréal, avant de suggérer au Devoir de se rabattre sur le site Internet d’Équiterre. Celui-ci renferme « une carte qui, lorsqu’on la grossit, grossit, grossit, on finit par voir qu’est-ce qui en est pour Montréal ». Après avoir traversé la rivière des Prairies, l’oléoduc parcourt près de trois kilomètres dans l’arrondissement de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles. Le pipeline perce le sol du parc Moulin-du-Rapide, avant de s’élancer, 100 mètres à l’ouest du boulevard Rivière-des-Prairies, vers le sud. La ligne 9B termine sa course au sud du boulevard Henri-Bourrassa, où elle laissera éventuellement couler 300 000 barils de pétrole brut léger et lourd de l’Ouest.
Marco Bélair-Cirino
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