La situation de Capitaine Crochet est critique

Capitaine Crochet, une femelle rorqual observée dans le Saint-Laurent depuis 20 ans, nage empêtrée dans un engin de pêche qui peut l’empêcher de s’alimenter et lui causer de sévères blessures.
Photo: Gremm Capitaine Crochet, une femelle rorqual observée dans le Saint-Laurent depuis 20 ans, nage empêtrée dans un engin de pêche qui peut l’empêcher de s’alimenter et lui causer de sévères blessures.

C’est sans contredit l’une des baleines les plus connues du Saint-Laurent. Capitaine Crochet, une femelle rorqual commun qui revient au Québec chaque année depuis 20 ans, risque maintenant de mourir des suites d’un empêtrement dans un engin de pêche au crabe. Depuis deux semaines, les nombreuses tentatives pour libérer l’animal ont échoué. Et Crochet est maintenant introuvable.


« On se trouve devant une situation très difficile. La situation de l’animal est sévère. En fait, on juge que, sans une intervention humaine, Capitaine Crochet est condamnée », fait valoir Robert Michaud, président du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM) et directeur des programmes de recherche.


La baleine, d’une vingtaine de mètres, nage empêtrée dans un engin de pêche qui peut l’empêcher de s’alimenter, en plus de lui causer de sévères blessures. « On a constaté qu’un câble fait le tour de la mâchoire supérieure, ce qui a probablement brisé des fanons, explique M. Michaud, qui connaît Crochet depuis 1994. Cela aura des impacts sur sa capacité à s’alimenter. On voit aussi que, sur le dessus, le câble entre profondément dans la chair. Par ailleurs, des artères importantes passent sur le dessus du crâne, ce qui présente un risque. »


La situation critique dans laquelle se trouve cette « vedette » a semé l’émoi parmi les gens de l’industrie des croisières d’observation de baleines. Le Devoir a passé quelques jours à Tadoussac et a constaté que plusieurs s’inquiètent vivement pour la vie du rorqual. Partout dans le village, le GREMM a affiché des bulletins d’information présentant les dernières nouvelles de Capitaine Crochet.

 

Animal farouche


Des spécialistes du désempêtrement de baleines du Nouveau-Brunswick, de Cape Cod et de la côte ouest sont venus offrir leur expertise. Mais, selon M. Michaud, il est très difficile de libérer un animal aussi rapide et farouche qu’un rorqual commun, un animal surnommé le « lévrier des mers ». Il peut plonger une quinzaine de minutes et parcourir de grandes distances sous l’eau. Malgré plusieurs tentatives et le recours à différentes tactiques d’approche, Crochet a donc toujours réussi à se défiler. Et depuis samedi, elle a disparu. Elle pourrait bien avoir quitté le parc marin du Saguenay -Saint-Laurent, son secteur préféré. Cette baleine est chaque année la première de son espèce à y revenir, généralement dès le mois de mai.


La situation est d’autant plus inquiétante que Crochet fait partie d’une espèce menacée de disparition. Le deuxième animal de la planète par sa grosseur a été décimé par la chasse au XXe siècle. Les rorquals communs sont aujourd’hui confrontés à plusieurs menaces, dont la pollution sonore causée par la navigation, l’exploration sismique et le développement industriel.


Les engins de pêche constituent une menace constante pour les cétacés dans les océans du globe, mais aussi dans le Saint-Laurent. En 2009, le cachalot Tryphon - observé régulièrement depuis 1991 dans le Saint-Laurent - s’est empêtré dans un engin de pêche et est mort.
 







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