Sables bitumineux «très polluants»: Joe Oliver menace de traîner l'Europe devant l'OMC

«Nous prendrons toutes les actions nécessaires et peut-être irons-nous devant l’OMC, a affirmé Joe Oliver au cours d’une conférence de presse tenue dans le cadre d’un voyage d’une semaine en Europe.
Photo: - Archives Le Devoir «Nous prendrons toutes les actions nécessaires et peut-être irons-nous devant l’OMC, a affirmé Joe Oliver au cours d’une conférence de presse tenue dans le cadre d’un voyage d’une semaine en Europe.

Le ministre conservateur des Ressources naturelles, Joe Oliver, a menacé mercredi de traîner l’Union européenne devant le tribunal de l’Organisation mondiale du commerce en raison de la volonté de l’Europe d’identifier le pétrole des sables bitumineux comme étant «très polluant».

«Nous prendrons toutes les actions nécessaires et peut-être irons-nous devant l’OMC», a-t-il affirmé au cours d’une conférence de presse tenue dans le cadre d’un voyage d’une semaine en Europe. Cette tournée est notamment destinée à promouvoir l’énergie fossile canadienne. «Nous défendrons nos intérêts avec vigueur.»

L’Union européenne étudie en fait un projet de directive de qualité sur les carburants qui étiquetterait le pétrole des sables bitumineux comme étant plus polluant que les autres formes de brut. L’or noir canadien, défendu jour après jour par le gouvernement Harper, émet plus de gaz à effet de serre que le pétrole conventionnel. L’Europe lui attribuerait donc une valeur «carbone» plus significative.

«Le Canada ne s’oppose pas à l’adoption de mesures concrètes qui réduisent vraiment les émissions de GES associées aux carburants, mais il s'oppose au traitement discriminatoire actuellement envisagé dans la [Directive de qualité sur les carburants], qui cible en particulier les carburants provenant des sables bitumineux du Canada sans aucune justification scientifique solide, a soutenu le ministre Oliver. Le Canada continue à réclamer en la matière une approche scientifique, qui traite tous les intéressés de manière égale et équitable.»

«Le Canada est une source d’énergie sûre et stable», a par la suite dit le ministre par voie de communiqué.
 
Mise en garde à Washington

Le mois dernier, le ministre Oliver a fait le voyage jusqu’à Washington afin de mettre en garde le gouvernement américain contre un éventuel rejet du projet Keytstone XL, qui permettrait de transporter le pétrole des sables bitumineux à travers les États-Unis. «Les États-Unis vont devoir faire un choix: ils peuvent choisir le Canada, un ami, un voisin et un allié, pour s’approvisionner en pétrole, ou ils peuvent choisir d’importer ce pétrole de pays moins amicaux, moins stables, et avec des règles environnementales moins strictes, voire pas de règle du tout», a-t-il martelé lors d’une conférence devant le Centre pour les études stratégiques et internationales.

Le ministre a aussi averti qu’un refus de ce projet cher au lobby de l’énergie fossile constituerait un dangereux précédent pour les relations entre Ottawa et Washington. «Sans aucun doute, d’autres oléoducs vont être construits aux États-Unis, que Keystone XL soit approuvé ou rejeté. Mais rejeter ce projet constituerait un sérieux revers dans la relation énergétique de longue date entre nos deux pays », a-t-il laissé tomber. Selon Joe Oliver, la multiplication des pipelines transportant de l’or noir permet d’accroître «l’indépendance énergétique de l’Amérique du Nord».

Le gouvernement Harper ne tarit pas d’éloges lorsque vient le temps de faire la promotion de l’exploitation des sables bitumineux. Il vient d’ailleurs de lancer un appel pour des projets de recherche dans lequel il présente cette source d’énergie fossile comme des «ressources renouvelables», a constaté Le Devoir.

La production des sables bitumineux doit doubler au cours des prochaines années, d’où la nécessité de trouver de nouveaux marchés pour cet or noir. C’est d’ailleurs en partie pour cette raison qu’Enbridge entend inverser le flux dans son pipeline, qui part du sud de l’Ontario pour se rendre dans l’est de Montréal. Il sera alors possible de transporter du brut albertain jusqu’en sol québécois. TransCanada souhaite aussi convertir un gazoduc en oléoduc pour transporter du pétrole albertain jusqu’au Québec. Le gouvernement Marois s’est montré intéressé par les deux projets.

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