Une croissance en plein boom relance la pression sur le yuan

Pékin — La croissance de l'économie chinoise caracole toujours sur un rythme effréné, avec une progression de 9,5 % l'an sur le premier semestre, relançant les pressions pour une réévaluation du yuan afin d'endiguer les flots de marchandises sur les économies occidentales.
Le Bureau national des statistiques (BNS) a annoncé hier que le produit intérieur brut (PIB) de la Chine s'était élevé entre janvier et juin à 6742,2 milliards de yuans (992,3 milliards $CAN), soit une progression de 9,5 % en rythme annualisé. C'est bien au-delà de ce qui était attendu par les analystes et largement supérieur aux projections des autorités.Pékin «va continuer à appliquer les mesures de contrôle macro-économiques [anti-surchauffe, administratives ou monétaires] décidées par le gouvernement central», a précisé le porte-parole du BNS, Zheng Jingping.
Aucune mesure de ralentissement n'a été cependant avancée en dépit de ce rythme de croissance qui dépasse l'objectif gouvernemental fixé à 8 %.
Débat relancé
L'envolée de la croissance chinoise relance le débat sur la parité du yuan face aux grandes devises comme le dollar, le yen ou l'euro. Les partenaires commerciaux de la Chine que sont les États-Unis, le Japon ou l'Union européenne estiment que la sous-évalusation du yen pénalise leur économie en procurant aux marchandises chinoises un avantage compétitif artificiel.
Des analystes ont estimé hier que le rythme accéléré de la croissance devrait permettre à la Chine d'avancer sur le dossier de la réévaluation du yuan.
«Nous continuons à considérer qu'une réforme du taux de change incluant une réévaluation et l'arrimage à un panier de devises est imminente», a estimé hier un économiste de la banque d'investissement ING Barings à Hong Kong, Tim Condon.
Le yuan est lié depuis 1997 au dollar américain par un taux quasi fixe d'environ 8,28 pour un billet vert.
«Il vaut mieux s'orienter vers un régime de taux de change flexible lorsque l'économie est forte que lorsqu'elle est faible. La force des derniers chiffres laisse penser que le moment est bon pour démarrer le processus», a pour sa part affirmé Rob Subbaraman, économiste chez Lehman Brothers à Tokyo.
George W. Bush n'a pas attendu la publication des chiffres de la croissance chinoise pour dénoncer les déséquilibres économiques créés par ce taux de change du yuan.
«Nous avons quelques difficultés sur le plan commercial avec la Chine. Et l'une des difficultés est sa monnaie», a déclaré mardi George W. Bush tout en soulignant que les États-Unis collaboraient «avec les Chinois pour les convaincre de l'importance de changer la manière dont ils évaluent leur monnaie».
Garde-fous
L'économie chinoise avance en dépit des garde-fous décidés en avril 2004 par le gouvernement central pour éviter une surchauffe. Pékin avait alors été alerté par l'envol de 43 % l'an des investissements en capital fixe sur le premier trimestre. Ces investissements explosent toujours même si le rythme est maintenant revenu à 25,4 % sur les premiers six mois cette année.
Pour Huang Yiping, économiste chez Citigroup à Hong Kong, «la clé de tous les problèmes est le surinvestissement». C'est en effet le signe précurseur d'une dynamique économique sur les prochains mois mais également le risque d'un déséquilibre entre les différents secteurs de l'économie.
M. Zheng a jugé que les investissements «sont trop importants et leur structure irrationnelle». Aussi, a-t-il dit, un des dangers pour l'économie chinoise est l'augmentation trop faible du revenu des paysans.
«L'efficacité économique de certaines industries n'est pas aussi bonne que l'an dernier et la situation concernant l'offre en matière de charbon, d'électricité, de pétrole et de transports continue à être tendue», a-t-il ajouté.
Ces signaux n'ont pas empêché la principale agence de notation internationale, Standard and Poor's, de relever les notes de la dette chinoise en qualifiant la perspective de «positive». Preuve de la confiance des investisseurs internationaux dans le potentiel économique de la Chine.