La Banque du Canada hausse son taux directeur à 4,75%

La Banque du Canada a expliqué que son conseil de direction avait déterminé que les taux d’intérêt n’étaient pas assez élevés pour rééquilibrer l’économique et ramener l’inflation annuelle à sa cible de 2,0 %.
Sean Kilpatrick La Presse canadienne La Banque du Canada a expliqué que son conseil de direction avait déterminé que les taux d’intérêt n’étaient pas assez élevés pour rééquilibrer l’économique et ramener l’inflation annuelle à sa cible de 2,0 %.

De plus en plus « inquiète » que l’inflation « reste coincée nettement au-dessus de [sa] cible de 2 % », la Banque du Canada reprend la remontée de ses taux d’intérêt.

La banque centrale canadienne a été forcée d’admettre, mercredi, que l’augmentation du coût de la vie et l’économie en général restent plus fortes qu’elle ne le prévoyait après sa hausse marquée du loyer de l’argent l’an dernier. Aussi a-t-elle décidé de mettre, sans plus attendre, un terme à la pause qu’elle s’était imposée au début de l’année, et a repris le relèvement de son taux directeur en le remontant d’un quart de point de pourcentage, de 4,5 % à 4,75 %.

C’est le niveau le plus élevé depuis avril 2001. C’est surtout 4,25 points de pourcentage de plus qu’au moment où l’envolée de l’inflation l’a amenée à procéder à la première de huit hausses de taux d’intérêt consécutives en mars 2022. Cette séquence s’était interrompue à la fin du mois de janvier dernier, lorsque la Banque du Canada avait dit vouloir marquer une pause afin de déterminer l’efficacité de ce resserrement monétaire.

Or, l’économie canadienne se révèle « plus vigoureuse » qu’elle ne le prévoyait encore au mois d’avril, avec, notamment, un rythme de croissance annualisé de 3,1 % au premier trimestre. « La progression de la consommation a été étonnamment forte et généralisée », note-t-elle. Même les dépenses généralement sensibles aux taux d’intérêt « ont augmenté », de même que « l’activité sur le marché du logement s’est raffermie ».

Le marché du travail, de son côté, « demeure tendu : preuve que la forte demande de main-d’oeuvre se maintient ».

Tout cela ne manque pas de se répercuter sur l’inflation. L’indice des prix à la consommation (IPC) a même légèrement augmenté en avril, pour la première fois en dix mois, à 4,4 %, malgré la baisse des prix de l’énergie. La Banque du Canada s’attend toujours à ce que cette variation des prix sur 12 mois « descende autour de 3 % cet été » à mesure, notamment, que les fortes hausses de prix de l’an dernier sortiront du calcul.

« Cependant, comme les mesures de l’inflation fondamentale sur trois mois se maintiennent entre 3,5 % et 4 % depuis plusieurs mois et que la demande excédentaire persiste, on s’inquiète davantage de la possibilité que l’inflation mesurée par l’IPC reste coincée nettement au-dessus de la cible de 2 %. »

Toutes ces données ont amené la Banque à conclure « que la politique monétaire n’était pas suffisamment restrictive pour rétablir l’équilibre entre l’offre et la demande et assurer un retour durable à la cible d’inflation de 2 % ».

D’autres hausses à venir ?

Conscients que la tendance n’allait pas dans la direction souhaitée par la banque centrale canadienne, la plupart des observateurs étaient partagés, avant son annonce de mercredi matin, entre ceux qui s’attendaient à une hausse de taux immédiate et ceux qui pensaient que l’institution attendrait au moins jusqu’à sa prochaine décision, prévue le mois prochain.

La progression de la consommation a été étonnamment forte et généralisée

 

Ces derniers faisaient entre autres valoir qu’elle laisserait ainsi plus de temps à l’économie pour réagir à ses premières hausses qui mettent, selon elle, entre 18 et 24 mois à produire leur effet. Cela lui aurait permis également de faire coïncider l’annonce d’une éventuelle hausse de taux avec le dévoilement de son prochain portrait d’ensemble de la situation économique au Canada, ainsi qu’avec la conférence de presse de son gouverneur, Tiff Macklem, qui l’accompagne chaque fois. Mais la Banque ne pouvait apparemment pas attendre.

La suite des choses dépendra de l’évolution de la situation sur le terrain, a écrit dans une brève analyse l’économiste Josh Nye, de la Banque Royale. De nombreuses nouvelles données sur l’emploi, l’inflation et la croissance économique sont attendues d’ici la prochaine décision de la Banque du Canada, le 12 juillet.

Son ton, mercredi, ne laisse toutefois pas croire qu’elle se contentera d’une seule hausse de 0,25 point de pourcentage, ont observé Taylor Schleich et Warren Lovely, de la Banque Nationale. Une éventuelle deuxième hausse pourrait venir dès le mois prochain, selon Benjamin Reitzes, de la Banque de Montréal, et James Orlando, de la Banque TD. Cette nouvelle hausse en juillet pourrait même être suivie par deux autres en septembre et en octobre au besoin, prévient Sébastien Lavoie, de la Banque Laurentienne.

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