Un carrefour de technologies de la santé verra le jour près du centre-ville de Montréal

Le maire de l’arrondissement, Luc Rabouin, estime que l’arrivée du nouveau centre réanimera le quartier Milton-Parc.
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir Le maire de l’arrondissement, Luc Rabouin, estime que l’arrivée du nouveau centre réanimera le quartier Milton-Parc.

Le géant montréalais de la médecine de précision CellCarta et la société immobilière Jadco ont annoncé jeudi un investissement de 350 millions de dollars pour transformer l’ancien Institut thoracique de Montréal en un centre international de recherche spécialisé dans les sciences de la vie et des technologies de la santé.

L’investissement s’étendra sur environ cinq ans et transformera les immeubles situés juste au sud de l’avenue des Pins sur la rue Saint-Urbain, dans le quartier Plateau-Mont-Royal, qui composaient auparavant l’Institut thoracique, affilié au Centre universitaire de santé McGill (CUSM). À la demande de l’arrondissement, certaines façades et certains éléments architecturaux seront conservés, mais l’objectif est d’élever le bâtiment final à une hauteur similaire à celle de l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM), situé juste en face sur Saint-Urbain.

Cet investissement entièrement privé réjouit le maire de l’arrondissement, Luc Rabouin. « C’était important pour moi d’avoir ce nouveau centre dans mon arrondissement, dans un quartier un peu délaissé. C’est un secteur d’activité important économiquement pour Montréal. »

L’arrivée de centaines de professionnels de haut niveau réanimera selon lui le quartier Milton-Parc, juste à côté, et un bout du boulevard Saint-Laurent. Luc Rabouin ne craint pas un effet de gentrification similaire à celui produit par la création d’un pôle de recherche en intelligence artificielle (IA) dans Parc-Extension. « Le quartier Milton-Parc compte la plus forte concentration de coopératives d’habitation au Canada, une grande partie des immeubles est protégée, on s’assurera qu’il reste des logements à coût abordable dans le secteur. »

Inspire bio innovations

 

Le projet, officiellement appelé Inspire bio innovations, se fera en deux phases. La première consiste à rénover les lieux pour accueillir le siège social de CellCarta, présentement situé dans le Complexe des sciences Pierre-Dansereau de l’UQAM. La deuxième phase s’amorcera plus tard cette année et s’étirera jusqu’en 2025. Elle vise à regrouper au même endroit des chercheurs, des jeunes pousses et des entreprises spécialisées dans les technologies de la santé et la recherche médicale de pointe.

Normand Rivard, directeur associé de la Corporation immobilière Jadco, se réjouit de la localisation de son nouveau complexe. Il répond à une demande répétée du secteur québécois de la santé de se rapprocher du centre-ville, de ses hôpitaux et de ses universités. Le projet s’inspire de ce qui a fait la renommée de Boston, notamment.

« Les chercheurs et les investisseurs veulent tous des laboratoires en ville, ce qui n’existait pas, dit au Devoir Normand Rivard. C’est la chance de développer un centre comme il en existe à Toronto et à Boston. »

« On a déjà un partenaire d’ancrage en CellCarta, qui pourra accompagner des jeunes pousses à développer de nouvelles solutions. À côté de l’IRCM, nous sommes au coeur de la recherche médicale, avec le Centre hospitalier de l’Université de Montréal et le CUSM, on pense qu’on peut attirer des projets innovateurs dans nos murs et y créer un accélérateur d’innovation qui sera vraiment unique. »

Les chercheurs et les investisseurs veulent tous des laboratoires en ville, ce qui n’existait pas

CellCarta se recentre

Peu connue du grand public, CellCarta est une multinationale de 1050 employés — dont 350 à Montréal — qui se spécialise dans la médecine de précision. Autrefois connue sous le nom de Caprion, l’entreprise, dont le principal investisseur est la firme new-yorkaise Arsenal Capital Partners, compte onze laboratoires sur quatre continents. Comme ses principaux dirigeants se trouvent à Montréal, il était essentiel pour elle de se doter d’un siège social d’envergure.

« C’était important de consolider nos activités à Montréal, explique le cofondateur et chef de la direction de CellCarta, Martin LeBlanc. Nous avons commencé ici. Nous continuons de croire que Montréal est un endroit favorable pour le genre de recherche qu’on effectue en immunologie, en protéomique, et autres. L’expertise institutionnelle de Montréal est difficile à trouver ailleurs. »

La médecine de précision est un secteur des sciences de la santé qui connaît une forte croissance à l’heure actuelle. CellCarta, dont le chiffre d’affaires annuel surpasse les 100 millions, a d’ailleurs doublé de taille en quatre ans. La médecine de précision prend la forme de soins spécialisés et personnalisés qui permettent de mieux traiter les patients atteints de maladies graves, comme des cancers. Cela touche à des domaines comme l’oncologie, les maladies infectieuses et les neurosciences.

Une des raisons expliquant l’essor de ce type de médecine est l’utilisation de plus en plus importante des données massives et de l’intelligence artificielle. La proximité géographique entre ses nouveaux locaux et le Mila, un centre de recherche spécialisé en IA situé à quelques intersections de là, n’échappe pas au grand patron de CellCarta.

« Avec la complexité avancée des nouveaux médicaments et la découverte des biomarqueurs, le traitement des données est plus exigeant et plus multidisciplinaire, dit Martin LeBlanc. Ça prend de l’IA et toutes sortes de nouvelles techniques d’analyse. On ne peut pas ne pas s’y intéresser, d’autant plus que nous sommes à Montréal des leaders en IA. »

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