Rogers autorisé à acquérir Shaw

Le rachat de Shaw par Rogers pour 26 milliards de dollars a franchi le dernier obstacle réglementaire, vendredi, plus de deux ans après la première annonce de l’accord.
Le ministre fédéral de l’Industrie, François-Philippe Champagne, a approuvé le transfert des licences sans fil de Freedom Mobile, propriété de Shaw, à Québecor, ce qui ouvre la voie à la conclusion de l’entente.
L’accord devait initialement être conclu d’ici juin 2022. Les trois entreprises ont déclaré, vendredi, qu’elles comptaient conclure la transaction d’ici le 7 avril.
« Faire baisser les prix »
Le ministre Champagne affirme qu’Ottawa a obtenu 21 engagements juridiquement contraignants de la part de Rogers et de Vidéotron pour renforcer la concurrence dans le secteur et « faire baisser les prix ».
« Si l’une ou l’autre des parties contrevient à l’un ou l’autre de ces engagements, elle s’exposera à d’importantes pénalités financières, jusqu’à 200 millions de dollars pour Vidéotron et jusqu’à 1 milliard dans le cas de Rogers », a déclaré le ministre en conférence de presse.
Rogers et Shaw avaient convenu en juin 2022 de vendre Freedom Mobile à Vidéotron pour 2,85 milliards de dollars dans le but d’atténuer les problèmes de concurrence soulevés par la proposition initiale.
M. Champagne a assuré qu’Ottawa veillerait à ce qu’un « quatrième joueur national puisse affronter les trois grands et faire baisser les prix ».
Le ministre a d’ailleurs averti que si les prix ne baissaient pas de façon marquée dans un délai raisonnable, il solliciterait « d’autres pouvoirs législatifs et réglementaires » pour y arriver.
M. Champagne n’a pas précisé ce qu’il pourrait faire exactement. « Tout est sur la table », a-t-il insisté.
D’ailleurs, le ministre a assuré que le Québec trouverait son compte dans l’entente.
« Vous allez me dire : “Mais les licences de Freedom Mobile sont en Ontario, en Alberta, en Colombie-Britannique.” […] Ce qu’on sait, c’est que quand on amène un quatrième joueur national dans l’équation, c’est que ça a une tendance à faire baisser les prix pour tout le monde », a-t-il soutenu.
Myriade de conditions
Les conditions comprennent l’établissement par Rogers d’un deuxième siège social à Calgary et l’ajout de 3000 nouveaux emplois dans l’Ouest canadien « dans les prochains mois », qu’il faudra maintenir pendant au moins dix ans.
L’entreprise doit également dépenser 5,5 milliards de dollars pour étendre la couverture 5G et des services réseau supplémentaires, ainsi qu’un milliard supplémentaire pour connecter les communautés rurales, éloignées et autochtones.
De son côté, Vidéotron doit offrir des forfaits inférieurs d’au moins 20 % à ceux de ses compétiteurs et dépenser 150 millions de dollars au cours des deux prochaines années pour mettre à niveau le réseau de Freedom Mobile. Il lui est interdit de transférer des licences Freedom Mobile pendant une décennie.
Un achat à grande échelle de Shaw par Rogers avait soulevé des problèmes de concurrence, et l’accord initial a été révisé pour inclure la vente de Freedom Mobile à Vidéotron.
Le ministre Champagne a également annoncé que son ministère lancerait un « examen complet du cadre de transfert du spectre du Canada ».
Un long processus réglementaire
En janvier, la Cour d’appel fédérale a rejeté la demande du Bureau de la concurrence d’annuler l’entente.
Le régulateur avait fait valoir que l’approbation de la fusion réduirait la concurrence et entraînerait une augmentation des factures de téléphonie mobile, un service de qualité médiocre et moins d’options pour les consommateurs. Il espérait que le tribunal supérieur annulerait une décision antérieure du Tribunal de la concurrence en faveur de l’entente.
La cour s’est plutôt ralliée à l’opinion du tribunal selon laquelle « il n’y avait pas de diminution substantielle de la concurrence » à risque.
Les entreprises avaient déjà tenté de sortir de l’impasse avec le Bureau de la concurrence par la médiation au cours de l’été et de l’automne derniers, mais ce processus avait échoué.
Éliminant un autre obstacle réglementaire, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) avait approuvé l’acquisition par Rogers des services de radiodiffusion de Shaw en mars 2022 sous certaines conditions.
Dans le cadre de l’entente, Rogers acquerra 16 services de câblodistribution de l’Ouest canadien, un service national de télévision par satellite et d’autres services de diffusion et de télévision.