Les Allemands baissent le chauffage pour faire face à la crise énergétique

La tour de télévision de Berlin sur la place Alexandre est photographiée à côté d'un réverbère, en Allemagne, en Novembre.
Photo: Tobias Schwarz Agence France-Presse La tour de télévision de Berlin sur la place Alexandre est photographiée à côté d'un réverbère, en Allemagne, en Novembre.

Au Centre de conseils aux consommateurs de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, comme dans tous les organismes similaires d’Allemagne, les demandes d’aide au sujet des prix de l’énergie ont explosé dans les derniers mois.

« La majorité des gens qui appellent ne sont tout simplement pas capables de payer leurs factures, indique Kolja Ofenhammer, conseiller au centre. Plusieurs personnes subissent des coupures de courant. »

En plein hiver, cela peut signifier de grelotter dans son appartement. L’équipe de M. Ofenhammer les accompagne dans leur tentative d’obtenir des prêts, des options de paiements ou un fournisseur plus avantageux.

À lire aussi

Ce texte est publié via notre section Perspectives.

M. Ofenhammer s’attend à ce que la situation continue d’empirer en 2023, à mesure que les consommateurs recevront leurs factures annuelles d’électricité et de gaz. Au banc des accusés se trouve la flambée des prix du gaz naturel, avec lequel environ la moitié des ménages allemands chauffent leurs demeures.

« Huit fois plus cher »

Les ménages ont subi une hausse des prix d’environ 20 % entre 2020 et 2021, d’après les chiffres de la BDEW, l’organisation allemande de l’industrie de l’énergie et de l’eau.

« Pendant la deuxième moitié de 2021, nous avons constaté que le prix du gaz grimpait sur les marchés boursiers, raconte Thomas Engelke, expert en énergie pour la Fédération des organisations de consommateurs d’Allemagne. Ça nous a alarmés parce qu’on savait que ces prix élevés se rendraient jusqu’aux consommateurs. »

Durant la première moitié de 2022, les prix ont, en moyenne, plus que doublé, puis presque triplé au cours de la deuxième moitié de cette même année par rapport à 2021. Dans certains cas, les consommateurs payent huit fois plus cher qu’avant, constate M. Engelke. C’est au même moment, dans le contexte de la guerre en Ukraine et des sanctions européennes, que le gaz naturel en provenance de la Russie a progressivement arrêté d’atteindre l’Allemagne. L’électricité, de son côté, est aujourd’hui en moyenne 50 % plus chère pour les ménages et 100 % plus élevée pour les entreprises qu’en 2021.

Aides et transition énergétique

Selon l’Association allemande des chambres de commerce et d’industrie, cette crise énergétique menace l’existence de compagnies dans tous les secteurs économiques. Les travailleurs, eux, sont nombreux à s’inquiéter pour leurs emplois, d’après l’importante fédération syndicale DGB.

Pour soutenir ses citoyens et ses industries, le gouvernement vient d’imposer un plafond aux prix que les fournisseurs d’énergie peuvent demander à leurs clients, se chargeant de payer la différence. Malgré cela, les prix restent beaucoup plus élevés qu’avant.

En réaction, les Allemands ont systématiquement diminué de quelques degrés la température dans les domiciles et les bureaux. « Les gens portent des vêtements plus chauds à la maison, remarque M. Engelke. Certains locaux de mon employeur ont été fermés et nous avons commencé à partager nos bureaux avec d’autres collègues pour économiser de l’énergie. »

Par diverses mesures, les ménages et les entreprises ont baissé significativement leur utilisation de gaz naturel. Par exemple, leur consommation la semaine dernière était inférieure de 26,3 % à la consommation moyenne des années 2018 à 2021, selon l’Agence fédérale des réseaux.

Ce contexte difficile pousse l’Allemagne à accélérer sa transition énergétique pour se débarrasser de sa dépendance aux énergies fossiles, croit M. Engelke. Parmi les solutions à moyen et long terme mises de l’avant : remplacer les systèmes de chauffage pour qu’ils fonctionnent avec des énergies renouvelables, isoler les bâtiments pour les rendre écoénergétiques et produire davantage d’électricité verte. Lors d’une visite dans la plus grande économie d’Europe, Le Devoir a constaté qu’un sentiment d’urgence anime plusieurs citoyens, entrepreneurs et élus.

Ce reportage a été financé grâce au soutien du Fonds de journalisme international Transat-Le Devoir.



À voir en vidéo