Airbnb supprimera toutes les annonces illégales au Québec mardi prochain

Afin de louer légalement un logement à court terme sur des plateformes comme Airbnb, les Québécois doivent d’abord s’assurer de respecter la réglementation municipale en vigueur dans leur secteur, avant de pouvoir obtenir un numéro d’enregistrement de la CITQ.
Lionel Bonaventure Agence France-Presse Afin de louer légalement un logement à court terme sur des plateformes comme Airbnb, les Québécois doivent d’abord s’assurer de respecter la réglementation municipale en vigueur dans leur secteur, avant de pouvoir obtenir un numéro d’enregistrement de la CITQ.

La multinationale Airbnb supprimera mardi prochain toutes les annonces de locations à court terme de logements sur sa plateforme qui ne respectent pas la réglementation en vigueur au Québec. Une décision saluée de toutes parts, mais qui ne sera pas suffisante en soi pour mettre fin au problème des locations touristiques illégales, selon un expert.

Cette décision de la multinationale survient un peu plus d’une semaine après qu’un incendie mortel a ravagé, le 16 mars, un bâtiment patrimonial du Vieux-Montréal où se trouvaient des logements loués à court terme sur des plateformes de type Airbnb, en contravention avec les réglementations municipale et provinciale.

Dans la foulée de cet événement, qui a fait des vagues à l’Assemblée nationale, le directeur régional d’Airbnb, Nathan Rotman, a rencontré jeudi la ministre du Tourisme, Caroline Proulx. Une rencontre qui semble avoir été concluante, puisque dans une lettre adressée à la ministre vendredi et dont Le Devoir a obtenu copie, M. Rotman s’est engagé à supprimer « dans l’ensemble de la province » les annonces existantes qui n’incluent pas un numéro d’enregistrement à la Corporation de l’industrie touristique du Québec (CITQ).

Afin de louer légalement un logement à court terme sur des plateformes comme Airbnb, les Québécois doivent d’abord s’assurer de respecter la réglementation municipale en vigueur dans leur secteur, puis obtenir un numéro d’enregistrement de la CITQ.

Or, des milliers d’annonces sur la plateforme Airbnb ne comprennent pas ce numéro d’enregistrement, pourtant obligatoire en vertu de la Loi sur l’hébergement touristique. Selon le site Inside Airbnb, 92,5 % des quelque 13 900 annonces sur la plateforme Airbnb à Montréal sont illégales, soit parce qu’elles contreviennent à la réglementation mise en place par plusieurs arrondissements qui limitent les secteurs où ce type de locations sont permises, ou encore parce qu’elles n’ont pas obtenu les autorisations requises de la part de Québec.

Afin de remédier à cette situation, Airbnb s’engage à ajouter « un champ exigeant un numéro d’enregistrement pour toutes les nouvelles annonces » dans la province, ajoute la lettre de M. Rotman. « Les hôtes qui ne remplissent pas ce champ verront leurs annonces supprimées », assure-t-il.

Caroline Proulx « satisfaite »

Ces engagements d’Airbnb vont ainsi dans le même sens que les changements réglementaires que la ministre Proulx s’est engagée lundi dernier à mettre en place dans les prochains mois afin de contrer le phénomène des locations à court terme illégales. Il faut cependant rappeler que plusieurs autres plateformes de ce genre existent, même si Airbnb est la plus connue.

« La décision d’Airbnb de se conformer à la loi et de retirer les annonces illégales de son site s’imposait », a réagi vendredi sur Twitter la mairesse de Montréal, Valérie Plante, qui estime que cette mesure était nécessaire pour s’attaquer à « la crise du logement ». « Nous invitons d’ailleurs les autres plateformes à retirer, elles aussi, les annonces illégales », a ajouté la mairesse.

Car, « si tout le monde migre vers une autre plateforme, on va se retrouver avec le même problème », note le porte-parole du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, Cédric Dussault, en entrevue au Devoir.

Par écrit, la ministre Caroline Proulx s’est pour sa part dite « satisfaite » de la décision d’Airbnb « de se conformer à notre législation ». « Je demande également aux autres plateformes à s’y conformer », ajoute la ministre, qui conserve d’ailleurs son intention de « resserrer la Loi sur l’hébergement touristique ».

« C’est une bonne nouvelle pour la protection du parc locatif. Ça pourrait même ramener des logements qui avaient quitté le marché locatif traditionnel dans un contexte où il y a un déséquilibre entre l’offre et la demande », s’est également réjoui vendredi le directeur des Affaires publiques de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, Marc-André Plante.

Pas la panacée

 

Dans un message transmis vendredi à ses hôtes, la multinationale a informé ceux-ci que « toutes les annonces de location à court terme sans numéro d’enregistrement sur Airbnb seront désactivées le mardi 28 mars ».

Les hôtes qui changeront leurs paramètres pour n’offrir que des locations de 31 jours ou plus pourront toutefois conserver leurs annonces, même s’ils n’ont pas obtenu un numéro d’enregistrement de la CITQ. Il ne faut pas donc pas s’attendre à ce que des milliers d’annonces sur Airbnb disparaissent dans les prochains jours, analyse le professeur d’urbanisme à l’Université McGill David Wachsmuth. Ce dernier a contribué en 2021 à une étude qui fait état de la conversion dans les dernières années de près de 5000 logements locatifs traditionnels aujourd’hui loués à court terme sur Airbnb.

« On pourrait penser qu’Airbnb pourrait convertir toutes les locations à court terme illégales pour qu’elles deviennent des locations de 31 jours et plus. C’est ce qui a été fait ailleurs » dans les dernières années, relève M. Wachsmuth, en citant les cas de Toronto et de Los Angeles, où plusieurs locations qui étaient illégales sont maintenant offertes pour 28 jours ou plus. Reste à voir, ajoute-t-il, si ces logements seront vraiment loués par la suite à long terme sur la plateforme. « C’est difficile d’en être certain », avance-t-il.

En d’autres mots, cette annonce d’Airbnb est « une première étape », mais elle devra être suivie d’autres mesures de la part du gouvernement afin que les plateformes de location à court terme cessent de contribuer à l’effritement du marché locatif, résume l’expert.

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