À quoi s’attendre de la nouvelle baisse d’impôt promise par le gouvernement Legault?

Le ministre des Finances, Eric Girard, a participé lundi à l’habituelle prise de photos qui se déroule le jour précédant le dépôt du budget, avec en mains le document.
Jacques Boissinot La Presse canadienne Le ministre des Finances, Eric Girard, a participé lundi à l’habituelle prise de photos qui se déroule le jour précédant le dépôt du budget, avec en mains le document.

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La baisse d’impôt promise par la Coalition avenir Québec lors de la campagne électorale de l’automne dernier devrait — selon toute vraisemblance — se matérialiser mardi, lorsque le gouvernement Legault déposera le premier exercice budgétaire de ce second mandat.

Alors, à quoi peut-on s’attendre ?

Québec devrait baisser d’un point de pourcentage les taux du premier palier et du second palier d’imposition sur le revenu des particuliers. C’est du moins ce qui a été promis. On ne peut toutefois pas complètement exclure que le gouvernement fasse des changements.

Le ministère des Finances a notamment consulté des experts, dont ceux de la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke, pour savoir quelle serait la meilleure façon de réduire l’impôt sur le revenu des particuliers. Reste à voir ce que le gouvernement fera des recommandations qu’il a reçues.

Cette mesure est-elle équitable ?

La question fait débat, car ce ne sont pas uniquement les bas et les moyens revenus qui bénéficieront de cette mesure, mais bien l’ensemble des Québécois qui paient de l’impôt, y compris ceux qui gagnent plus de 100 000 $ par année.


Pour comprendre, rappelons brièvement le fonctionnement des paliers d’imposition. Si vous avez un revenu imposable de 100 000 $, votre première tranche de 49 275 $ sera imposée au taux du premier palier (actuellement 15 %). Ensuite la portion de votre revenu située entre 49 275 $ et 98 540 $ sera imposée au taux du second (20 %), et enfin la troisième entre 98 540 $ et votre revenu de 100 000 $, sera imposée au taux du troisième (24 %).

Donc : tous ceux qui paient de l’impôt profiteraient de la baisse d’impôt. Mais tous n’en bénéficieraient pas de la même façon…


Par exemple, une personne célibataire vivant seule avec un revenu imposable de 20 000 $ bénéficiera d’une économie d’impôt de 8 $, l’équivalent d’une baisse d’impôt de 6,7 %. Une personne qui gagne 100 000 $ recevra quant à elle une économie d’impôt de 814 $, soit une baisse d’impôt de 5,4 %.

Si le gouvernement va de l’avant avec une baisse d’impôt, la Chaire en fiscalité proposerait plutôt d’ajouter un cinquième palier d’imposition et de modifier la grille des taux — afin d’augmenter l’économie d’impôt de ceux qui gagnent entre 50 000 $ et 90 000 $ et d’amoindrir l’économie d’impôt de ceux qui gagnent plus de 92 000 $ et donc de rendre la mesure plus équitable.

Du côté de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), on demande tout simplement de renoncer à cette baisse d’impôt — soit pour mieux financer les services publics, soit pour consacrer cet argent à la lutte contre les changements climatiques, ou encore pour mieux cibler l’aide fiscale vers les ménages les plus fortement affectés par l’inflation (par exemple grâce à des chèques non récurrents).

Dans une récente étude sur le sujet, des chercheurs de l’IRIS soulignent notamment que la proposition de la CAQ ne bénéficiera pas aux Québécois les moins nantis, c’est-à-dire à ceux qui gagnent moins de 17 183 $ et qui ne paient pas d’impôt.

Comment sera financée la baisse d’impôt de la CAQ ?

Cette baisse d’impôt coûterait à l’État québécois 1,85 milliard de dollars par année et serait financée par une réduction des versements prévus au Fonds des générations (destiné au remboursement de la dette) pour les années à venir.

En d’autres termes, pour financer une baisse de revenus (découlant de la baisse d’impôt), le gouvernement ne réduira pas ses dépenses (ex. : en santé ou en éducation), mais consacrera chaque année moins d’argent à rembourser sa dette.

Est-ce risqué ? « Nous, ce qu’on va surveiller, c’est si le gouvernement est capable d’atteindre une cible dans un horizon de 10 à 15 ans, tout en réduisant les versements. Pour nous, c’est une condition préalable à une baisse d’impôt », indique Luc Godbout, de la Chaire en fiscalité.

« Si le gouvernement va de l’avant avec cette mesure, les changements qui devront être apportés à la Loi [sur la réduction de la dette et instituant le Fonds des générations] devront également être précisés », indique par ailleurs sa collègue Suzie St-Cerny.

 
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