Martin Juneau fait ses adieux au Pastaga

Le chef Francis Duval du restaurant Pastaga prépare la première assiette du soir, des raviolis au lapin et ricotta.
Photo: Hubert Hayaud Le Devoir Le chef Francis Duval du restaurant Pastaga prépare la première assiette du soir, des raviolis au lapin et ricotta.

Martin Juneau vivra samedi soir ses derniers moments à la tête du restaurant Pastaga, à Montréal, à l’occasion du réveillon de la Saint-Sylvestre qu’il a organisé. Après 11 ans, son collègue Louis-Philippe Breton et lui passeront le flambeau à un nouveau couple de propriétaires.

Après ce départ, quel titre faudra-t-il accoler à M. Juneau, qui a été chef cuisinier et qui s’est fait connaître dans plusieurs émissions culinaires télévisées ? « C’est une très bonne question. Martin Juneau, humain ? » répond-il en rigolant, faisant notamment référence à son rôle de père de trois filles auquel il souhaite désormais consacrer ses efforts. Sa vie professionnelle est malgré tout loin d’être terminée, puisque ce passionné de vins nature reste propriétaire d’une agence d’importation de vins et d’un café-traiteur nommé Tricot principal.

Mais le Pastaga, son deuxième restaurant à vie, occupait une grande partie de son quotidien. Trop grande même. Selon lui, la vie de famille et celle de restaurateur sont très peu compatibles. Il y a les horaires de soir, la probabilité d’être dérangé à tout moment pour régler un problème et l’impossibilité de décrocher. « Quand j’étais au resto, je pensais à ma famille, et quand j’étais avec ma famille, je pensais au resto », illustre-t-il en entrevue, avant de se mettre en route pour la garderie. C’est un problème, d’autant plus que, selon lui, la clé du succès en restauration est d’avoir un propriétaire très présent sur le terrain.

Par ailleurs, la pandémie a redonné de la visibilité au restaurant, qui n’était plus « la saveur du moment », selon lui. Lui et son équipe s’étaient relevé les manches de façon créative en proposant très rapidement un menu pour emporter. Mais la crise a aussi été épuisante pour l’équipe du Pastaga.

C’est dans ce contexte que les deux partenaires d’affaires ont pris la décision de vendre le commerce. Et ils le font avec fierté, car M. Juneau juge que le parcours et la longévité de son restaurant sont plutôt uniques. « C’est rare de vendre un resto. D’habitude, on ferme parce qu’on est en difficulté financière », estime celui qui dit s’être ruiné la santé à travailler de longues heures dans son restaurant. « On est fiers de dire qu’on a un héritage qui va subsister et que les gens ne nous oublieront pas tout de suite. »

Une relève connue

La relève est constituée de deux anciens employés qui se sont rencontrés au Pastaga, Francis et Geneviève. Ils utiliseront dans les premiers temps l’identité du populaire restaurant, mais ils comptent par la suite la changer pour faire leur propre projet, indique M. Juneau.

Malgré cette belle perspective, le restaurateur a déjà commencé à vivre un peu de nostalgie. « Tantôt, je vidais mon casier. Ça faisait longtemps que j’accumulais des trucs. Et là, il y a plein de souvenirs — des magazines, des apparitions [médiatiques] que j’avais complètement oubliées, même des gros trucs comme le Food Wine », raconte l’auteur du livre de recettes Simplicité culinaire.

Pour le réveillon du Nouvel An, qui est, selon ses dires, « une soirée spéciale au resto », M. Juneau va « s’assurer de rendre tout le monde heureux pour une dernière fois ». Tôt le lendemain, il a prévu de partir en vacances avec ses enfants, sa copine, sa mère, sa soeur et son oncle. « J’ai l’impression que je ne pourrai pas vivre mon down. Le voyage va être un peu mon rebound. […] Ma vraie peine d’amour risque de commencer après ces vacances-là », croit l’homme de 45 ans.

Un nouveau défi professionnel se dessine déjà, dans le domaine de la consultation en alimentation, dont M. Juneau garde le secret pour le moment. À entendre son enthousiasme alors qu’il l’évoque mystérieusement, on peut deviner qu’il viendra lui remonter le moral.

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