Énergir et le géant danois Nature Energy produiront du gaz naturel renouvelable

Les usines de biométhanisation utilisent des technologies qui, grâce à la digestion anaérobie, permettent de traiter des résidus agricoles comme le lisier afin d’en soutirer le méthane. Elles seront construites « dans des régions où il va y avoir une forte densité du potentiel agricole. Ce sont de grosses usines », dit Éric Lachance.
Photo: Nature Energy Les usines de biométhanisation utilisent des technologies qui, grâce à la digestion anaérobie, permettent de traiter des résidus agricoles comme le lisier afin d’en soutirer le méthane. Elles seront construites « dans des régions où il va y avoir une forte densité du potentiel agricole. Ce sont de grosses usines », dit Éric Lachance.

Énergir se lance dans la production de gaz naturel renouvelable (GNR) en devenant partenaire de Nature Energy, géant danois de la biométhanisation récemment racheté par Shell. L’entente mènera à la construction de 10 méga-usines totalisant un investissement d’un milliard de dollars pour produire annuellement jusqu’à 200 millions de mètres cubes de GNR.

À elle seule, cette production devrait fournir le tiers du GNR nécessaire à Énergir pour respecter les normes québécoises de 2030, indique Éric Lachance,p.-d.g. de l’ancienne Gaz Métro. Les projets permettraient de réduire les émissions de CO2 d’un maximum de 400 000 tonnes, selon l’entreprise.

Les usines de biométhanisation utilisent des technologies qui, grâce à la digestion anaérobie, permettent de traiter des résidus agricoles comme le lisier afin d’en soutirer le méthane. Celles-ci seront construites « dans des régions où il va y avoir une forte densité du potentiel agricole. Ce sont de grosses usines », dit Éric Lachance. Il estime la production moyenne annuelle de chaque installation à 20 millions de mètres cubes, soit l’équivalent de ce qui est nécessaire pour chauffer près de 15 000 résidences.

Les parts des projets développés aussi bien en matière d’investissements que de revenus seraient séparées entre Énergir et Nature Energy à la hauteur de 40 % et 60 % respectivement. Des agriculteurs des régions ciblées pourraient quant à eux devenir partenaires jusqu’à la hauteur de 20 %, part qui serait retranchée à la participation des deux entreprises.

400 000 tonnes
C’est la quantité d’émissions de CO2 que le projet commun pourrait prévenir.

Ce modèle reprend celui que déploie Nature Energy en Europe où les agriculteurs possèdent généralement entre 10 % et 20 % des projets.

Le partenariat s’expliquerait par le fait qu’une partie des matières traitées retourne aux agriculteurs sous forme de digestat, une matière composée de nutriments qui remplace les engrais chimiques en agriculture.

« Le secteur agricole, c’est un secteur complexe qu’il faut amener à fédérer et qui est sous-exploité en ce qui a trait à la filière du GNR. On pense vraiment qu’on peut accélérer le développement du secteur », dit Éric Lachance, soutenant qu’avec l’entente, « on encadre mieux ce développement ».

20 millions de m3
C’est la production estimée moyenne annuelle de chaque installation, soit l’équivalent de ce qui est nécessaire pour chauffer près de 15 000 résidences.

Les projets pourront certainement compter sur l’appui du gouvernement québécois. Dans sa stratégie pour développer la filière des bioénergies, publiée au printemps, Québec prévoit investir d’ici 2026 950 millions dans les bioénergies, dont celles produites à partir de résidus agricoles.

Mais surtout, pour Énergir, le partenariat permettra d’assurer le tiers de l’approvisionnement en GNR requis d’ici 2030. Rappelons qu’un règlement québécois mis en place en 2019 exige des distributeurs de gaz qu’ils livrent 5 % de leurs volumes en GNR pour l’année financière commençant en octobre 2025, et 10 % pour l’année financière commençant en octobre 2030.

« La filière du GNR, c’est le socle de notre stratégie de décarbonation, note Éric Lachance. En devenant partenaire dans des actifs de production, nous sommes amenés à diversifier nos activités, ce qui nous assure de nouvelles sources de revenus. »

Depuis plus d’un an, Nature Energy étudie activement une dizaine de sites potentiels dans la province. L’entreprise, qui a implanté sa première usine de biogaz en 2015, s’est appuyée sur une particularité du Danemark pour assurer son développement : le pays détient l’une des plus fortes densités d’élevages au monde. On y dénombre plus de 13 millions de porcs pour 5,8 millions de citoyens ; au Québec, on élève environ 7 millions de porcs pour une population de près de 8,5 millions.

« C’est notre plus important investissement en dehors du Danemark », dit pour sa part Ole Hvelplund, p.-d.g. de Nature Energy, soutenant qu’il s’agit « d’un match parfait » qui pourrait à terme mener à la construction de davantage de sites de production de GNR. À l’instar du modèle d’affaires et de financement, les infrastructures seront semblables à celles de l’Europe en termes de production : « Nous ferons quelques changements pour répondre aux particularités québécoises, mais, pour l’essentiel, on réplique un modèle qu’on a standardisé au Danemark. »

Le secteur agricole, c’est un secteur complexe qu’il faut amener à fédérer et qui est sous-exploité en ce qui a trait à la filière du GNR. On pense vraiment qu’on peut accélérer le développement du secteur.

 

Dans une précédente entrevue au Devoir, Nature Energy soutenait vouloir ouvrir une dizaine d’usines chaque année d’ici 2025, à l’échelle mondiale. Déjà, elle transforme annuellement plus de 4,4 millions de tonnes de déchets organiques en 158 millions de mètres cubes de biométhane. 

Nature Energy a déjà annoncé la construction d’une usine de biométhanisation à Farnham, en Estrie. Celle-ci doit transformer annuellement 600 000 tonnes de déchets organiques pour produire 20 millions de mètres cubes de biométhane. Une initiative de même taille et de même capacité est aussi projetée à Louiseville, en Mauricie.

La compagnie danoise annonçait à la fin novembre avoir conclu un accord en vertu duquel Shell fera l’acquisition de 100 % de la Société pour une valeur de près de deux milliards de dollars américains.

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