Hydro espère toujours l'abolition du bloc d'électricité patrimoniale

Si Hydro-Québec vendait l'électricité au prix du marché à tous ses clients, le gouvernement provincial engrangerait chaque année 5,3 milliards de plus, ce qui lui permettrait de construire non pas un mais bien trois CHUM par an, a fait valoir hier le p.-d.g. de sa division distribution, André Boulanger, devant l'Association de l'énergie électrique.

Avec ce montant, il serait aussi possible de payer tous les joueurs de la Ligue nationale de hockey (LNH) pendant un an, sans plafond salarial et de prolonger une dizaine d'autoroutes par année, a-t-il ajouté.

À l'instar de son patron André Caillé, le gestionnaire croit qu'il est temps que les contribuables et consommateurs réfléchissent aux conséquences du maintien de tarifs d'électricité inférieurs à ceux du marché nord-américain.

Actuellement, les Québécois bénéficient de rabais garantis par la loi. Hydro-Québec Distribution achète les 165 premiers terawattheures (TWh) dont elle a besoin chaque année à 2,79 ¢/kWh. Cette énergie constitue ce qu'on appelle le bloc patrimonial.

La division distribution, qui dessert tous les clients sur le territoire de la province, ne s'approvisionne au prix du marché que pour répondre à la partie de la demande qui dépasse cette quantité.

Marge de manoeuvre

D'après M. Boulanger, l'élimination du tarif préférentiel garanti à Hydro-Québec Distribution se traduirait par une hausse d'environ 50 % du prix payé par les ménages, les entreprises et les institutions de la province. Les revenus générés fourniraient cependant au gouvernement provincial la marge de manoeuvre financière qu'il souhaite.

«Notre patrimoine énergétique représente une très grande richesse. Les solutions d'hier conviennent-elles toujours pour demain ? La richesse énergétique du Québec doit-elle continuer à subventionner les consommateurs d'électricité?», a-t-il demandé dans un discours intitulé Sommes nous toujours maîtres chez nous?

Au cours des derniers mois, plusieurs économistes se sont prononcés en faveur d'une augmentation graduelle des prix jusqu'à ce qu'ils soient comparables à ceux des provinces et États voisins.

Même s'il souhaite faire du Québec «l'Alberta de l'hydroélectricité», le premier ministre Jean Charest a toutefois assuré en décembre qu'il n'était pas question de modifier les dispositions légales définissant le bloc patrimonial.

Une telle décision serait sans doute très impopulaire auprès des groupes écologistes et des associations de consommateurs. Le coordonnateur de Greenpeace, Steven Guilbeault, a déjà dit que cette décision constituerait rien de moins que «la rupture du contrat social» liant Hydro à ses propriétaires: les citoyens.

Pour André Boulanger, le débat n'est toutefois pas terminé. Selon lui, le bloc à rabais — «l'électricité patrimoniale» — constitue en effet un «piège» et un «anachronisme» sur lequel il faudra tôt ou tard s'attarder.

Le sujet ne fait cependant pas partie des questions étudiées par la commission parlementaire sur l'énergie qui se déroule actuellement à Québec.

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