Les mises en chantier d’habitations en baisse au Québec

Au moment où «il faudrait normalement augmenter les mises en chantier» pour répondre à la pénurie de logements dans plusieurs régions, «c’est le contraire qui se produit», s’inquiète Paul Cardinal, de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec.
Photo: Sean Kilpatrick La Presse canadienne Au moment où «il faudrait normalement augmenter les mises en chantier» pour répondre à la pénurie de logements dans plusieurs régions, «c’est le contraire qui se produit», s’inquiète Paul Cardinal, de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec.

Les mises en chantier d’habitations ont diminué de 31 % en moyenne au Québec en septembre, par rapport à la même période l’an dernier. Une situation qui fait écho à la hausse rapide des coûts de construction et des taux d’intérêt, qui pourrait avoir freiné les ardeurs des promoteurs immobiliers.

Dans un rapport publié mardi, la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) fait état d’une hausse moyenne de 19 % des mises en chantier en moyenne dans les centres urbains du pays en septembre 2022 par rapport au même mois l’an dernier. Le portrait varie toutefois grandement d’une province à l’autre. Ainsi, tandis que l’Ontario et l’Alberta ont vu leurs mises en chantier gonfler respectivement de 40 et de 59 %, celles-ci ont plutôt diminué de 31 % au Québec, de 49 % au Manitoba et de 59 % en Saskatchewan.

Cette diminution de plus de 1660 nouvelles constructions entamée le mois dernier dans la Belle Province, par rapport à septembre 2021, survient dans un contexte de hausse rapide des coûts de construction. Au deuxième trimestre de 2022, la facture de la construction de bâtiments résidentiels avait augmenté de 15 % à 25 % par rapport à la même période l’an dernier, constate la SCHL. Une situation qui, combinée à la pénurie de main-d’oeuvre dans ce secteur, pourrait avoir ralenti le rythme des constructions dans plusieurs régions du pays.

« Ce sont des facteurs qui faisaient qu’on anticipait une baisse des constructions en 2022, mais il y a aussi eu la hausse des taux d’intérêt », qui est venue augmenter les coûts de financement des projets immobiliers, relève le directeur du service économique à l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec, Paul Cardinal. Une situation qui pourrait avoir incité des promoteurs à retarder — voire à annuler — certains de leurs projets immobiliers, estime ce dernier.

31 %
C’est la baisse du nombre de mises en chantier enregistrées au Québec en septembre, par rapport au même mois l’an dernier.

Ainsi, au moment où « il faudrait normalement augmenter les mises en chantier » pour répondre à la pénurie de logements dans plusieurs régions du Québec, « c’est le contraire qui se produit », dit M. Cardinal, selon qui le nombre de mises en chantier devrait « presque doubler » dans la province pour répondre à la demande actuelle et future. « C’est énorme. »

La région de Montréal n’est d’ailleurs pas épargnée par ce phénomène, celle-ci accusant une baisse en septembre de 27 % de ses mises en chantier par rapport à l’an dernier, tous types de logements confondus. Cette diminution se fait d’ailleurs sentir dans toutes les régions métropolitaines du Québec, sauf celle de Saguenay, où le nombre de nouvelles constructions a bondi de 110 % pendant la période analysée.

L’attrait de la banlieue

Par ailleurs, dans la région de Montréal, le nombre de mises en chantier d’appartements locatifs a diminué de 16 % au premier semestre de 2022 par rapport à l’an dernier, « mais des gains sont toujours enregistrés dans plusieurs secteurs de banlieue », relève la SCHL. On constate ainsi que « les très faibles taux d’inoccupation à l’extérieur de Montréal stimulent la construction » de logements locatifs en banlieue, où plusieurs municipalités comptent moins de 1 % de logements locatifs qui ne sont pas actuellement occupés.

« Cette pénurie [de logements locatifs] continue sans aucun doute de stimuler fortement les mises en chantier », analyse la SCHL.

Ainsi, les mises en chantier de logements locatifs ont diminué de 47 % pendant le premier semestre de 2022 sur l’île de Montréal, toujours en comparaison avec l’an dernier, tandis que leur nombre a augmenté de 8 % dans sa banlieue. Cette hausse atteint 17 % dans le secteur de Laval, en pleine ébullition, tandis qu’elle s’élève à 5 % en moyenne dans l’ensemble de la Rive-Nord et à 7 % sur la Rive-Sud.

D’ailleurs, la hausse de l’attrait pour des logements locatifs pourrait s’expliquer par l’augmentation importante du prix d’acquisition des propriétés qui s’est poursuivie dans les premiers mois de 2022, rendant ainsi « plus difficile l’accession à la propriété », relève la SCHL. Le taux d’inoccupation des logements locatifs s’en trouve ainsi resserré dans plusieurs municipalités de la grande région de Montréal. « Ces facteurs envoient par conséquent le signal qu’il faut poursuivre la construction de nouvelles unités locatives », conclut l’organisme fédéral.

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