Le ralentissement de l’inflation s’étend

L’inflation a encore ralenti au Canada le mois dernier. Et pas seulement, cette fois, en raison de la baisse des prix de l’essence.
Le rythme de la croissance des prix s’est atténué le mois dernier, passant d’une hausse sur 12 mois de 7,6 % en juillet à 7 % en août, a rapporté mardi Statistique Canada. C’est le deuxième mois d’affilée que l’on assiste à un ralentissement depuis que l’augmentation de l’indice des prix à la consommation (IPC) a atteint en juin son sommet, en presque 30 ans, de 8,1 %.
Comme le mois précédent, cette nouvelle baisse de régime de l’inflation est principalement attribuable au prix de l’essence, qui a baissé en un mois de 9,6 %, ramenant son augmentation sur un an de 35,6 % à 22,1 %, a expliqué l’agence fédérale.
Mais ce n’est pas le seul domaine où l’on a observé une baisse de régime. Reflétant l’impact de la hausse des taux d’intérêt et du ralentissement économique, les prix du logement ont aussi augmenté moins vite (à 6,6 % sur 12 mois plutôt que 7 %). L’affaiblissement de la demande des consommateurs a eu le même effet sur le prix des appareils électroménagers (9 % plutôt que 11,5 %), alors que du côté des véhicules automobiles (7,3 % plutôt que 8,2 %), le changement est surtout attribuable au fait que l’on se compare à un mois d’août 2021 où les prix dans le secteur s’étaient envolés à cause des problèmes dans les chaînes d’approvisionnement.
Influencée notamment par les « conditions météorologiques extrêmes, l’augmentation du coût des intrants, l’invasion de l’Ukraine par la Russie et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement », la hausse des prix dans les épiceries s’est, au contraire, encore accélérée, passant de 9,9 % sur 12 mois en juillet à 10,8 % le mois dernier.
On n’avait pas assisté à une pareille hausse de prix des aliments depuis le mois d’août 1981, a noté Statistique Canada. L’augmentation se révèle particulièrement marquée pour les fruits frais (13,2 %), les boissons non alcoolisées (14,1 %) et les produits de boulangerie (15,4 %).
Les salaires à la traîne
Bien qu’en ascension constante, l’augmentation annuelle du salaire horaire moyen des employés au Canada (5,4 %) s’est rapprochée, au mois d’août, mais n’arrivait toujours pas à suivre le rythme de l’inflation (7 %). Plus élevée depuis quelques mois au Québec, la hausse des salaires y est toutefois repassée le mois dernier (6,9 %) en dessous de l’inflation (7,1 %), alors qu’en juillet, c’était le contraire (8,1 % contre 7,3 %).
L’ensemble des quelque 700 produits et services qui entrent dans la composition de l’IPC, à l’exclusion des éléments les plus volatils que sont les aliments et l’énergie, est ainsi passé d’une inflation annuelle de 5,5 % à 5,3 %. Les trois indices servant de référence à la Banque du Canada pour mesurer l’inflation fondamentale ont suivi la même trajectoire, passant d’une moyenne de 5,4 % à 5,2 %.
« C’est à peu près le meilleur rapport sur l’inflation que nous puissions espérer », a noté mardi l’économiste à la Banque de Montréal, Benjamin Reitzes, dans une brève analyse. « Malheureusement, l’inflation reste encore bien trop élevée », par rapport à la cible de 2 % de la banque centrale canadienne.
Alerte aux taux d’intérêt et à la récession
Aussi faut-il s’attendre qu’après avoir propulsé son taux directeur de 0,25 % à 3,25 % en moins de six mois, la Banque du Canada récidive avec une nouvelle hausse des taux d’intérêt d’au moins 50 points de base, à 3,75 %, avant de marquer une pause, a estimé Andrew Grantham, de la Banque CIBC. Elle ne s’arrêtera pas avant d’avoir atteint 4 %, pense de son côté Claire Fan, de la Banque Royale.
Cette hausse rapide des taux d’intérêt plombera encore plus le marché immobilier, a observé Tony Stillo de la firme d’analyse Oxford Economics. Cela rendra encore plus frileux des consommateurs déjà appauvris par l’inflation en plus de s’ajouter à l’impact de la crise ukrainienne et à la détérioration du contexte économique mondial.
Les probabilités sont désormais élevées, a-t-il prévenu, que le Canada connaisse une « récession modérée », qui pourrait commencer avant la fin de l’année et s’étendre jusqu’au milieu de l’année prochaine, pour un recul de total de l’économie de 1,8 %.