Inovia Capital lève 420 millions pour aider les jeunes pousses à traverser la crise

Inovia a déjà commencé à utiliser l’argent déposé dans sa plus récente enveloppe en fournissant une aide à deux entreprises qui connaissent une forte croissance dans leur créneau respectif.
Photo: iStock Inovia a déjà commencé à utiliser l’argent déposé dans sa plus récente enveloppe en fournissant une aide à deux entreprises qui connaissent une forte croissance dans leur créneau respectif.

La firme montréalaise Inovia Capital a annoncé mercredi matin avoir levé 420 millions de dollars pour lancer son cinquième fonds de capital-risque en 15 ans. Ce nouveau fonds ciblera des entreprises technologiques à la recherche d’un financement de pré-amorçage ou d’un financement de série A qui leur permettra de développer des solutions à la demande capables de transformer des industries qui tardent à passer au numérique.

Le contexte dans lequel le Fonds de capital-risque iNovia V voit le jour n’est pas sans rappeler les premiers mois d’activité de l’entreprise. Si la firme montréalaise est aujourd’hui le plus important investisseur dans des entreprises en démarrage au Canada, c’est parce qu’elle a pu récolter les fruits d’une aide à des jeunes pousses qui ont émergé durant la période de croissance prolongée après la crise financière de 2008, la pire en son genre depuis la Grande Dépression de 1929.

Magaly Charbonneau, associée chez Inovia, espère reproduire avec son nouveau fonds, et malgré le contexte actuel d’incertitude économique, le succès connu durant les quinze dernières années. « Il y a encore beaucoup de capital disponible pour les start-up, mais on voit comment les marchés publics ont évolué ces derniers mois et on s’attend à ce que ça se répercute sur l’investissement privé », craint-elle.

Un milliard $US en 18 mois

La dirigeante montréalaise relativise tout de même cet impact en ajoutant que les entreprises qui sont bien capitalisées — même celles qui ne génèrent pas actuellement de revenus substantiels — auront les moyens de traverser sans trop peiner « les deux ou trois prochaines années ».

Chose sûre, le capital à investir ne manque pas chez Inovia, qui a récolté en trois fonds distincts un peu plus d’un milliard de dollars américains depuis le début de 2021. Inovia cible ainsi trois stades dans la vie des nouvelles entreprises technologiques, où le capital est névralgique pour assurer la suite des choses : pré-amorçage, amorçage et continuité des affaires.

Magaly Charbonneau se félicite par ailleurs que le quart des investisseurs impliqués dans le fonds iNovia V soient de nouveaux partenaires de sa firme, ce qui démontre à la fois l’attrait de la scène technologique montréalaise et canadienne et la notoriété acquise par son équipe de gestionnaires. « Il a fallu trois semaines pour boucler ce nouveau tour », dit-elle.

Inovia a d’ailleurs déjà commencé à utiliser l’argent déposé dans sa plus récente enveloppe en fournissant une aide à deux entreprises qui connaissent une forte croissance dans leur créneau respectif. Le fonds montréalais a mené une tournée de financement de 13 millions de dollars pour la start-up torontoise Signal 1, qui se spécialise dans des applications d’intelligence artificielle pour aider, entre autres, les professionnels de la santé à déterminer les patients prioritaires. Inovia a également participé à un investissement de 9,5 millions de dollars dans Flare, une compagnie montréalaise de cybersécurité qui s’adresse au secteur des entreprises.

Un bon temps pour se lancer

 

Avec tout ce capital en poche, Inovia pourrait s’inquiéter de voir le pipeline de jeunes pousses techno se tarir au cours des prochains mois, vu les craintes liées à l’économie mondiale provoquées par une inflation prononcée et une situation géopolitique particulièrement volatile. Mais ce n’est pas le cas, assure Magaly Charbonneau.

« C’est même peut-être le meilleur moment pour lancer sa start-up », assure-t-elle. L’associée ne faisait pas partie de l’équipe d’Inovia Capital au moment de sa création, en 2007, mais elle travaillait déjà dans le secteur technologique. En fait, elle a non seulement vécu de près les effets sur la scène techno de la crise financière de 2008, mais elle se rappelle aussi l’éclatement de la bulle techno entre 1999 et 2001. « Je travaillais à l’époque pour une “dot-com” », se souvient-elle. Il aura tout de même fallu quelques années après l’arrivée du nouveau millénaire pour retrouver un certain enthousiasme — au Québec du moins — face aux nouvelles technologies.

Personne ne sait de quoi seront faits les prochains mois. Des investisseurs plus frileux revoient déjà à la baisse la valeur sur papier des entreprises en démarrage qu’ils financent et commencent à exiger avec un peu plus d’empressement qu’elles génèrent des revenus rapidement, signe que quelques nuages planent au-dessus du marché des start-up.

Il existe dans plusieurs industries encore beaucoup de place pour innover, pense de son côté Magaly Charbonneau. Surtout dans le créneau où sa firme intervient : elle continue d’être à la recherche de solutions logicielles à la demande (ce qu’on appelle en anglais SaaS ou « software as a service ») capables d’accélérer la transition numérique dans des secteurs où elle promet d’améliorer le bilan des entreprises petites et grandes.

Le monde change, mais pas chez Inovia. Sa stratégie des quinze prochaines années risque de demeurer la même que durant les quinze dernières. « Nous cherchons toujours des technologies prêtes à transformer des industries à l’échelle internationale. »

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