Les microdistilleries près d’atteindre le fond du baril

L’Union québécoise des microdistilleries demande d’abolir la majoration perçue par la SAQ pour les bouteilles vendues sur le lieu de fabrication, comme c’est le producteur qui doit assumer les coûts de mise en vente.
Photo: Valérian Mazataud Le Devoir L’Union québécoise des microdistilleries demande d’abolir la majoration perçue par la SAQ pour les bouteilles vendues sur le lieu de fabrication, comme c’est le producteur qui doit assumer les coûts de mise en vente.

La distillerie Fils du Roy, dans le Bas-Saint-Laurent, qui fabrique des spiritueux à partir de ses produits maraîchers, est déficitaire depuis quelques années déjà. Et elle est loin d’être la seule, selon l’Union québécoise des microdistilleries (UQMD), puisque deux tiers de ces dernières vivent des difficultés financières.

« Il y a même plusieurs distilleries qui sont sur le bord de la faillite si une intervention n’est pas faite rapidement cet été », indique Jonathan Roy, président de l’UQMD et de la distillerie Fils du Roy. Ce dernier s’appuie sur les premiers résultats d’une étude économique réalisée pour le compte du regroupement, qui compte 55 membres, soit environ 85 % des microdistilleries de la province.

Il est de plus en plus ardu pour les distilleries québécoises de faire leur place sur les tablettes de la Société des alcools du Québec (SAQ), affirme M. Roy, notamment en raison du nombre toujours grandissant de produits en compétition. La SAQ privilégie aussi « les grands volumes et la nouveauté », constate M. Roy, au détriment des petits producteurs établis. Les produits de Fils du Roy, par exemple, étaient présents dans 200 succursales il y a trois ans, mais ce nombre a fondu à 80 points de vente.

Taxation à revoir ?

Dans ce contexte, les microdistilleries veulent miser sur la vente sur leurs lieux de production, selon un modèle d’agrotourisme. « C’est une façon de participer à l’économie locale, de se faire connaître. Les touristes sont de plus en plus nombreux chaque année à visiter les distilleries. Elles doivent le faire, mais la rentabilité n’est pas au rendez-vous », a affirmé M. Roy.

Le problème, c’est que même dans ces cas-là, la SAQ perçoit généralement un montant de plus de 50 % sur le prix de vente. Sur une bouteille de spiritueux vendue à 40 $, ce montant, appelé majoration, est de 20,30 $, selon l’UQMD. Elle permet notamment de couvrir les frais de vente et mise en marché, de distribution et d’administration par la SAQ. Là-dessus, la SAQ verse 8,15 $ au gouvernement du Québec, a calculé l’UQMD. Après les diverses taxes applicables, il reste 9,98 $ au producteur.

50%

C’est le pourcentage que perçoit normalement la SAQ sur le prix de vente d’une bouteille vendue en succursale.

Or, dans le cas de la vente à l’usine, c’est le producteur et non la SAQ qui doit assumer les coûts de mise en vente, par exemple des infrastructures d’accueil des visiteurs, des employés pour gérer la boutique ou des démarches de marketing. L’UQMD demande donc l’abolition de la majoration perçue par la SAQ pour les bouteilles vendues sur le lieu de fabrication. En contrepartie, comme ces entreprises souhaitent continuer de contribuer aux deniers publics, l’organisme propose au ministre des Finances de hausser dans ce cas la taxe spécifique sur l’alcool. Pour une bouteille de 40 $, cette taxe augmenterait ainsi de 8,15 $.

Cette façon de fonctionner permettrait aux distilleries de survivre, de développer pleinement leur offre agrotouristique et de continuer de gagner des prix internationaux, croit M. Roy.

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