L’industrie touristique en quête de travailleurs

L’industrie touristique québécoise entrevoit la saison estivale avec enthousiasme, étant donné le retour des voyageurs internationaux. On manque toutefois de travailleurs pour les accueillir au sein de plusieurs attractions un peu partout dans la province.
Pour la Tyrolienne MTL, située dans le Vieux-Port, la présence d’employés fiables et en nombre suffisant est une question de sécurité. « Les employés s’assurent que les clients portent bien le casque et le reste de l’équipement », décrit le directeur général, Lucas Martin. « Arrivé au dernier palier, il y a un rappel complet des règles, et l’employé attache le client », poursuit-il au sujet d’une des nombreuses étapes qui encadrent l’activité lors de laquelle les participants survolent le bassin Bonsecours sur un câble.
Pour l’instant, il manque encore une quinzaine de personnes à l’équipe de 50 nécessaire pour faire fonctionner la tyrolienne tous les jours de l’été, souvent de 9 h à 1 h. L’entreprise a toutefois commencé ses efforts de recrutement dès janvier et a adopté de nouvelles stratégies. M. Martin ne voulait pas revivre le casse-tête de l’été dernier. En effet, le recrutement avait été problématique, mais la rétention du personnel aussi.
« Beaucoup de gens voulaient partir en vacances avant la fin de l’été. D’autres personnes absorbaient les heures pour qu’on puisse être ouvert. Tout le monde a fini complètement brûlé », se rappelle M. Martin, qui a lui-même prêté main-forte sur le terrain pour pallier l’insuffisance de personnel.
Dans l’espoir de renverser la vapeur, Tyrolienne MTL offrira cette année une prime de 1 $ l’heure pour toutes les heures travaillées, à condition que l’employé soit présent jusqu’à la fin de la saison. L’entreprise essaie aussi d’améliorer le sentiment d’appartenance à l’équipe par l’entremise de partys, de tirages, de marques de reconnaissance comme « l’employé du mois ».
Aux prises avec une baisse d’environ 50 % des candidatures depuis 2019, Culture Trois-Rivières est également à la recherche d’une vingtaine d’employés pour compléter son équipe. Des postes sont disponibles tant à l’animation des musées et à l’accueil des spectacles qu’à l’entretien et à la restauration, précise la conseillère en ressources humaines Mélanie Langlois. L’organisme a pourtant multiplié les efforts de recrutement, en participant à des événements spéciaux, en organisant des journées portes ouvertes et en affichant ses offres à de nombreux endroits.
Que se passera-t-il s’il manque encore d’employés pendant la haute saison ? Bon nombre d’entreprises adapteront leurs services en conséquence. Culture Trois-Rivières, par exemple, pourrait changer les heures d’ouverture de sa terrasse, encourager l’utilisation de la billetterie en ligne et réduire le nombre de visites guidées au profit des audioguides.
Dans l’est du Québec, notamment en Gaspésie, les répercussions pourraient être importantes, juge la directrice générale de Québec maritime, Nathalie Blouin.
« Des hôtels vont demander des séjours minimums de deux nuits, pour avoir moins d’entretien ménager à faire. Des restaurants vont être obligés de fermer deux jours par semaine », indique-t-elle.
Recherche de solutions
À la fin de 2021, environ 40 000 postes étaient orphelins dans ce secteur, rappelle le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme (CQRHT). Le taux de postes vacants était d’environ 11,5 %, comparativement à 6 % pour la moyenne des industries au Québec, selon Statistique Canada.
Le CQRHT est donc parti à la recherche de solutions. Il a notamment mis en place un projet pilote dans Charlevoix, ce qui a permis de transformer 27 emplois saisonniers en emplois à l’année, les rendant ainsi plus attrayants.
« Une dizaine d’entreprises collaborent pour se partager le personnel », indique le directeur général de l’organisme, Xavier Gret.
Le CQRHT a aussi créé plusieurs comités pour encourager l’emploi de certaines catégories de personnes, notamment des retraités, des Autochtones, des personnes handicapées et des personnes judiciarisées.
Le marketing de ressources humaines est aussi appelé à prendre de l’ampleur. The Trekking Group, qui possède une dizaine de marques liées aux parcs d’aventures en Amérique du Nord, a déployé dès janvier un plan de recrutement comprenant une centaine de tactiques. Parmi les stratégies en question : miser sur les amis d’employés existants en les invitant à des événements dans leurs parcs, cibler les cégeps, lancer des campagnes publicitaires sur divers canaux de communication, participer à des journées de l’emploi, répondre rapidement après la réception d’un CV et augmenter les salaires pour qu’ils dépassent ceux des camps de jour.
Mais surtout, The Trekking Group a défini un message clair. « Les gens ne viennent pas travailler. Ils sont payés pour vivre de leur passion du plein air tout l’été », expose le chef du marketing pour The Trekking Group, Jean-François Couture.
L’entreprise a ainsi réussi à pourvoir l’ensemble de ses 200 à 225 postes dans cinq parcs Arbraska. Triompher de la pénurie de main-d’œuvre ne serait donc pas une mission impossible, mais elle doit devenir prioritaire pour être réussie.