Réserve fédérale - Dans l'attente d'une baisse des taux, qui ne devrait pas venir
Après avoir alimenté la remontée des cours boursiers la semaine dernière, la prévision d'une baisse du taux directeur de la Réserve fédérale (Fed), aujourd'hui, compte désormais moins d'adhérents. Le statu quo devrait prévaloir, quoique la banque centrale américaine puisse sortir de sa neutralité en faisant état d'une mollesse perceptible de la reprise économique au sud de la frontière.
L'économiste du Mouvement Desjardins, Francis Généreux, demeure sur ses positions. «Il n'y aura pas de baisse des taux directeurs» à l'issue de la réunion de la Fed, aujourd'hui. «À notre avis, il est trop tôt pour procéder à une baisse des taux. Le statu quo devrait persister et s'étendre au reste de l'année.» Tout au plus la Fed pourrait-elle délaisser sa neutralité, qui accorde un même degré de risque à une reprise inflationniste et à la menace d'une récession, pour faire ressortir les ratés de la reprise.«Cette approche serait raisonnable. Aller plus loin, prendre le chemin d'une baisse du taux directeur à ce stade-ci, alors que la crainte d'un retour en récession demeure encore hypothétique, aurait un effet psychologique non souhaitable. Un tel geste pourrait envoyer le message que la Fed s'inquiète de la situation, ce qui pourrait provoquer une crise.»
Pour l'économiste, la Fed voudra conserver sa marge de manoeuvre au cas où le scénario de retour en récession — auquel il accorde peu de probabilités — verrait le jour. Et Francis Généreux de s'interroger sur l'effet d'un recul du taux à partir de son niveau actuel, le plus bas en 40 ans. «La faiblesse des taux produit déjà ses effets. On le voit avec le refinancement hypothécaire et dans les chiffres sur les ventes automobiles alimentées par les promotions à 0 % de financement. Aller plus bas ne changerait pas grand-chose», soutient-il.
La Fed a déjà abaissé 11 fois son taux sur les prêts interbancaires en 2001, dont trois réductions de 50 points de base après le 11 septembre. Ce taux est demeuré inchangé depuis la fin 2001 à 1,75 %, son plus bas niveau depuis 40 ans. Or la semaine dernière, en réaction aux statistiques faisant craindre un retour de l'économie américaine en récession, les prévisions d'une nouvelle détente monétaire alimentaient les discours des analystes. Certains avançaient une réduction de 50 points dès aujourd'hui et une autre, de 25 points, d'ici à la fin de 2002, avec un taux tombant au niveau symbolique du 1 %.
Cet assouplissement prévu a également compté pour l'essentiel du rebond hebdomadaire de 5 % de l'indice boursier S&P 500.
Ces attentes ne tenaient plus hier, au fur et à mesure que les risques d'une double récession étaient écartés. Selon la dernière enquête de la National Association of Business Economics (NABE), «en dépit d'une récente série d'indicateurs économiques plutôt faibles, du recul des cours des actions et des révélations sur les scandales touchant les entreprises, une double récession est peu probable cette année. La politique économique suivie est plutôt appropriée compte tenu des circonstances», souligne l'étude du NABE, dont seulement 18 % des 193 membres interrogés prévoient une baisse des taux dans les six prochains mois.
Il en ressort également de l'étude que 69 % des experts interrogés estiment à moins de 50 % la probabilité d'une rechute, ou «double-dip». En mars, ils étaient 76 % à faire cette réponse.
Sur les parquets, le principal indice de la Bourse de Toronto a cédé du terrain en fin de séance hier, les investisseurs préférant se consoler avec des prises de profits à la veille de la décision de la Réserve fédérale américaine sur son taux d'intérêt directeur. L'indice S&P/TSX a reculé de 74,48 points, soit 1,1 %, pour clôturer à 6571,44 points.
À New York, le Dow Jones a fini en baisse de 56,56 points à 8688,89 points tandis que l'indice composé de la Bourse électronique Nasdaq s'est apprécié de 0,72 point à 1306,84 points. L'indice Standard and Poor's 500, plus représentatif de la tendance générale, a reculé de 4,84 points (-0,5 %) à 903,80 points.
Le marché obligataire a bénéficié d'un transfert de capitaux en provenance des marchés boursiers, le rendement de l'obligation à dix ans reculant à 4,2 % contre 4,25 % vendredi soir et celui de la ligne à 30 ans légèrement sous les 5,1 %.