Brouillard insoutenable pour les tenanciers de bars

Les tenanciers de bars se sentent ignorés. Ils n’ont toujours aucune nouvelle de leur réouverture, contrairement aux autres commerces.
Au lendemain de l’ouverture des salles à manger des restaurants, le premier ministre, François Legault, a annoncé que les gyms, les spas, ainsi que les activités sportives et de loisir intérieures pourront reprendre du service à partir du 14 février. Pour l’instant, il n’ira pas plus loin. Cette situation laisse les bars, les boîtes de nuit et les casinos sur la touche.
« Je serais curieux de savoir quand est la dernière fois qu’il a parlé de nous. On dirait qu’il a peur de dire le mot “bar” », s’est désolé le propriétaire du Belleys Billard de Victoriaville, Marc-André Vincent.
M. Vincent ne peut rouvrir son commerce, puisqu’il ne possède pas de cuisine. Il offre des salles de billard, des machines de loterie vidéo et de l’alcool.
Ses employés, au chômage depuis plus d’un mois, lui demandent fréquemment des nouvelles. Et il ne sait pas quoi leur dire. Il ne comprend pas pourquoi les bars sont complètement laissés pour compte.
« Il y a eu des discothèques qui ont fait les manchettes, et on dirait que toute l’industrie est pénalisée. On dirait qu’on est vus comme les méchants, des mauvaises entreprises d’un point de vue moral, raconte-t-il. Mais beaucoup de bars font ça très bien. On a suivi toutes les mesures et on n’a jamais eu d’éclosion. »
L’Union des tenanciers de bars du Québec (UTBQ) et la Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec (CPBBTQ) ont déclaré être « déçues et exaspérées » d’avoir été exclues des annonces gouvernementales du jour.
« Dans les bars, la majorité des gens sont assis à discuter ou à regarder un match de hockey. Il ne faut pas s’imaginer que tout le monde danse sur les tables. On est capables de faire respecter les mesures sanitaires », soutient Renaud Poulin, président de la CPBBTQ.
On dirait qu’on est vus comme les méchants, des mauvaises entreprises d’un point de vue moral
Très endettés et fragiles financièrement, les membres de ces regroupements demandent une réouverture le 11 février, afin d’accueillir des clients pour le Super Bowl, le 13 février. Ils estiment que des rassemblements privés, à cette occasion, seraient plus dommageables que ceux tenus dans un environnement contrôlé comme celui des bars.
François Legault n’a pas complètement fermé la porte à ce scénario, déclarant en conférence de presse que la situation sera réévaluée. « Est-ce que la semaine prochaine, on pourra vous dire qu’on pourra aller un peu plus loin pour la journée du Super Bowl ? Ça a fait partie des discussions. M. Boileau est un amateur de football », a-t-il affirmé à propos du directeur national de santé publique par intérim, Luc Boileau.
Laissés dans le noir
Les diverses associations de propriétaires de bars constatent un manque de communication de la part de la Direction générale de la santé publique, ce qui les empêche de comprendre ses décisions. Le président de la Nouvelle Association des bars du Québec (NABQ), Pierre Thibault, a déploré un « manque de respect » envers ses membres.
En début de semaine dernière, la NABQ a envoyé une lettre détaillant ses propositions à la Santé publique. M. Thibault dit n’avoir reçu une réponse que mardi en début d’après-midi, pendant le point de presse du gouvernement et du Dr Boileau. Le courriel mentionnait qu’en raison de la situation épidémiologique, « les mesures d’assouplissement visent les lieux et les activités qui présentent moins de risques », selon M. Thibault.
« On se fait répondre ça avec le fait accompli. On aurait aimé discuter avec eux avant, a-t-il indiqué. Ils nous disent que nous sommes plus à risque que les gyms. Mais il faudrait en parler. Quelles sont les statistiques à cet effet ? »
M. Thibault se demande si les tenanciers de bars doivent menacer de défier les règles, comme l’ont fait des propriétaires de salles de sport, pour être entendus. L’UTBQ et la CPBBTQ, de leur côté, craignent que des propriétaires le fassent en grand nombre.