Un vent inflationniste va continuer de souffler, dit Louis Vachon

Le président et chef de la direction sortant de la Banque Nationale s’exprimait devant le CORIM à la veille de sa sortie.
Photo: Annik MH de Carufel Le Devoir Le président et chef de la direction sortant de la Banque Nationale s’exprimait devant le CORIM à la veille de sa sortie.

Les pressions inflationnistes sont là pour de bon, prévient Louis Vachon, alors qu’il rend les clés de la Banque Nationale.

Oui, il y a l’effet conjoncturel de la pandémie de COVID-19 sur les chaînes d’approvisionnement et le niveau de la demande, mais d’autres changements plus structurels vont contribuer à ce que le vent inflationniste continue de souffler même après la crise, a expliqué le banquier vendredi devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM).

On peut s’attendre normalement à ce que les nouvelles technologies, l’automatisation et le passage au numérique améliorent la productivité et exercent des pressions à la baisse sur les prix à long terme, comme toutes les innovations technologiques. Mais ces changements ne viendront pas seuls, estime-t-il.

Il faudra aussi compter sur la lutte contre les changements climatiques et la décarbonation de l’économie, qui viendront avec une hausse de la tarification du carbone et une explosion des investissements dans les infrastructures vertes et se traduiront inévitablement par une augmentation de la structure des coûts. Et puis, les facteurs géopolitiques s’inviteront aussi dans l’équation.

La Chine et l’Occident

Il n’y a pas que la COVID-19 qui peut perturber les chaînes d’approvisionnement, a-t-il rappelé en réponse aux questions de l’ancien journaliste et aujourd’hui président de l’Institut d’études internationales de Montréal de l’UQAM, Bernard Derome. « Le contexte plus tendu entre la Chine et l’Occident est là pour au moins quelques années », et il ne manquera pas de compliquer le commerce.

Louis Vachon n’a donc pas été surpris de voir la Banque du Canada décider, cette semaine, d’arrêter ses injections massives de liquidités dans les marchés financiers en plus de signaler le début d’un relèvement de ses taux d’intérêt probablement plus tôt que prévu.

Il croit qu’il est grand temps que les gouvernements précisent comment ils entendent réduire leurs déficits et rétablir l’équilibre des finances publiques. S’ils ont pu intervenir aussi énergiquement durant la crise actuelle, c’est parce qu’ils avaient su s’imposer cette discipline auparavant et qu’ils y avaient gagné la marge de manœuvre financière nécessaire. « Pour les prochaines générations et les prochaines crises — qui sont à peu près garanties de se produire —, il faut maintenant rebâtir cette marge de manœuvre là. »

Arrivée brutale

 

Président et chef de la direction de la Banque Nationale depuis 2007, Louis Vachon n’était plus qu’à quelques heures de son départ à la retraite. Il doit céder sa place le 1er novembre à l’actuel chef de l’exploitation de la Banque Nationale, Laurent Ferreira. Il laisse une entreprise en bonne santé financière dont le rendement annuel composé total s’est élevé à 13 % pour les 14 années de son règne.

Arrivé en poste en pleine crise des papiers commerciaux au Canada en 2007, et seulement un an avant que la banque d’affaires américaine Lehman Brothers entraîne dans sa chute toute la finance mondiale, Louis Vachon a connu sa part de moments difficiles à la barre de la Banque Nationale.

« C’est jamais le fun, mais je ne suis pas d’une nature très anxieuse », a expliqué l’homme qui arrive au tournant de la soixantaine. Tout est une question d’équilibre, a-t-il poursuivi, et d’accepter que « la seule façon de ne pas faire d’erreur en finance est de ne pas prendre de risques. Et si tu ne prends pas de risques, comme institution financière, tu ne joues pas ton rôle social et économique ».

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