Hydro-Québec et Énergir s’attaquent aux émissions de GES des systèmes au gaz naturel

Les distributeurs veulent convertir à la biénergie les systèmes de chauffage au gaz naturel de 100 000 clients d’ici 2030. Environ 40 000 clients résidentiels, commerciaux et institutionnels pourraient avoir effectué ce passage d’ici cinq ans, selon les prévisions d’Hydro-Québec et Énergir.
Photo: Adil Boukind Le Devoir Les distributeurs veulent convertir à la biénergie les systèmes de chauffage au gaz naturel de 100 000 clients d’ici 2030. Environ 40 000 clients résidentiels, commerciaux et institutionnels pourraient avoir effectué ce passage d’ici cinq ans, selon les prévisions d’Hydro-Québec et Énergir.

Hydro-Québec et Énergir ont signé mardi une entente pour réduire de plus de 70 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 pour les établissements résidentiels, commerciaux et institutionnels qui carburent au gaz naturel en proposant une nouvelle solution biénergie.

Les deux distributeurs rendront public mercredi leur partenariat avec le gouvernement du Québec qui, pour sa part, fait adopter par le Conseil des ministres un décret qui permettra de déposer d’ici septembre un tarif conjoint, une première.

Pour atteindre les objectifs, Hydro-Québec et Énergir ont établi un échéancier. D’ici 2026, « on va tenter d’atteindre 40 % de l’objectif » de réduction de GES de 540 000 tonnes d’équivalent CO2 d’ici la fin de la décennie, explique au Devoir Stéphanie Trudeau, vice-présidente exécutive chez Énergir.

Pour ce faire, les distributeurs veulent convertir à la biénergie les systèmes de chauffage au gaz naturel de 100 000 clients d’ici 2030. Environ 40 000 clients résidentiels, commerciaux et institutionnels pourraient avoir effectué ce passage d’ici cinq ans, selon les prévisions d’Hydro-Québec et Énergir.

Un système biénergie utilise l’électricité comme principale source d’énergie presque toute l’année. Mais en période de pointe, lorsque la demande québécoise gravite autour de 40 000 mégawatts — ce qui représente entre 100 et 400 heures chaque année —, ces systèmes peuvent avoir recours à un combustible comme source d’appoint, dans ce cas-ci le gaz naturel.

Le programme de conversion sera d’abord déployé dans le secteur résidentiel en 2022. Hydro-Québec offre déjà des tarifs biénergie pour celui-ci. « Et l’année suivante, les secteurs commercial et institutionnel devraient s’ajouter », explique Stéphanie Trudeau.

Pour des raisons technologiques, les tours de bureaux sont pour le moment écartées de l’initiative. « Pour l’instant, on vise la clientèle résidentielle, les [édifices de] 20 logements et moins, et les clients commerciaux qui consomment moins de 15 000 3 [de gaz naturel]. Ce sont les secteurs où les technologies de thermopompes sont les plus efficaces. »

Aucun client ne sera contraint d’effectuer ces changements. « Le but, c’est que cette voie soit économiquement plus attrayante que le système au gaz naturel. »

Des programmes destinés au secteur commercial et institutionnel seront élaborés d’ici 2023. « On va développer un nouveau tarif biénergie qui sera calibré pour ces clientèles », dit Éric Fillion, vice-président exécutif chez Hydro-Québec. Parallèlement, la société d’État fera des « investissements massifs » pour favoriser l’efficacité énergétique.

Le coût de l’électrification

Pour que ce partenariat se concrétise, le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, annoncera ce mercredi que le Conseil des ministres a adopté un « décret de préoccupations » à l’intention de la Régie de l’énergie.

Il s’agit là d’une étape essentielle qui permettra aux deux distributeurs de déposer d’ici septembre une demande de tarif conjoint à la Régie de l’énergie, la première dans la province. Le document vise également à guider l’analyse de la Régie.

En entrevue au Devoir, le ministre Jonatan Julien indique que l’approche « peut paraître contre-intuitive ». La conversion vers des systèmes biénergie est « la meilleure des options sur la table », non seulement pour des raisons environnementales, mais aussi financières.

L’électrification complète pose un défi en matière de coûts, reconnaît-il. « Pour 30 % à 40 % [de ce que coûterait une conversion totale à l’électrique], on atteint une réduction [de GES équivalant à] presque 75 % de celle d’une électrification complète », indique-t-il. « Au net, on va réduire d’environ 500 000 tonnes les émissions de GES [d’ici 2030], ce qui représente l’électrification de 140 000 véhicules à essence », dit-il.

Selon les estimations des deux distributeurs, il aurait fallu injecter 2,6 milliards de dollars pour mettre en place les infrastructures nécessaires à une électrification totale. Le déploiement de systèmes biénergie est plutôt estimé à près de 1,1 milliard.

Le partenariat s’inscrit dans le cadre du Plan pour une économie verte présenté cet automne. Ce plan vise entre autres choses à réduire de 50 % les émissions de GES liées au chauffage des bâtiments résidentiels, commerciaux et institutionnels par rapport au niveau de 1990.

Pour faciliter la conversion, le gouvernement confirmera aujourd’hui des mesures d’aide de 125 millions de dollars pour les cinq prochaines années. Le ministre Julien indique que « ce sera probablement une aide directe » destinée aux propriétaires de bâtiments dont le chauffage carbure au gaz naturel ; elle pourrait couvrir jusqu’à 80 % du coût de la conversion.

« C’est comme une première, ce qu’on fait. Et si on peut le faire, c’est parce qu’au Québec, étant donné notre écosystème énergétique, il est possible d’avoir une entente entre ces deux sources d’énergie », dit-il. La société d’État produit la presque totalité de l’hydroélectricité de la province, tandis qu’Énergir est de loin le plus important distributeur de gaz naturel du Québec.

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