Une relance verte?

Le gouvernement du Québec a dévoilé jeudi sa mise à jour économique, prévoyant des investissements additionnels de 300 millions de dollars pour bonifier le Plan pour une économie verte (PEV). Les attentes pour une relance durable sont importantes et le ministre de l’Environnement, Benoit Charrette, doit rendre public son plan lundi prochain.
Le Plan pour une économie verte « permettra de guider le Québec durant la prochaine décennie dans sa transition vers une économie plus sobre en carbone, d’électrifier l’économie, de favoriser l’investissement, de concevoir de nouvelles activités et de créer de la richesse, tout en renforçant la résilience du Québec face aux changements climatiques », peut-on lire dans la mise à jour économique du ministre des Finances, Eric Girard. Selon François Delorme, chargé de cours en économie à l’Université de Sherbrooke, il est primordial de saisir cette occasion. « Ce serait irresponsable de ne pas profiter de cette occasion pour investir davantage dans une relance verte », précise-t-il.
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L’Alliance SWITCH pour une économie verte, qui réunit onze acteurs, dont font notamment partie le Mouvement Desjardins, Équiterre ou encore Énergir, attend également des mesures ambitieuses de la part du gouvernement du Québec. Denis Leclerc, coprésident de l’Alliance et président et chef de la direction d’Écotech Québec, se montre toutefois optimiste face à l’enveloppe de 300 millions annoncée pour la relance verte. « Des mesures cohérentes peuvent nous permettre de traverser cette crise sanitaire tout en contribuant à régler une autre crise qui est la crise environnementale », précise celui qui attend impatiemment les détails du plan du ministre Charrette. « On ne veut pas opposer reprise économique et relance environnementale. Il faut voir comment les concilier, car la qualité de l’environnement a une incidence sur la santé publique et donc aussi sur la santé économique du Québec. »
François Delorme abonde dans le même sens : « La crise pandémique et la crise climatique, c’est un peu la même chose. » Selon lui, il est impensable d’imaginer cette relance sans investissements dans le transport collectif ou dans les infrastructures durables. « Il faut des politiques de soutien et de relance pour sortir de la crise économique actuelle tout en mettant en avant des politiques d’écofiscalité responsable. »
L’assainissement des finances publiques et la lutte contre les changements climatiques sont liés. La dette financière, c’est un problème intergénérationnel — mais la crise climatique en est un aussi.
En ce moment, le Québec fait déjà partie d’un marché carbone avec la Californie — aussi connu sous le nom de système de plafonnement et d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre. Une solution pourrait être « d’abaisser le plafond de ce marché », défend M. Delorme. De son côté, SWITCH croit que « le gouvernement doit montrer l’exemple », notamment en matière d’appels d’offres. « Le processus doit être revu pour inclure des critères de performance écoresponsables », dit M. Leclerc.
Revoir le Fonds des générations ?
Il y a un aspect générationnel à la crise économique et écologique que nous vivons, ce qui nécessite « une réévaluation du rôle du Fonds des générations », qui est actuellement destiné à éponger la dette du Québec, plaide M. Delorme. « La situation de l’assainissement des finances publiques et la lutte contre les changements climatiques sont liées. La dette financière, c’est un problème intergénérationnel — mais la crise climatique en est un aussi. » Il faut régler à la fois « notre dette financière et notre dette écologique ».
Actuellement, les objectifs inscrits dans la Loi sur la réduction de la dette et instituant le Fonds des générations sont d’atteindre 45 % du PIB pour la dette brute au 31 mars 2026, et 17 % du PIB pour la dette représentant les déficits cumulés au 31 mars 2026. Pour François Delorme, la cible devrait être conservée, mais il faudrait revoir l’échéancier. « C’est important d’assainir les finances publiques », mais il faudrait repousser l’horizon pour y parvenir, ce qui permettrait d’allouer une partie des dépenses du Fonds à la lutte contre les changements climatiques. Le Québec a la marge de manœuvre pour le faire, croit M. Delorme.