Bombardier: l’avenir de La Pocatière encore incertain

Bombardier Transport dit partager les craintes exprimées par le syndicat de l’usine d’assemblage de La Pocatière, qui a demandé mardi l’intervention du gouvernement Legault afin d’éviter que les emplois disparaissent lorsque le contrat de remplacement des voitures MR-63, du métro de Montréal, prendra fin en 2021. La compagnie tente actuellement de décrocher de nouvelles commandes.
Selon le Syndicat des employés de Bombardier La Pocatière-CSN, Québec devrait faire en sorte que l’usine de La Pocatière soit mise à profit pour renouveler la flotte des MR-73, par exemple, pour commander de nouvelles voitures en vue du prolongement de la ligne bleue du métro ou pour assurer du contenu local dans les contrats de tramway qui sont à l’étude à plusieurs endroits.
C’est la deuxième fois depuis 2018 que le syndicat s’inquiète publiquement de l’avenir de l’usine. À l’époque, le gouvernement Couillard était intervenu pour favoriser une commande supplémentaire de 153 voitures Azur auprès du consortium Bombardier-Alstom. La décision avait permis de sécuriser 170 emplois à La Pocatière et 70 emplois aux installations d’Alstom de Sorel-Tracy.
L’usine de La Pocatière compte actuellement 260 employés syndiqués et 160 employés cadres. La fabrication des trains Azur prendra fin vers le mois de juin, moment auquel des mises à pied débuteraient si l’usine ne décrochait pas d’autres contrats. Suivrait ensuite une période d’essais des voitures jusqu’au mois de septembre, lorsque « ça serait terminé au complet », a dit en entrevue téléphonique le président du syndicat, Claude Michaud.
Contenu local minimum
« François Legault a dit au début du confinement qu’il fallait redémarrer l’économie au Québec, aider les industries manufacturières, et on en fait partie », a affirmé M. Michaud en disant avoir bon espoir que le gouvernement tendra l’oreille. Pour tous les futurs contrats dans le transport en commun, estime le syndicat, le gouvernement devrait exiger un pourcentage de contenu local d’au moins 25 %, comme ce fut le cas pour le tramway de Québec. Selon M. Michaud, cela assurerait d’« éviter les erreurs comme celle du REM qui sera construit en Inde ».
En ce qui concerne le renouvellement des MR-73, qui sont entrés en service en 1976, le président du conseil d’administration de la Société de transport de Montréal, Philippe Schnobb, avait affirmé lors d’une commission parlementaire en 2018 que ce n’était « pas envisageable à court terme » à cause d’un manque d’espace pour l’entretien.
« Nous partageons les craintes que les représentants de la CSN ont si bien exprimées plus tôt aujourd’hui en ce qui concerne la continuité du travail à l’usine Bombardier à La Pocatière », a indiqué une porte-parole de Bombardier Transport, Annick Robinson. « Nous redoublons activement nos efforts pour obtenir des contrats supplémentaires pour stabiliser la masse critique du site. Nous sommes en plein examen de différentes pistes de solution pour maintenir la continuité de la production à notre site de La Pocatière et, de fait, nous sommes aussi en discussion active avec nos parties prenantes. »
Surtout présente en Europe et forte d’un chiffre d’affaires annuel de plus de 8 milliards $US, Bombardier Transport se trouve à un moment particulier de son histoire : la division est en voie de passer entre les mains du géant européen Alstom, lequel souhaite ainsi être mieux outillé pour affronter la concurrence chinoise. La compagnie française a généré l’an dernier des revenus d’environ 8,2 milliards d’euros. La transaction prévoit que la Caisse de dépôt et placement du Québec, présentement actionnaire à 32,5 % de Bombardier Transport, deviendra actionnaire d’Alstom à hauteur de 18 %. Elle pourra nommer deux personnes au conseil.
Au cabinet du ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, l’attaché de presse Mathieu St-Amand a indiqué que le gouvernement a confiance « que l’arrivée d’Alstom permettra une augmentation des activités de production à La Pocatière et partout au Québec ».
Contrat annulé
Par ailleurs, une commande de 54 millions que l’usine avait décrochée auprès de Via Rail en 2018 a été annulée. Il s’agissait de modifier 17 voitures de train construites dans les années 1950 afin d’en améliorer l’accessibilité. Selon un porte-parole de la société de la Couronne, qui a précisé que l’annulation résulte d’un commun accord, l’arrêt du contrat est dû à « des problèmes techniques imprévus dus à l’âge et à l’état de certaines voitures ».
Le contrat avec Via Rail procurait du travail à 80 employés, a indiqué le syndicat. Ceux-ci ont été réaffectés dans l’usine. « On était au tout début du projet », a dit Claude Michaud.