Les constructeurs de maisons américains touchent du bois

La décision d’un comité de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) critiquant la méthode américaine pour ses tarifs contre le bois d’œuvre canadien fait des vagues au sud de la frontière, où un influent regroupement de constructeurs de maisons plaide pour une entente rapide entre les deux pays.
Tout en signalant que les prix du bois d’œuvre ont grimpé en flèche depuis quelques mois, la National Home Builders Association (NAHB) est d’avis qu’une nouvelle ronde de discussions entre Washington et Ottawa aurait ceci de positif qu’il déboucherait sur un nouvel accord afin d’assurer des stocks de bois abordables pour les consommateurs américains.
« Le rapport de l’OMC ne pouvait survenir à un moment plus important », a affirmé le président du conseil de la NAHB, Chuck Fowke, dans un communiqué écrit lundi et diffusé mardi sur le compte Twitter de l’organisation. « Les constructeurs de maisons ont besoin d’une entente commerciale raisonnée pour garantir un approvisionnement de bois à prix raisonnable. La décision de l’OMC pourrait être l’élément déclencheur pour le redémarrage des discussions entre les États-Unis et le Canada. »
À la suite d’une plainte de l’industrie américaine du bois d’œuvre en 2016, Washington a imposé en 2017 des tarifs douaniers pouvant atteindre 20,83 %. Un comité spécial de l’OMC a jugé dans une décision de plus de 250 pages que le département américain du Commerce n’a pas utilisé les bons comparatifs pour affirmer que le bois canadien bénéficie d’avantages déloyaux. La situation a cela de particulier que même si les Américains portaient la cause en appel, l’organe d’appel de l’OMC est inopérant, car les États-Unis ont cessé de participer à la nomination de juges.
Uniquement pour le bois québécois, les tarifs douaniers récoltés à la frontière s’élèvent à 800 millions depuis 2017, selon le Conseil de l’industrie forestière du Québec.
Depuis le milieu du mois d’avril, a mentionné la NAHB, le prix du bois d’œuvre a augmenté de 130 % en raison d’une demande beaucoup plus forte que l’offre du marché. Cette hausse a été carrément refilée aux acheteurs américains : le prix moyen d’une maison unifamiliale a bondi de 16 000 $US, tandis que celui d’un logement en copropriété a augmenté de 6000 $US.
La NAHB affirme avoir répété à plusieurs reprises au cours des dernières semaines son espoir de voir le secrétaire américain du Commerce, Wilbur Ross, et le représentant américainau Commerce, Robert Lighthizer, reprendre contact avec les négociateurs canadiens. La NAHB « demande aussi à la coalition de l’industrie américaine du bois d’œuvre de trouver des moyens d’augmenter la production afin de répondre à la forte demande ».
Cette organisation, la U.S. Lumber Coalition, n’avait que des critiques à formuler mardi à l’égard de la décision du comité de l’OMC, saluée par la classe politique canadienne et québécoise, de même que par les regroupements industriels.
« Même si cette décision n’est pas contraignante pour les États-Unis et qu’elle n’a donc pas d’effet immédiat sur les procédures en cours au sein du ministère du Commerce, ces rapports du groupe spécial de l’OMC, qui présentent de graves lacunes, sapent la crédibilité de l’ensemble du système de l’OMC et nuisent aux travailleurs américains et à leurs communautés qui dépendent de l’application intégrale et efficace des lois commerciales américaines », a affirmé dans un communiqué le coprésident de la U.S. Lumber Coalition, Jason Brochu. « Le gouvernement des États-Unis doit rejeter cette tentative flagrante d’un groupe spécial de l’OMC de réduire les droits américains et sa tentative de dévier et d’aller au-delà de ses obligations. »
L’industrie québécoise a rappelé lundi que le système d’enchères sur lequel repose le régime de vente de droits de coupe du Québec a été mis en place justement en réaction à des demandes américaines. « De nombreux experts ont confirmé que ces enchères étaient de parfaits exemples de marchés équitables. Le département du Commerce américain a constamment refusé de les reconnaîtreet maintenant l’OMC a conclu qu’il avait tort. »