Français et Canadiens convoitent une part du gâteau A220

Les entreprises aéronautiques, non seulement canadiennes, mais aussi françaises, suivent de près la prise en main de l’ancien programme de la CSeries de Bombardier par l’européenne Airbus, les unes comme les autres espérant se tailler une place dans les étapes de construction des appareils appelés désormais A220.
« C’est sûr qu’en ce moment tout le monde regarde […] le passage de la CSeries à l’A220 chez Airbus », a rapporté lundi le président du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS), Éric Trappier, lors d’un point de presse en marge d’un événement réunissant 250 représentants du secteur des deux pays, qui se tenait dans un hôtel du centre-ville de Montréal. Les changements annoncés dans la chaîne d’approvisionnement des avions assemblés à Mirabel, au Québec, ainsi qu’à Mobile, en Alabama, représentent une chance pour les entreprises du secteur, grandes et plus petites, françaises et canadiennes, qui ne participent pas encore à sa construction, mais aussi un risque pour les entreprises qui faisaient déjà affaire avec Bombardier, a-t-il observé. L’arrivée à Montréal d’Airbus ouvre aussi une porte qui pourrait permettre à des entreprises canadiennes d’intégrer les chaînes d’approvisionnement d’autres appareils du géant européen.
Bombardier a cédé le mois dernier les dernières parts qui lui restaient dans son aventure de la CSeries, le programme A220 appartenant désormais pour 75 % à Airbus et 25 % au gouvernement du Québec. Fort d’un carnet de commande de 550 appareils A220, Airbus s’est engagé à garder les 3300 emplois qui étaient liés au programme chez Bombardier et avait indiqué, la semaine suivante, avoir l’intention d’investir entre 500 millions et 1 milliard d’euros (de 745 millions de dollars à 1,5 milliard) cette année dans le but d’améliorer la productivité et de réduire les coûts de fabrication des appareils.
Dur d’être constructeur
Ce n’est pas pour rien que si peu d’entreprises parviennent à mettre au monde de nouvelles familles d’avions et à connaître du succès aujourd’hui, a expliqué Éric Trappier, qui est aussi p.-d.g. de Dassault Aviation, un concurrent de Bombardier dans le seul secteur aéronautique où la compagnie montréalaise est encore active, soit celui des avions d’affaires. « C’est un métier difficile [où il faut savoir concilier les facteurs] techniques, commerciaux et financiers. Ce n’est pas tout d’avoir des succès techniques. Il faut aussi pouvoir les financer. Et pour les financer, il faut pouvoir les vendre. »
De son côté, Dassault dit pouvoir compter sur la complémentarité de ses ventes d’avions d’affaires (Falcon) et avions de combat (Rafale). Contrairement à une autre rivale, l’américaine Textron — que la rumeur a dit, pendant un temps, le mois dernier, désireuse de se porter acquéreuse de la division avions d’affaires de Bombardier —, la compagnie française ne verrait aucun intérêt à acheter cette dernière, ni même à s’y associer, a assuré son patron. « Nous sommes véritablement des concurrents. »
Nous avons l’impression, nous, Européens et Français, que nous n’avons pas accès au marché de la défense canadienne
Discrimination militaire
De deux jours seulement, la mission du GIFAS au Canada compte une centaine de membres issus de grands joueurs, comme Airbus, Dassault, Safran et Thales, mais aussi d’une soixantaine de sous-traitants, équipementiers et PME plus petits. Une partie de la délégation passera par Ottawa mardi. On espère notamment convaincre le gouvernement fédéral de ne pas toujours seulement regarder du côté des États-Unis lorsque vient le temps de faire ses dépenses militaires. « Nous avons l’impression, nous, Européens et Français, que nous n’avons pas accès au marché de la défense canadienne », a résumé Éric Trappier, dont la compagnie a perdu tout espoir de voir son avion de chasse considéré dans le remplacement des CF-18 canadiens