Le climat s’invite dans la liste des menaces au système financier canadien

Le Banque du Canada reconnaît que le pays se réchauffe «nettement plus vite que le reste du monde», entraînant des phénomènes météorologiques extrêmes.
Photo: Catherine Legault Le Devoir Le Banque du Canada reconnaît que le pays se réchauffe «nettement plus vite que le reste du monde», entraînant des phénomènes météorologiques extrêmes.

Les changements climatiques s’insèrent dans la liste des sources de risques pour l’économie et le système financier, au rang des points faibles. La Banque du Canada intègre désormais ses effets et conséquences dans ses analyses et réitère sa contribution au Réseau des banques centrales et des superviseurs pour le verdissement du système financier (NGFS, en anglais).

Dans sa Revue du système financier publiée jeudi, la Banque du Canada consacre un large chapitre à la vulnérabilité découlant des changements climatiques. Elle souligne qu’il s’agit d’une source d’inquiétude « en raison à la fois des risques physiques découlant des phénomènes météorologiques extrêmes et des risques liés à la transition vers une économie mondiale sobre en carbone ». Tout en retenant que le Canada est particulièrement touché. Elle fait sienne l’estimation voulant que le Canada « se réchauffe nettement plus vite que le reste du monde ».

Outre les coûts directs liés aux événements physiques, « le passage à une économie sobre en carbone implique des ajustements structuraux complexes qui ouvriront la porte à de nouvelles possibilités, mais aussi à des risques de transition susceptibles d’avoir de vastes répercussions sur l’économie ». Dans l’univers de l’investissement, la Banque évoque la possibilité que le prix des éléments d’actif ne reflète pas nécessairement toute l’ampleur des risques liés au carbone.

En avril dernier, la Banque du Canada était de la trentaine de banques centrales qui, sous le leadership des banques d’Angleterre et de France, reprenaient le thème du verdissement de la finance internationale, exhortant les décideurs politiques et réglementaires à positionner leur système financier face aux changements climatiques. Au risque physique, qui interpelle particulièrement les assureurs et les banques, s’ajoute celui de responsabilité civile auquel s’exposent de manière plus sensible les gouvernements et les entreprises. S’y greffe la relation risque-rendement associée à la transition vers une économie à faible émission en carbone. En appui, un rapport déposé par le NGFS reconnaissait que les risques liés aux changements climatiques ne sont pas entièrement reflétés dans l’évaluation des éléments d’actif.

Endettement

 

Parmi les autres risques avancés dans la Revue, il est souligné que l’accroissement de la dette des entreprises devient une nouvelle vulnérabilité, et ce, tant au Canada qu’à l’échelle internationale. « Cette hausse s’est surtout concentrée chez les entreprises ayant une faible cote de crédit. L’intérêt des investisseurs pour les obligations à rendement élevé et les prêts à effet de levier a été à l’origine de cette augmentation de l’emprunt, rendant ainsi l’activité future vulnérable au revirement de la confiance des investisseurs. »

Les entreprises du secteur non financier ont donc pris la place de l’endettement des ménages et des déséquilibres sur le marché du logement, qui demeurent un enjeu important, mais ont vu leur degré de risque diminuer. La croissance du crédit a sensiblement ralenti depuis 2017. Aussi la qualité des nouveaux prêts hypothécaires s’est améliorée. Et les ménages s’adaptent aux hausses passées des taux d’intérêt, peut-on lire.

Enfin, le rapport consacre de larges chapitres aux cybermenaces et aux cryptoactifs. « La forte interconnexion entre les institutions financières figure parmi les principaux facteurs soulevant des préoccupations quant aux cybermenaces. Cette interconnexion s’étend aux services essentiels fournis par des tiers, y compris les services infonuagiques et les services publics. Dans les cas où de nombreuses institutions financières dépendent du même fournisseur externe, un cyberincident paralysant pourrait avoir des répercussions systémiques », lit-on. Quant aux cryptoactifs, ils ne constituent pas une menace majeure du fait de la petite taille de ces marchés et de l’absence de lien, donc de mécanisme de contagion avec le système financier traditionnel. Mais « en raison de leur diversité et de leur évolution rapide, les cryptoactifs présentent des risques pour la sécurité financière des consommateurs et des investisseurs ». Aux yeux des autorités de réglementation, ces éléments d’actif virtuels demeurent associés à des préoccupations liées à l’intégrité des marchés, à la fraude fiscale, au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme.

Le risque global qui menace le système financier reste important et est légèrement plus élevé qu’au moment de la parution de la livraison de juin 2018 de la Revue du système financier, notamment sous le coup du ralentissement de l’activité économique. La Banque du Canada conclut toutefois à la résilience des grandes banques canadiennes, mais soulève que « les gestionnaires de fonds communs de placement obligataires prennent davantage de risques dans un contexte marqué par le bas niveau des taux d’intérêt ».

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