La contre-proposition syndicale est rejetée par la direction d’ABI

Des Métallos manifestent contre le lockout de l’Aluminerie de Bécancour (ABI).
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir Des Métallos manifestent contre le lockout de l’Aluminerie de Bécancour (ABI).

La direction de l’Aluminerie de Bécancour (ABI) a rejeté mercredi la contre-proposition déposée par les Métallos, ceux-ci accusant l’entreprise de « bomber le torse » au lendemain des propos qu’a tenus le premier ministre François Legault, qui a suggéré au syndicat de « faire des compromis ».

Selon ABI, détenue à 75 % par Alcoa et à 25 % par Rio Tinto Alcan, le document syndical ne suffirait pas à mettre la table pour l’éventuel redémarrage de l’usine, qui fonctionne au ralenti avec des cadres en l’absence des 1030 syndiqués mis en lockout il y a 15 mois.

« La direction d’ABI aimerait voir l’aluminerie redémarrer », mais il faudra d’abord répondre à « cinq éléments clés » pour que l’aluminerie connaisse des améliorations, a insisté l’entreprise. Ces éléments sont la réorganisation du travail, la stabilité du personnel, le taux d’absentéisme, les activités syndicales (le nombre d’heures payées pour les libérations syndicales) et les modalités de financement d’un nouveau régime de retraite.

« Une fois cela fait, la direction sera disposée à discuter du protocole de retour au travail », a ajouté l’entreprise, dont les opérations ont été réduites au minimum avec son équipe de cadres. La direction a déjà proposé des augmentations salariales de 15,3 % sur six ans, mais cela ne se trouve pas au chapitre des différends.

Les derniers développements sont survenus au terme d’une rencontre de conciliation prévue entre les parties mercredi matin. Celle-ci a eu lieu au milieu d’une semaine particulièrement chargée, deux jours après que le premier ministre François Legault a personnellement discuté avec les représentants d’ABI et des Métallos.

L’usine compte 1030 travailleurs en lockout depuis janvier 2018, plusieurs d’entre eux ayant choisi de se trouver du travail ailleurs afin d’arrondir leurs fins de mois. L’usine ABI est le plus grand employeur du secteur privé de la région du Centre-du-Québec.

De plus, il s’agit d’un important acheteur d’électricité auprès d’Hydro-Québec, sauf dans des cas de force majeure, où la compagnie est libérée de cette obligation. En vertu du contrat qui lie ABI et son fournisseur, le déclenchement d’un lockout est considéré comme un cas de force majeure, situation qui a entraîné pour Hydro-Québec une perte de revenus de 165 millions en 2018.

Réaction des Métallos

 

La direction d’ABI s’est présentée à la rencontre mercredi matin sans avoir l’intention de négocier, a affirmé le syndicat, en lui reprochant du coup d’avoir eu « le torse bombé par les récentes déclarations inappropriées du premier ministre, qui a pris parti contre les syndiqués ».

En point de presse, le président local de la section 9700, Clément Masse, a également déclaré qu’ABI songe à fermer la dernière série de cuves toujours en activité « en raison de l’épuisement des cadres et des retraites » parmi ceux-ci. La direction n’a toutefois pas évoqué une fermeture définitive de l’aluminerie, a-t-il dit.

« Ce qu’on veut, c’est que l’employeur revienne négocier à la table, c’est de conclure une entente négociée qu’on va pouvoir recommander à nos membres. On veut aussi que le premier ministre mette de la pression, ce qu’il n’a pas fait ces derniers jours », a dit le président de la section locale.

Les propos du premier ministre François Legault ont suscité l’étonnement mardi quand il a posé le blâme aux pieds des Métallos. M. Legault a dit que « quand un syndicat en demande trop, le risque est alors de perdre des emplois à 92 000 $ par an, donc moi, je pense que c’est important d’être raisonnable, et actuellement, je ne trouve pas que le syndicat est raisonnable ».

Clément Masse a affirmé mercredi que « l’employeur s’est présenté ce matin très conforté dans sa position puisqu’il avait comme l’appui du premier ministre », ce qui a « nui au processus ».

ABI a présenté le 4 mars une offre comprenant une réorganisation du travail qui respecte l’ancienneté et qui ne prévoit aucune mise à pied, avait-elle annoncé à l’époque. « La convention proposée procurera de la flexibilité, capturera l’attrition d’une vague de retraites en cours et améliorera la productivité. »

Les travailleurs ont rejeté cette offre à 82 % et ont présenté leur contre-proposition le 21 mars.

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