«Tout finit par être contaminé»

Avant même d’avoir posé le pied au Québec, le président américain, Donald Trump, a promis d’aller dire à ses homologues du G7 leurs quatre vérités sur leurs politiques commerciales injustes à l’égard de son pays.
Photo: Saul Loeb Agence France-Presse Avant même d’avoir posé le pied au Québec, le président américain, Donald Trump, a promis d’aller dire à ses homologues du G7 leurs quatre vérités sur leurs politiques commerciales injustes à l’égard de son pays.

Il y a pire pour l’économie canadienne et mondiale que les tarifs de Donald Trump dans l’acier et l’aluminium ou que ses accusations de commerce déloyal lancées contre ses partenaires du G7, estime le représentant des gens d’affaires canadiens : son travail de sape des valeurs de coopération et de la règle de droit international.

Le président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Canada, Perrin Beatty, se disait « extrêmement préoccupé » vendredi, à Québec, en ouverture du sommet du G7 à La Malbaie. « Ce forum est extrêmement important », a fait valoir en entrevue au Devoir l’ancien ministre fédéral du gouvernement conservateur de Brian Mulroney.

« Il devrait être le comité directeur de l’économie mondiale et de la sécurité mondiale. Or, on le voit aujourd’hui profondément divisé par la faute du président américain, au point d’y rendre très difficile la recherche de position commune face aux défis auxquels ses pays membres et le monde font face. »

Plus que des tarifs

 

Avant même d’avoir posé le pied au Québec, Donald Trump avait eu le temps, le matin, de se plaindre des tarifs douaniers au Canada liés à son système agricole de gestion de l’offre, de menacer d’adopter de nouvelles sanctions commerciales et de promettre d’aller dire à ses homologues du G7 leurs quatre vérités sur leurs politiques commerciales injustes à l’égard de son pays.

Les premiers échanges entre les sept dirigeants ont été courtois, dit-on, mais n’ont pas fait progresser d’un pouce les désaccords commerciaux qui les opposent.

« Les attaques que le président américain lance dans le commerce et contre ses collègues dépassent les enjeux économiques à court terme », déclare Perrin Beatty.

« Notre prospérité à long terme et la sécurité sur la planète dépendent de la capacité des démocraties de travailler ensemble dans une relation basée sur la confiance. Pour ce faire, le monde a besoin que les États-Unis jouent un rôle de chef de file, mais depuis que Donald Trump a été élu, il n’a eu de cesse d’attaquer systématiquement toutes nos institutions internationales, comme le G7, l’Organisation mondiale du commerce et l’OTAN. »

En attendant qu’il parte

Les tarifs imposés unilatéralement par le gouvernement Trump dans l’acier et l’aluminium, mais aussi contre le bois d’oeuvre et le papier journal canadiens ne manqueront pas de faire mal aux entreprises et aux familles au Canada comme aux États-Unis, dit Perrin Beatty.

Mais les méthodes et le discours de l’occupant de la Maison-Blanche dans ces quelques dossiers commerciaux pourraient avoir des conséquences beaucoup plus larges et graves qu’il n’y paraît. « Vous ne pouvez pas espérer empoisonner seulement une partie de l’eau d’un puits. Tout finit par être contaminé. »

À la lumière de ce comportement, Perrin Beatty estime qu’il est d’ores et déjà peine perdue d’espérer que Donald Trump connaîtra une épiphanie.

« Je crains fort que ce président ne puisse pas être raisonné. Il ne se réveillera pas un matin en réalisant qu’il avait tort et en entendant soudainement la voix du bon sens. »

Aussi, dit-il, les autres pays du G7 doivent-ils serrer les rangs pour « empêcher M. Trump de faire trop de dommages » et continuer de faire la promotion de l’internationalisme, de la libéralisation des échanges et de la coopération entre les pays.

À la tête cette année du forum des gens d’affaires des pays du G7, appelé B7, Perrin Beatty se réjouit de voir que, contrairement à son président, la communauté d’affaires américaine ne s’est pas isolée des autres et partage largement ces grands principes.

M. Beatty espère que les Canadiens ne perdront pas de vue les nombreux intérêts qu’ils ont en commun avec leurs voisins américains et qu’ils redoubleront d’efforts pour resserrer leurs liens avec les autres élus, les gens d’affaires et la population en général aux États-Unis.

« On se doit d’adopter une vision à long terme, conclut-il. Ce président finira bien par partir un jour. »

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