
Partenariat transpacifique: Trump songe à rejoindre l’accord qu’il a rejeté

La menace d’une guerre commerciale avec la Chine semble avoir fait fléchir Donald Trump. Après avoir retiré les États-Unis du Partenariat transpacifique (PTP) dès son entrée en poste, le président américain demande maintenant à ses conseillers d’étudier la possibilité de rejoindre l’accord dans sa forme révisée.
Lors d’une rencontre organisée jeudi avec des élus américains, M. Trump a indiqué que son représentant au Commerce, Robert Lighthizer, et son conseiller économique en chef, Larry Kudlow, évalueront s’il est possible que les États-Unis se joignent au Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP).
Cet accord commercial révisé après le retrait des États-Unis a été signé par les 11 pays membres, dont le Canada, le 8 mars dernier. Chacun des États signataires doit maintenant le faire ratifier par son parlement national.
L’intérêt soudain de M. Trump pour le Partenariat transpacifique constitue une volte-face spectaculaire, puisqu’il a fait du rejet de l’entente signée par son prédécesseur, Barack Obama, l’une des promesses phares de sa campagne électorale. Il est passé de la parole aux actes dès son arrivée à la Maison-Blanche en janvier 2017, en évoquant un accord « potentiellement désastreux » pour les États-Unis.
Un an plus tard, M. Trump a visiblement changé son fusil d’épaule. Au Forum économique mondial de Davos en janvier dernier, il a évoqué la possibilité de négocier avec les pays signataires du PTPGP « ensemble ou peut-être en groupe », mais il a franchi un pas de plus jeudi.
« Je suis intimement convaincu que les élections de mi-mandat aux États-Unis qui approchent [en novembre] et la guerre commerciale avec la Chine sont deux éléments extrêmement importants qui amènent maintenant les États-Unis à faire des partenariats », estime Richard Ouellet, professeur de droit international économique à l’Université Laval.
Contrer la Chine
M. Ouellet rappelle que le Partenariat transpacifique, qui exclut la Chine, a toujours été perçu comme un accord permettant aux États-Unis de faire contrepoids au géant asiatique dans plusieurs marchés importants, comme celui du Japon.
« Ce qu’on comprend maintenant, c’est que les Américains voient que c’est un accord qui est bon pour eux », observe-t-il.
La semaine dernière, les États-Unis ont publié une liste provisoire de produits importés de Chine pouvant être soumis à de nouveaux droits de douane. Les Chinois ont répliqué en ciblant des produits américains, comme le soya et l’automobile.
« M. Trump subit de fortes pressions de la part de groupes économiques, notamment dans le domaine de l’agriculture, pour que les États-Unis réintègrent le PTP, souligne le professeur de l’Université d’Ottawa Patrick Leblond, qui se spécialise en commerce international. La logique géostratégique du PTP de faire concurrence à la Chine demeure très forte et plusieurs membres du Parti républicain y croient fortement. »
Quel impact pour le Canada ?
Le retour des États-Unis au sein du Partenariat transpacifique n’est pas assuré, puisque l’accord révisé n’est pas exactement le même que l’original : vingt-deux dispositions concernant notamment la propriété intellectuelle et le règlement des différends entre investisseurs et États ont été suspendues.
Au cabinet du ministre fédéral du Commerce international, François-Philippe Champagne, on évite pour l’instant d’évaluer l’impact d’une possible signature américaine. « Nous avons comme priorité la ratification de l’accord le plus rapidement possible […], afin que nos travailleurs et les familles canadiennes puissent bénéficier des retombées de celui-ci », répond l’attaché de presse du ministre, Pierre-Olivier Herbert.
Sur le site du gouvernement fédéral, on indique toutefois que « les avantages économiques d’un PTPGP pour le Canada sont supérieurs à ceux du PTP ». L’accord révisé apporterait 4,2 milliards de dollars au PIB canadien, comparativement à 3,4 milliards de dollars avec le PTP original.
« Cela est dû au fait que, sans les États-Unis parmi les signataires, les entreprises canadiennes auront l’avantage du « premier arrivé » sur des marchés clés du PTPGP, comme le Japon, et que le Canada continuera de profiter d’un accès privilégié au marché des États-Unis grâce à l’ALENA », écrit-on.