David Solomon, un banquier DJ bientôt à la tête de Goldman Sachs

À 56 ans, David Solomon, alias «DJ D-Sol», son nom de scène, a été choisi comme le seul et unique successeur de Lloyd Blankfein.
Photo: Paul Morigi Getty Images Agence France-Presse À 56 ans, David Solomon, alias «DJ D-Sol», son nom de scène, a été choisi comme le seul et unique successeur de Lloyd Blankfein.

Amateur de grands crus et DJ à ses heures perdues, David Solomon, pressenti pour diriger Goldman Sachs, la banque des puissants au modèle économique déclinant, est un banquier atypique dans l’univers feutré des « golden boys » de Wall Street.

À 56 ans, « DJ D-Sol », son nom de scène, a été choisi comme le seul et unique successeur de Lloyd Blankfein, 63 ans, lors d’un conseil d’administration après une lutte de pouvoir de 15 mois avec Harvey Schwartz, 54 ans, un ancien trader qui a annoncé du coup son départ de la célèbre banque de Wall Street.

La nouvelle, communiquée en début de semaine dernière aux deux hommes, a été officialisée lundi et a mis fin à des mois de conjectures sur l’un des postes les plus influents de la finance mondiale. M. Blankfein n’a pas encore donné la date de son départ, mais il se murmure que ce sera en fin d’année.

David Solomon n’est pas une superstar de Wall Street, même s’il a été aux platines dans des boîtes de nuit de New York ou de Miami. Son compte Instagram « djdsolmusic » recense les photos de différentes soirées, dont la dernière remonterait au 19 janvier au club Up Down de Manhattan. Contrairement au titulaire actuel du poste, ce mordu du ski n’est pas un trader, mais plutôt un banquier d’affaires davantage réputé pour ses qualités de manager que pour les deals dans lesquels il est intervenu. « Avec lui, Goldman Sachs sera entre de bonnes mains pour poursuivre son chemin au-delà de son 150e anniversaire qui tombe l’année prochaine », estime l’ancien banquier d’affaires William Cohan dans Vanity Fair.

David Solomon a commencé sa carrière à Wall Street dans les années 1980 chez Drexel Burnham Lambert, où il essayait de placer les obligations des entreprises, avant de rejoindre Bear Stearns. Ces deux firmes ont aujourd’hui disparu. Ce New-Yorkais, marié, comprend les risques, dit-on de lui à Goldman Sachs, où il entre en 1999 comme « associé », fait rare, car il est de tradition de faire ses preuves pour accéder à un tel accessit. Il y développe la division des « obligations pourries » (junk bonds) et est promu en 2006 codirigeant de la banque d’investissement, qui conseille les entreprises dans leurs opérations de fusions-acquisitions et de collectes de fonds.

David Solomon est crédité pour avoir donné ses lettres de noblesse à cette division, dont le moral était en berne devant la toute-puissance des traders. Il y avait mis en place une politique de zéro prime pour les 5 % d’employés les moins performants.

Il incombe désormais à ce grand gaillard au crâne chauve, n’hésitant pas à s’afficher avec des rappeurs comme Sean « Diddy » Combs, la délicate mission d’insuffler un nouveau souffle à Goldman Sachs, qui a fini par reconnaître seulement récemment que les activités spéculatives ne rapporteront plus autant que par le passé. Goldman Sachs a annoncé en septembre un plan de relance de hausse des revenus de 5 milliards de dollars d’ici 2020 axé sur la croissance des activités de prêts et un développement de la banque d’investissement.

M. Solomon « aura besoin de transformer Goldman en une entreprise plus rentable en développant la gestion d’actif et de fortune, la banque d’investissement, les activités de prêts », résume Gerard Cassidy, analyste chez RBC. Il reviendra également à cet amateur de grands crus — son ex-secrétaire lui a volé entre 2014 et 2016 des centaines de bouteilles de vins renommés — de finir de redorer la réputation de la banque, qui a été ternie par son rôle controversé dans la crise financière.

En interne, M. Solomon a déjà commencé à pousser vers un changement de culture : il est à l’origine des initiatives de Goldman Sachs pour améliorer les conditions de travail des jeunes recrues et notamment l’allègement de leurs horaires et de leur charge de travail. Il a poussé également à davantage de diversité, dont plus d’embauches de femmes ainsi que leur promotion.

David Solomon est plutôt discret sur ses préférences politiques. Fan d’Hillary Clinton en 2008, il s’est dit déçu par elle en 2016 et n’a pas apprécié les critiques de Barack Obama à l’encontre de Wall Street. Lors de ses passages chez Bear Stearns et Drexel Burnham Lambert, il avait aussi été en affaires avec Donald Trump, alors magnat de l’immobilier à New York.

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