Le milliardaire Wilbur Ross confirmé à la tête du Commerce américain

L’investisseur milliardaire Wilbur Ross, qui a amassé 2,5 milliards $US en misant notamment sur des entreprises en difficulté dans le secteur industriel, a été confirmé au poste de secrétaire du Commerce comme prévu lundi soir lors d’un vote à 72 pour et 27 contre au Sénat, récoltant même des appuis chez les sénateurs démocrates.
Âgé de 79 ans, M. Ross s’est présenté jusqu’ici comme un partisan d’échanges commerciaux « sensés » et sera pour le cabinet du président Trump un pilier important dans l’élaboration de la politique américaine. L’homme d’affaires connaît personnellement Donald Trump depuis les années 80, à l’époque de ses problèmes de casino à Atlantic City. Sa comparution au comité sénatorial, le 18 janvier, s’était nettement mieux déroulée que celles des candidats aux autres postes, et sa confirmation ne faisait à peu près aucun doute.
Spécialiste du rachat et des restructurations, M. Ross, décrit comme un adversaire féroce mais courtois dans les négociations, a longtemps travaillé pour Rothschild avant de mettre sur pied son propre cabinet de services dans les années 90. Du coup, il devient le plus riche membre du cabinet Trump, sa fortune déclassant aisément celle de Betsy DeVos (Éducation : 1,25 milliard $US) et de Rex Tillerson (État : 325 millions $US).
Le nouveau secrétaire au Commerce a déjà affirmé que le gouvernement Trump allait réévaluer « très, très rapidement » l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA).
« Je ne suis pas anticommerce. Je suis procommerce,a-t-il dit au comité sénatorial en janvier. Mais je suis pour un commerce sensé. Être contre le commerce peut jouer contre le travailleur américain et le milieu manufacturier américain. »
Le président Trump a souvent critiqué l’ALENA en affirmant que l’entente désavantage profondément les États-Unis, un grincement des dents qui vise surtout le Mexique et non le Canada. Il a aussi critiqué l’accord du Partenariat transpacifique et la Chine, devenue au cours des dernières années la deuxième puissance économique mondiale derrière les Américains, importateurs acharnés de ses produits.
« [M. Ross] semble partager le populisme économique de Donald Trump, comme la plupart des dirigeants du monde des affaires »,a indiqué au Devoir Michael Hart, titulaire de la Chaire Simon Reisman en politique commerciale à l’Université Carleton et ancien haut gradé des négociations commerciales à Ottawa.
« Dans mon expérience, la plupart des gens d’affaires aiment la protection pour eux-mêmes, mais pas pour les autres, et ont tendance à formuler ça en termes de commerce équitable,a ajouté M. Hart. C’est un concept bidon auquel la solution est un ensemble de bonnes règles qui limitent les dommages que les gouvernements peuvent causer lorsqu’ils favorisent les intérêts locaux au détriment des consommateurs et des autres intérêts d’affaires. »
Selon les règles
M. Ross avait ajouté lors de son passage au Sénat que seuls les pays « qui jouent selon les règles et donnent une chance à tout le monde devraient avoir accès au marché américain » et que « ceux qui ne le font pas […] devraient être sévèrement punis ».
Dans un long portrait écrit par le New York Times en novembre 2016, on décrit un homme d’affaires dont les placements ont suscité l’admiration (l’acquisition d’usines syndiquées en détresse, notamment dans le charbon) et causé scandale (l’acquisition d’une mine en Virginie de l’Ouest suivie d’une explosion faisant 12 morts deux semaines plus tard).
Le Times revient sur un épisode désormais connu, raconté à maintes reprises par d’autres avant lui : la fois, en 1991, où M. Ross et un autre investisseur connu, Carl Icahn, ont eu entre leurs mains le sort du casino Taj Mahal de M. Trump à Atlantic City. Plutôt que de le faire basculer dans la faillite, M. Ross permet alors à M. Trump d’obtenir de meilleurs taux sur sa dette. La contrepartie ? M. Trump a dû renoncer à 50 % de sa participation.